Une bonne partie des Français ne la digère toujours pas. C’est ce vendredi 1er septembre que la très controversée réforme des retraites entre en vigueur. Fini, l’âge légal de départ à 62 ans, qui était le plus bas d’Europe avec la Suède! Place, par paliers jusqu’en 2030, aux 64 ans minimum pour tous.
Mais l’honneur social est sauf. La plupart des voisins de la France continueront de travailler plus, jusqu’à 65 ans (comme en Suisse), 66 ans (comme au Portugal) ou 67 ans (en Italie). La loi qui a failli mettre le feu social à la France persiste à maintenir le pays dans une situation d’exception, malgré ses indicateurs budgétaires en rouge vif: 7,5 milliards d’euros de déficit programmé cette année pour le budget de la Sécurité sociale, 86,7 milliards d’euros de déficit pour le budget de l’État en avril, et 3 013 milliards d’euros de dette publique, soit près de 113% du produit intérieur brut, un dérapage record.
Une France plus travailleuse?
Place, donc, à une nouvelle France plus travailleuse, plus productive et plus compétitive conformément aux vœux d’Emmanuel Macron qui s’est encore félicité, lundi 28 août lors de la traditionnelle conférence des ambassadeurs, que son pays soit le premier destinataire d’investissements étrangers au sein de l’Union européenne? Voire. Car les changements entraînés par cette réforme à partir du 1er septembre ne tomberont pas comme une guillotine.
La durée de cotisation sera rallongée de trois mois pour les premiers concernés, natifs de 1961, ce qui n’est pas un pas de géant. Ils devront attendre 62 ans et 3 mois pour partir à la retraite, et auront besoin d’avoir validé 169 trimestres pour avoir une pension à taux plein (contre 168 auparavant).
L’âge légal de départ augmentera ensuite d’un trimestre par génération, pour atteindre 64 ans pour la génération 1968. Les enfants de mai 1968, la révolte étudiante qui secoua Paris et le monde, seront les premiers à entrer dans le nouveau dispositif de retraite, adopté le 20 mars par l’Assemblée nationale sans vote, grâce au recours à la procédure d’urgence de l’article 49.3 de la constitution.
Les travailleurs qui ne sont pas à jour de leurs cotisations pourront bénéficier d’une retraite pleine à partir de 67 ans.
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Autre preuve que les Français s’en tirent plutôt bien – même si environ 70% d’entre eux se disent toujours dans les sondages opposés à cette réforme des retraites: les fameux «régimes spéciaux» ne seront abrogés que pour les nouveaux embauchés. Aucun changement pour les autres!
De qui et de quoi parle-t-on? Des dérogations jusque-là accordées à certains secteurs, énumérés à l’article 1 de la loi validée par le Conseil constitutionnel le 3 mai. Celui-ci prévoit «la fermeture des régimes spéciaux de retraite des industries électriques et gazières (IEG), de la Régie autonome des transports parisiens (RATP), des clercs et employés de notaire (CRPCEN), de la Banque de France, et des membres du Conseil économique, social et environnemental (CESE) pour les agents qui seront recrutés à compter du 1er septembre 2023. Les agents de ces organismes ou professions seront désormais affiliés au régime de droit commun».
Salariés du public et du privé
Le texte précise par ailleurs que «le report de l’âge légal à 64 ans d'ici à 2030, l’allongement de la durée de cotisation à 43 ans dès 2027 et l’âge de la retraite sans décote à 67 ans concernent aussi les agents publics, fonctionnaires et contractuels».
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Une énorme différence entre salariés demeurera toutefois: ceux du secteur privé verront leur retraite calculée sur l’ensemble de leur carrière alors que celle des employés du secteur public demeurera calculée sur la base de leur salaire des six derniers mois. Les catégories hors cadre (telles que les infirmiers, aides-soignants, policiers, pompiers, surveillants pénitentiaires) voient l’âge d’ouverture de leurs droits à retraite reculé de 57 à 59 ans, ou de 52 à 54 ans.
Pansement social
Pansement social sur cette amputation: 1,7 million de retraités modestes percevront, à partir du 1er septembre, 100 euros de plus par mois.
Reste pour Emmanuel Macron à renfermer cette douloureuse parenthèse. Ce sera la mission d’une grande conférence sociale, décidée mercredi 30 août lors de la rencontre entre le président et les principaux partis. L’État devra alors, sans doute, ouvrir à nouveau son portefeuille.