Bataille à gauche
Le PS français peut-il tuer (politiquement) Jean-Luc Mélenchon?

Le Parti socialiste français est-il encore un parti de gouvernement? C'est le pari du Premier ministre François Bayrou, qui espère toujours dissocier le PS de Jean-Luc Mélenchon. La motion de censure présenté ce jeudi 16 janvier contre le gouvernement sera un test.
Publié: 14:14 heures
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Dernière mise à jour: 16:50 heures
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Jean-Luc Mélenchon demeure, à 73 ans, l'homme fort de la gauche française, même si le PS cherche à s'émanciper.
Photo: AFP
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Richard WerlyJournaliste Blick

C’est une lutte à mort. Entre Jean-Luc Mélenchon et son ancien parti, la bataille est programmée pour devenir féroce, et le premier affrontement aura lieu ce jeudi 16 novembre à l’Assemblée nationale. Le Parti socialiste français a décidé de ne pas voter la motion de censure déposée par La France Insoumise (LFI), le parti dirigé par Mélenchon, contre le gouvernement dirigé depuis le 13 décembre par le centriste François Bayrou.

En clair: le PS doit décider, ou non, de voter pour en finir avec ce Premier ministre centriste, qui lui a fait plusieurs concessions sociales. Paradoxe: ce vote est un test pour la gauche française, mais il n’accouchera pas d’une crise politique, car le Rassemblement national (droite nationale populiste) a déjà annoncé qu’il ne vote pas la censure. Or les voix de ses députés sont indispensables pour que les oppositions réunies fassent chuter le gouvernement, comme cela a été le cas le 5 décembre, poussant l’ex-Premier ministre Michel Barnier à la démission.

Gauche divisée

Dans l’histoire de la gauche française, ce type d’affrontement est récurrent. Deux traditions se sont toujours opposées. La première est celle des réformistes, incarnées par le Parti socialiste. La seconde est révolutionnaire ou du moins radicale, incarnée par La France Insoumise (LFI). Le plus célèbre moment qui a marqué cette bataille, à gauche, a eu lieu en 1920 à Tours, lorsque les socialistes se sont divisés, ouvrant la voie au clivage Parti socialiste/Parti communiste. Mais depuis la fin de la guerre froide et l’écroulement de l’URSS, le parti communiste français a fait long feu. Il a perdu l’essentiel de son influence et de ses bastions politiques. C’est LFI, dirigé par le trotskiste Jean-Luc Mélenchon, ancien cadre du PS, qui a récupéré cet héritage contestataire, anticapitaliste, désireux toujours de miser sur la mobilisation populaire pour obtenir davantage.

La situation de ce début d’année 2025 est caricaturale. Mais décisive. Le Parti socialiste qui était au pouvoir entre 2012 et 2017 sous la présidence de François Hollande, ne participe pas au gouvernement de François Bayrou, même si quelques-unes de ces ex-figures y sont, tel l’ex-Premier ministre Manuel Valls. LFI, pour sa part, incarne une ligne intransigeante, avec pour l’heure le soutien des écologistes. LFI veut faire tomber le gouvernement pour précipiter une crise politique pouvant conduire à la démission d’Emmanuel Macron. L’objectif est clair. Jean-Luc Mélenchon se prépare déjà à une nouvelle candidature à l’élection présidentielle, après être arrivé troisième (de justesse) en 2022.

Le problème pour les socialistes est qu’ils ne représentent plus grand-chose. Leurs bastions électoraux ont quasi-disparus. Leurs 66 députés actuels ont pu être élus, lors des législatives des 30 juin et 7 juillet 2024, grâce à l’accord électoral conclu avec le reste de la gauche. Le PS Français est donc écartelé. Soit il reste dans l’opposition frontale à Emmanuel Macron et à François Bayrou, et sa réputation de parti de gouvernement capable de compromis va disparaître, ce qui lui vaudra la colère des électeurs de gauche modérés. Soit le PS accepte la main tendue de Bayrou, qui propose une conférence sociale pour renégocier la réforme des retraites de 2023, et il sera aussitôt diabolisé par LFI qui le présentera comme une fabrique de traîtres et préparera des candidats pour ravir ses sièges de députés aux prochaines législatives.

Ennemi numéro un

L’autre difficulté majeure, pour le PS français qui dirigea la France à plusieurs reprises sous les deux septennats de François Mitterrand (1981-1995) puis sous le gouvernement de Lionel Jospin (1997-2002), est qu’il manque de figure de proue dans un système français toujours très présidentiel.

Redevenu député de la Corrèze en 2024, l’ancien président François Hollande est très en retrait, marqué par son impopularité. Et personne d’autre ne dépasse alors que Jean-Luc Mélenchon, lui, est incontournable. «Méluche» est un tribun. Il est identifié à une gauche de combat, sans concession. Il a fait de l’électorat populaire musulman un socle solide. Il veut apparaître comme l’opposant le plus crédible à l’extrême-droite. Il propose de surtaxer les riches et exige l’abrogation de la réforme des retraites qui a repoussé l’âge de départ à 64 ans. Bref, Mélenchon est l’ennemi numéro un du PS, ce parti dont il a juré la perte.

Course pour sa survie

Et maintenant? Le vote raté de la censure apporte une indication cruciale, à deux ans de la prochaine présidentielle de 2027. Car si le PS s’engage à ne pas renverser le gouvernement, il s’engagera dans une course pour sa survie. Il lui faudra obtenir des résultats sociaux à brandir devant ses électeurs, ce qui semble très difficile dans l’actuelle période de crise budgétaire et d’endettement record de la France. Tuer Mélenchon, d’accord, mais comment et avec quelles armes?

Aujourd’hui, le PS français est à l’aube d’entamer une guerre politique sans merci, dépourvu d’armes et (peut-être) de combattants dans les urnes.

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