«On est là avec Marine!»
Pourquoi les électeurs de Marine Le Pen y croient encore en France

La cheffe du Rassemblement national a juré ce dimanche 6 avril devant ses partisans qu'elle ne renoncera pas à la prochaine élection présidentielle française. Et ce, malgré sa lourde condamnation par la justice. Au point de se comparer à Martin Luther King.
Publié: 06.04.2025 à 17:53 heures
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Entre 3000 et 5000 personnes s'étaient déplacées pour soutenir Marine Le Pen ce dimanche 6 avril à Paris.
Photo: keystone-sda.ch
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Richard WerlyJournaliste Blick

«Nous sommes de ceux qui ne s’inclinent pas. Nous sommes de ceux qui n’abdiquent pas […] Dans tous les pays européens, les dirigeants de partis nationaux sont poursuivis […] Cette décision de justice a foulé aux pieds ce à quoi je tiens par-dessus tout: mon peuple, mon pays et mon honneur». C’est ainsi que Marine Le Pen s’est adressée ce dimanche 6 avril aux milliers de partisans du Rassemblement national (RN) venus la soutenir à Paris. Un meeting de combat, pour des électeurs qui croient encore à ses chances pour la présidentielle de 2027. La preuve en cinq affirmations entendues lors du meeting, face à l’église des Invalides.

«Marine a besoin de vous»

Jordan Bardella l’a répété plusieurs fois. «Marine a besoin de vous». Et d’ajouter «Au bout du chemin, c’est la victoire qui nous attend et croyez-moi, elle n’a jamais été aussi proche». L’appel à la résistance est donc lancé. Résistance contre la justice qui, selon Marine Le Pen, a pris une décision politique en la condamnant lourdement, le 31 mars, à l’issue de son procès pour «détournement de fonds publics». Résistance contre les «forces du système» qui veulent conserver le pouvoir. Résistance au nom de «tous les Français eux aussi discriminés». Malgré la mobilisation plutôt décevante (entre 3000 et 5000 personnes), le RN a prouvé l’attachement fort entre sa cheffe et son électorat. Celle-ci l’a d’ailleurs surjoué en parlant de «mon peuple».

«Nous sommes en train de gagner»

La meilleure façon de motiver ses troupes, c’est bien connu, est de les convaincre que la victoire est proche et que leur mobilisation sera décisive. C’est ce qu’a fait ce dimanche à Paris Marine Le Pen, que tous les sondages placent en première position à l’issue du premier tour de la prochaine élection présidentielle, avec 33 à 36,5% des intentions de vote. Un refrain encore plus efficace à l’heure où le vent national populiste souffle à pleine vitesse sur l’Europe, en provenance des Etats-Unis où Donald Trump lui a apporté son soutien. La mise en scène des soutiens européens à Marine Le Pen avait aussi ce but: puisque ses amis sont au pouvoir en Italie, aux Pays-Bas ou en Hongrie, pourquoi pas en France?

«Une chasse aux sorcières»

«C’est nous qui sommes les plus ardents défenseurs de la démocratie et de l’Etat de droit», a proclamé Marine Le Pen devant ses partisans, en se gardant bien de revenir en détails sur l’affaire pour laquelle elle a été lourdement condamnée. Sa rhétorique est habile: elle ne s’est pas présentée comme une victime de la justice (dans laquelle une majorité de Français ont confiance selon les sondages récents), mais comme une cible politique. Ses électeurs en tirent les conséquences: ils sont, eux aussi, pourchassés. Le système veut les faire taire. «Nous ne céderons jamais aux pressions» avait tonné avant elle Louis Aliot, le maire de Perpignan et ancien député européen, condamné à ses côtés, mais autorisé, lui, à se représenter aux municipales de 2026, car sa peine d’inéligibilité n’est pas assortie d’une exécution immédiate.

«Aucun esprit de sédition»

Les électeurs de Marine Le Pen continuent d’y croire parce qu’elle a réussi – contrairement à son père Jean-Marie Le Pen, récemment décédé – à incarner un combat républicain. C’est la force de la cheffe du RN: être à la fois nationale-populiste, surfer sur la colère populaire, mener la charge contre l’Europe communautaire qu’elle déteste, mais sans accent putschiste ou autoritaire. Moralité: les onze millions de Français qui ont voté pour elle lors de la présidentielle 2022 (perdue à nouveau au second tour face à Emmanuel Macron par 58,5% contre 41,5%) se voient comme l’alternance. D’où leur slogan répété tout au long de l’après-midi: «On est là».

«Jordan et moi, nous sommes un duo»

Pourquoi se décourager et abandonner le combat après un jugement en première instance alors que 1) un nouveau procès en appel aura lieu, sans doute au début 2026 2) un présidentiable remplaçant existe: Jordan Bardella, lui aussi crédité par les sondages de plus de 30% des voix au premier tour s’il devait se lancer dans la course à l’Élysée. Beaucoup d’observateurs politiques français ont pensé, jusque-là, que Bardella pourrait être tenté de sacrifier Marine sur l’autel de la justice. Pour l’heure, c’est le contraire. Sa condamnation les soude, ce qui rassure leurs partisans. Le ton très offensif de Louis Aliot montre aussi que ce dernier peut être un recours. En clair: le RN est une écurie de présidentiables et tous ont le vent en poupe.

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