Gouverner le Kosovo «d'un bout à l'autre»
Élections au Kosovo: un test pour la politique de fermeté de Kurti

Les élections législatives au Kosovo ont débuté dimanche, avec une victoire attendue du Premier ministre sortant Albin Kurti. Ce scrutin teste le soutien à sa politique ferme envers la Serbie, malgré les préoccupations économiques des électeurs.
Publié: 09.02.2025 à 14:11 heures
Des électeurs se préparent à voter aux élections générales au Kosovo, où Albin Kurti est donné favori.
Photo: AFP
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AFP Agence France-Presse

Les élections législatives ont commencé dimanche au Kosovo, un scrutin où la victoire attendue du Premier ministre sortant, Albin Kurti, servira de test pour le soutien à sa politique de fermeté face à la Serbie.

«Je remercie tous les citoyens du Kosovo qui ont voté jusqu'à présent et j'encourage tout le monde à le faire. Exercez votre droit démocratique pour faire entendre votre voix», a lancé Albin Kurti, qui considère l'élection comme un «référendum historique» pour ce territoire qui s'est séparé de la Serbie en 2008.

Gouverner le Kosovo «d'un bout à l'autre»

Albin Kurti et son parti, Vetevendosje (VV, «autodétermination"), ont fait campagne en promettant de gouverner le Kosovo «d'un bout à l'autre», c'est à dire même dans les territoires habités majoritairement par des Serbes où l'influence de Belgrade est bien plus palpable que celle de Pristina.

Pour de nombreux électeurs les questions économiques sont néanmoins prioritaires. «Nous croyons que le changement viendra. Je pense à l'emploi, à l'économie et à tous les autres secteurs», a dit à l'AFP après avoir voté, Remzije Halimi, une enseignante. «Ma principale préoccupation est l'amélioration du système éducatif et la création de davantage d'opportunités pour les jeunes comme moi», a affirmé pour sa part, Morena Ismaili, qui votait pour la première fois.

Le VV se dirige vers une nouvelle victoire

Ces derniers mois, le Premier ministre-candidat y a fait fermer beaucoup d'institutions parallèles (banques, bureaux de poste, administrations) que la Serbie finançait pour s'assurer la fidélité de la minorité serbe.

Ces fermetures, abondamment relayées dans la presse, pourraient offrir au VV une large victoire: les derniers rares sondages créditent le parti de 40 à 50% des voix dans un Parlement morcelé. En 2021, VV avait récolté 50,28% des voix, devant le Parti démocratique du Kosovo (PDK), 17%.

Créé par d'anciens combattants de la guerre contre les forces serbes, le PDK a dominé la vie politique de l'indépendance en 2008 à 2019, avant que certains de ses responsables ne soient rattrapés par la justice internationale pour des crimes commis lors du conflit contre la Serbie à la fin des années 1990.

«Voter pour la Liste serbe, c'est voter pour l'Etat serbe»

Sur les 20 sièges réservés aux minorités, les 10 dédiés à la minorité serbe avaient tous été remportés par la Srpska Lista (Liste serbe) en 2021. Le score de ce parti, considéré par Pristina comme le bras armé de la Serbie, sera également scruté par les autorités.

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Chaque Serbe qui n'ira pas voter demain, ou qui votera contre la Liste serbe, donnera de facto sa voix à Albin Kurti et à ceux qui lui obéissent
Zlatan Elek, chef de la Liste serbe
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«Voter pour la Liste serbe, c'est voter pour l'Etat serbe», a d'ailleurs affirmé Zlatan Elek, chef de cette formation, dans une interview cette semaine. «Chaque Serbe qui n'ira pas voter demain, ou qui votera contre la Liste serbe, donnera de facto sa voix à Albin Kurti et à ceux qui lui obéissent», a-t-il ajouté. Le président serbe Aleksandar Vucic a également appelé à voter pour les candidats de la Srpska Lista, «seuls garants qu'Albin Kurti n'expulsera pas les Serbes du Kosovo».

Kurti en tension avec la Serbie

Interrogé sur la possibilité que les autorités kosovares empêchent certains électeurs serbes du Kosovo vivant en Serbie de venir voter, Aleksandar Vucic s'est voulu rassurant. «Nous avons discuté jusqu'à tard cette nuit avec des représentants de la Quinte (France, Allemagne, Italie, Royaume-Uni, Etats-Unis, ndlr). Nous avons reçu la promesse que cela n'arrivera pas.» Les années de pouvoir d'Albin Kurti ont été marquées par des tensions fréquentes avec la minorité serbe et avec Belgrade, en particulier depuis l'échec des discussions organisées par l'Union Européenne en 2023.

En mai de la même année, des dizaines de soldats de la force de maintien de la paix de l'Otan ont été blessés dans des heurts avec des Serbes. En septembre 2023, un commando composé de serbes lourdement armés a tué un policier kosovar avant de se retrancher plusieurs heures dans un monastère puis de fuir à pied en Serbie. Fin novembre 2024, l'attaque d'un canal vital pour l'infrastructure électrique du Kosovo a de nouveau fait monter les tensions.

Albin Kurti, borné?

Cela n'a jamais fait vaciller Albin Kurti dans sa politique de fermeté face à la Serbie, quitte à agacer la communauté internationale qui l'accuse de refuser tout dialogue. Ses partisans ont loué sa vision. «Vous pouvez voir les choses que (Kurti) a faites. Il est irremplaçable», a assuré à l'AFP Zek Kurtaj, après avoir atterri à l'aéroport de Pristina samedi avant le vote.

Albin Kurti «a été régulièrement accusé par l'opposition de ne pas en faire assez, de s'aliéner la communauté internationale et de se plaindre de la Serbie, tout en passant à côté d'opportunités de construire des infrastructures et de développer économiquement le Kosovo», rappelle Jonathan Moore, un expert du Centre Europe de l'Atlantic Council.

Les bureaux de vote ont ouvert à 07H00 (06H00 GMT) et fermeront 12 heures plus tard. Les premières estimations devraient être publiées dans la foulée.

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