Une décrue, mais pas encore l'épilogue: la levée des barrages d'agriculteurs se poursuit vendredi à l'appel de la FNSEA et des JA, majoritaires, après une série de concessions gouvernementales, notamment sur les pesticides. «Quelques rares points localisés» veulent «se maintenir jusqu'à samedi» et «des groupes isolés» «tenir jusqu'au Salon de l'agriculture (24 février-3 mars)», a résumé à l'AFP une source policière.
Dans un communiqué, Vinci Autoroutes mentionne neuf réouvertures de portions d'autoroute sur son réseau, une dizaine d'autres sont encore coupées. «Le moment de la crise le plus visible (...) est plutôt derrière nous», a assuré vendredi matin sur Europe 1-CNews le ministre de l'Agriculture Marc Fesneau, qui se rend auprès de viticulteurs de l'Hérault et du Gard dans la journée.
Le monde paysan va rester mobilisé»
Jeudi, l'alliance syndicale majoritaire FNSEA-Jeunes agriculteurs (JA) a appelé «à suspendre les blocages et à rentrer dans une nouvelle forme de mobilisation».
La FNSEA veut voir la concrétisation des premières mesures d'ici le Salon de l'agriculture et une loi d'ici le mois de juin, a indiqué son président, Arnaud Rousseau, sur RMC-BFMTV vendredi. «Si, finalement on n'était pas considérés, ou si tout ça n'était qu'un feu de paille, on remettra le couvert».
La Coordination rurale, 2e syndicat représentatif, a quant à elle «invité» ses adhérents à «suspendre» les actions. «Le monde paysan va rester mobilisé dans la perspective du Salon de l'agriculture et dans la plus grande vigilance vis-à-vis des avancées attendues au niveau national et européen», précise l'organisation dans un communiqué vendredi matin.
Vers une écologie de solution
Le troisième syndicat, la Confédération paysanne, reste de son côté mobilisé car «la question fondamentale du revenu» n'est «toujours pas prise à bras-le-corps par le gouvernement». Jeudi, Gabriel Attal, pour sa troisième salve d'annonces en une semaine, a égrené des mesures qui selon lui répondent «à une grande partie des attentes» des agriculteurs.
Inflexion majeure destinée à obtenir la levée du blocage, il a annoncé la mise «à l'arrêt» du plan Ecophyto visant à réduire l'usage des pesticides. «La France a choisi d'agir à contresens de la raison, à contresens de l'histoire, à contresens de l'urgence écologique», s'emporte l'ONG Agir pour l'environnement, dans un communiqué vendredi.
«Nous devons sortir de l'écologie punitive pour être dans une écologie des solutions», a plaidé vendredi la porte-parole du gouvernement Prisca Thevenot, assurant que l'exécutif «continue à avoir des ambitions pour l'écologie, mais cette écologie doit être dans le concret des réalités».
Levée des barrages à 14h
Autour de Lyon, «tous les points» seront levés vendredi à «14h00», a affirmé à l'AFP Michel Joux, patron de la FRSEA. Dans les Hauts-de-France, tous les barrages sont levés et aucune action à l'appel de la section régionale de la FNSEA n'est prévue dans les jours à venir, indique à l'AFP son président, Simon Ammeux. «L'ultimatum est posé au Salon (de l'agriculture)», prévient-il, soulignant que les agriculteurs seront «très très vigilants» au respect des annonces.
Les tracteurs qui bloquaient l'A1 à proximité de l'aéroport de Paris-Charles de Gaulle «sont sur la route du retour», selon lui. Le convoi de tracteurs parti lundi du sud-ouest avec pour objectif de perturber l'activité du marché de gros de Rungis, est en train de rebrousser chemin.
Ici et là, de nouvelles actions sont organisées. Un barrage filtrant a été mis en place vendredi matin à un péage à proximité de Saint-Quentin (Aisne), sur l'A26, indique Bruno Cardot, de la Confédération générale des planteurs de betteraves (CGB), association spécialisée de la FNSEA. L'action a été maintenue «parce que la base le demandait, une sorte de baroud d'honneur, de sas de décompression après dix jours très intenses», explique le planteur.
En Occitanie, un temps épicentre du mouvement de la colère mais en perte de vitesse depuis la venue du Premier ministre Gabriel Attal il y a une semaine, le nouveau train d'annonces a conduit à la levée – immédiate ou prochaine – de plusieurs barrages, notamment dans l'Aveyron et le Gers.
L'agriculture européenne en colère
«On lève surtout les barrages parce qu'il faut retourner travailler dans les exploitations, après deux semaines de mobilisation historique. Mais attention, si l'Etat nous prend pour des chèvres, on retournera vers des actions coup de poing», met en garde Lionel Candelon, leader de la Coordination rurale dans le Gers. Au-delà de la France, c'est toute l'agriculture européenne qui est touchée par un mouvement de colère.
A l'issue d'une journée qui a vu quelque 1200 tracteurs converger à Bruxelles, la Commission a promis jeudi des mesures pour défendre les «intérêts légitimes» des agriculteurs européens, «en garantissant des conditions de concurrence équitables» ou en réduisant le «fardeau administratif» de la décriée politique agricole commune (PAC).
(ATS)