Ce que vous allez lire n’est pas politiquement correct. Mais voilà: le rugby n’est pas du football. Le ballon ovale est moins métissé que le ballon rond. Pas étonnant que le capitaine de l’équipe tricolore, de retour à l’entraînement après une blessure ce mercredi 11 octobre, porte l’un des noms de famille les plus répandus dans l’hexagone.
Antoine Dupont, a une carte d’identité bien éloignée de Kylian Mbappé, son homologue chez les «Bleus» du football. Son patronyme le distingue aussi des deux illustres capitaines que furent Michel Platini (fils d’immigrés italiens) et Zinédine Zidane (fils d’immigrés algériens). Pourquoi insister sur ce point? Parce qu’il dit aussi de ce qui porte cette équipe nationale de rugby, d’ordinaire bien moins connue que son homologue aux deux étoiles. Le XV de France ressemble davantage à «la France de papa», un peu comme l’anticipait la cérémonie d’ouverture très nostalgique conçue par l’acteur Jean Dujardin.
A lire sur le rugby
Faut-il opposer les deux sports? Certainement pas. Les audiences télévisées de la coupe du monde de rugby sont excellentes depuis son ouverture au Stade de France le 8 septembre par la mémorable victoire des Bleus face aux All Blacks néo-zélandais (27 à 13). Ces chiffres démontrent que ce sport encore cantonné dans les métropoles et son bastion du sud-ouest a su rafler la mise en cote de popularité.
Et c’est là qu’intervient l’envolée médiatique d’Antoine Dupont. Blessé à la mâchoire lors du match contre la Namibie, le demi de mêlée du Stade toulousain devrait en théorie pouvoir redescendre dans l’arène dimanche 15 octobre pour affronter l’Afrique du Sud en quart de finale. Il s’agit du premier match éliminatoire pour la France. Et pas contre n’importe qui! Les Springboks sont les champions du monde en titre. Ils ont battu l’Angleterre en finale en 2019, à Yokohama, près de Tokyo au Japon. Ils ont les trois étoiles sur leur maillot – plus que les coéquipiers de Zidane et de Mbappé, vainqueurs deux fois seulement du Mondial de foot.
Antoine Dupont, alias «Toto»
Côté personnalité, que dire d’Antoine Dupont, alias «Toto» dans les vestiaires? Comme Zidane et Platini, le joueur a obtenu le Ballon d’or. Enfin presque. Cette récompense n’existe pas coté rugby: Antoine Dupont a juste été sacré «meilleur joueur du monde» en 2021, avant qu’un Irlandais, Josh van der Flier, ne lui passe devant l'année suivante. Mais encore? Son portrait le classe davantage du côté de Didier Deschamps, le sélectionneur des «Bleus» du ballon rond. Le demi de mêlée est un organisateur né. Les experts traitaient Didier Deschamps de «porteur d’eau», car il distribuait les ballons à ses coéquipiers. Le natif de Castelnau-Magnoac, dans les Hautes-Pyrénées, a ce même génie de la passe décisive et du regard qui fait la différence. Le clin d’œil est d’ailleurs aussi géographique: Didier Deschamps est originaire de Bayonne, dans les Pyrénées-Atlantiques.
Antoine Dupont est né dans le rugby. Il aime raconter que son premier adversaire sur le terrain était son frère. Un ADN qu’il partage avec Kylian Mbappé, dont le père Wilfried entraînait les jeunes de l’association sportive locale de Bondy. Le rugbyman le plus célèbre de France est aussi attaché à son terroir pyrénéen. Il le vante dès qu’il le peut. Et voilà qu’en plus, sa blessure à la mâchoire l’a transformé en victime expiatoire. Le joueur namibien qui l’a heurté s’est excusé après coup. La faute était superflue. De quoi nourrir encore plus le suspense avant le match de dimanche. Il doit son retour sur le terrain au Docteur toulousain Frédéric Lauwers, chirurgien spécialiste des opérations maxillo-faciales.
Alors, casque ou pas casque sur la tête pour cette reprise? Ou aller simple pour le banc de touche? Ses coéquipiers savent qu’Antoine Dupont a besoin de parler et d’être entendu sur la pelouse. Il faudra donc s'assurer que le casque de protection ne lui bouche pas les oreilles. Détail amusant. On se dit en effet qu’un tel casque, plutôt assourdissant, aurait peut-être évité à Zinédine Zidane d’entendre les insultes du défenseur italien Marco Materazzi lors de la finale de la Coupe du monde 2006. Laquelle n’aurait cependant jamais connu le coup de boule le plus fameux de l’histoire du football!