Gabriel Attal a entonné ce refrain dans son discours de politique générale devant les députés, ce mardi 30 janvier. «On ne fera pas l’écologie contre le peuple.» Juste avant, le nouveau Premier ministre français de 34 ans, issu des rangs du parti socialiste, avait tiré à vue sur les Verts et leurs propositions. «La décroissance, c’est la pauvreté de masse.»
Finie, donc, l’ambition d’Emmanuel Macron de faire de la France «une grande nation écologique»? Officiellement, bien sûr que non. Mais dans les rangs des barrages paysans, tout autour de Paris, Lyon et Marseille, les agriculteurs en colère ont bu du petit-lait. Le nouveau chef du gouvernement vient de leur donner raison: une partie des écolos tricolores sont bien «dingos».
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«Halte aux écolos dingos», «En finir avec les Khmers Verts», «Stop à l’écologie de la brutalité.» Partout sur les tracteurs des paysans en colère, ces slogans fleurissent. Mais celui qui marche le plus, car il n’est pas violent, c’est la dénonciation des «écolos dingos». «Il cible un trait de caractère. Il fait passer les Verts pour de doux rêveurs qui ne connaissent pas la réalité de la terre et du commerce mondial», juge l’économiste français Philippe Chalmin, coordinateur du rapport annuel Cyclope sur les matières premières.
«Ecolos dingos», cela discrédite sans violence. Comme un rappel à l’ordre et aux réalités. L’ancien eurodéputé vert Daniel Cohn-Bendit a depuis longtemps flairé le piège. Il ne croit plus aux promesses d’Emmanuel Macron, qu’il avait initialement soutenu en raison de son engagement proeuropéen. «Dany» défend maintenant la liste de Raphaël Glucksman, soutenue par le Parti socialiste: «Le terme dingo fait beaucoup plus mal que les attaques concrètes sur les chiffres ou la défense de la voiture. En nous présentant ainsi, les paysans s’arrogent le monopole du sérieux. Alors qu’ils ont souvent fait beaucoup d’erreurs, multipliant des investissements en matériel discutables.»
Parlement européen
Le belge Philippe Lamberts est le coprésident du groupe des Verts au parlement européen. Il était, mardi 30 janvier, convié par France info à défendre le «Green Deal», ce «pacte vert» voté définitivement par les 27 en mars 2023. Il a, sans surprise, rappelé que tous les gouvernements des pays membres se sont rallié à ce compromis écologique destiné, selon son énoncé, à obtenir «la fin des émissions nettes de gaz à effet de serre d’ici à 2050, et une croissance économique dissociée de l’utilisation des ressources, pour que personne ne soit laissé de côté». Sauf que ça ne marche pas: «Nous traiter d’écolos dingos, c’est ruiner l’idée que nous sommes en fait les plus réalistes de tous car nous jugeons l’état actuel du climat. Les 'dingos', ce sont nos détracteurs, ceux qui ne veulent pas voir que la terre est à bout.»
Double jeu des gouvernements
L’universitaire français Sylvain Kahn vient de publier une tribune dans le même sens dans la presse. Il dénonce le double jeu des gouvernements qui d’un côté défendent à Bruxelles les objectifs de réduction des émissions de gaz à effets de serre, et la transformation de l’agriculture, et de l’autre tiennent des discours opposés devant leurs paysans. «Ecolos dingos, c’est plutôt gouvernement de dingos qu’il faudrait parler ironise un ancien député. Aucune mesure européenne ne peut être acceptée dans le soutien de tous les États membres. C’est là que tout déraille. Le grand écart, c’est la méthode du premier ministre hongrois Orban pour discréditer l’Europe.» Ecolos-dingos, bien plus qu’un slogan. Car en ridiculisant les Verts et les écologistes, c’est la transformation énergétique et des modes de production que beaucoup cherchent, en réalité, à faire tomber en panne.