Valls, Borne, Darmanin …
La France a un gouvernement, mais ça ne règle rien (pour l'instant)

Le nouveau gouvernement français comporte 35 ministres. Pas d'ouverture à gauche, mais quelques revenants socialistes dont l'ex-Premier ministre Manuel Valls. Et maintenant? Rien n'est réglé. Loin s'en faut.
Publié: 24.12.2024 à 06:06 heures
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Dernière mise à jour: 24.12.2024 à 09:17 heures
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Le nouveau gouvernement français dirigé par François Bayrou comporte 35 ministres.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

L’homme le plus important du nouveau gouvernement français est celui que personne ne connaît. Eric Lombard, 66 ans, occupait jusque-là la poste stratégique de directeur général de la Caisse des Dépôts et Consignations, l’institution en charge d’une grande partie de l’épargne nationale. Or le voici, depuis lundi soir, aux commandes du ministère des Finances, alors que la dette publique de la France dépasse les 3300 milliards d’euros et que le budget 2025 n’a pas été voté.

C’est une loi spéciale adoptée à la mi-décembre qui permet, pour l’heure, de continuer de prélever l’impôt et de faire fonctionner les services publics. Autant dire qu’Eric Lombard sera l’un des premiers sur le front pour essayer de sortir le pays de l’ornière. Avec, comme première étape, la présentation au Parlement d’un projet de budget rectificatif à très hauts risques. On en saura davantage lors de la déclaration de politique générale prévue le 14 janvier.

Savez-vous, par ailleurs, quel est pour François Bayrou le sujet le plus important à l’agenda du gouvernement qu’il a finalement composé avec plusieurs revenants, dont les anciens Premiers ministres Manuel Valls (2014-2016) et Elisabeth Borne (2022-2023)? La réponse est l’Éducation nationale, dont cette dernière sera chargée. C'est ce que le Premier ministre a affirmé à BFM TV.

Dérapage chronique des dépenses

Le pays est confronté à un dérapage chronique de ses finances publiques. L’Assemblée nationale est divisée en trois blocs, sans majorité. Le risque d’une nouvelle motion de censure votée ensemble par le Rassemblement national (droite nationale populiste) et les partis de gauche demeure très élevé. Mais pour le chef du gouvernement, lui-même ancien ministre de l’Education, l’un des postes les plus importants de sa nouvelle équipe est celui de l’enseignement supérieur, confié à Philippe Baptiste, un ancien président du Centre national d’études spatiales.

Ainsi va la France. Emmanuel Macron n’a jamais été aussi impopulaire (76% de ses compatriotes estiment qu’il est aujourd’hui un mauvais président). La crise institutionnelle menace. Ses partenaires européens s’inquiètent. Ses territoires d’Outre-Mer sont en pleine déconfiture institutionnelle. L’île de Mayotte est un désastre humanitaire après le passage de l’ouragan Chido. L’absence de majorité interdit toute visibilité politique et toute tentative de réforme.

La recette miracle

Mais qu’importe: François Bayrou, vétéran politique de 73 ans, pense avoir trouvé la recette miracle. Comment? En misant sur des «revenants» certes impopulaires (c’est le cas pour Manuel Valls - dont la mère est tessinoise - Elisabeth Borne ou Gérald Darmanin, l’ancien ministre de l’Intérieur qui prend le portefeuille de la Justice), mais supposés connaître les rouages d’un Etat de plus en plus dysfonctionnel.

Les problèmes structurels du pays? Seuls l’ordre public et le sujet de l’immigration sont mis sur la table, confiés au ministre de l’Intérieur reconduit Bruno Retailleau. Pas question, en revanche, d'envisager une baisse des dépenses de l’Etat. Le retour de l'impôt sur la fortune, réclamé par la gauche, est écarté. Des hausses d’impôts restent toutefois probables, alors que les prélèvements obligatoires représentent 46% de la richesse annuelle produite. Et côté politique, rien de concret en matière de «réconciliation», pourtant promise dès sa prise de fonction le 13 décembre par François Bayrou.

Porte fermée à gauche

Aucune personnalité de la gauche modérée n’a accepté de rejoindre son gouvernement. Lui-même a cédé à l’oukase de l’extrême-droite qui refusait de voir nommer à la Justice l’un de ses pires ennemis: le président de la région Nord, Xavier Bertrand. Il se murmure même que le nouveau garde des Sceaux, Gérald Darmanin pourrait avoir conclu un pacte avec Marine Le Pen, passible d’une peine d’inéligibilité dans son procès pour détournement de fonds publics via l’utilisation d’assistants parlementaires européens. Le jugement est attendu fin mars. Réconciliation? Difficile d’y voir autre chose qu’une tentative de dissuader l’extrême droite de voter à nouveau la censure à court terme. Tandis que la gauche sociale-démocrate est renvoyée à ses querelles, entre ceux qui ont gouverné sous François Hollande (Manuel Valls et François Rebsamen, nouveau ministre des collectivités territoriales) et ceux qui exigeaient comme préalable un retrait de la réforme controversée des retraites.

Résultat: Le nouveau gouvernement français est une sorte de mirage. Il n’a rien de nouveau. Au contraire: il fleure bon la France d'hier, celle de la démocratie chrétienne dont est issu François Bayrou. Avec pour premier horizon le vote d’un budget assuré d’être très compliqué.

Le nouveau Premier ministre français a obtenu de haute lutte d’être nommé par Emmanuel Macron. Il a promis une «nouvelle méthode». Chacun est libre d’y croire. Reste que pour l’heure, la France est toujours confrontée au même dilemme: elle a devant elle bien plus de problèmes que de solutions.

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