Il est temps de tirer le signal d’alarme. En France, personne n’ose le faire. A Paris, le sujet est même tabou. Dans cette capitale qui rêve de redevenir le centre du monde le temps des Jeux Olympiques d’été, évoquer les risques de sécurité publique qui pèsent sur les compétitions vous transforme presque en éditorialiste paria.
Alors, prenons le risque. Le Comité international Olympique (CIO) étant basé à Lausanne, un média Suisse peut oser s’inquiéter. Je reviens d’une nuit passée dans plusieurs villes de la périphérie parisienne, dont certaines comme Saint-Denis abriteront les installations olympiques. Et je suis atterré. Je viens de voir des rues barricadées de barrières métalliques jetées à terre, éclairées dans la nuit par des feux de poubelles, entravées par des voitures incendiées, et contrôlées par des essaims de jeunes habillés en noir, cagoulés et les bras chargés de cartons pillés dans un centre commercial.
Je viens de me retrouver, nez à nez, avec des scènes que j’avais vues en 2005, lors de l’embrasement généralisé de la banlieue. Je n’ai pas eu peur, ni pour mon scooter, ni pour moi. Personne ne m’a agressé. Ni les émeutiers, et encore moins la police que j’ai vu cette nuit demeurer à distance. Mais franchement, ce chaos est-il un visage approprié et prometteur pour la prochaine capitale olympique?
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Des pronostics pessimistes
J’affirme que Paris, à ce moment précis, a de quoi nourrir nos pronostics les plus pessimistes. Je sais que la capitale française, à l'intérieur de son boulevard périphérique, est restée calme depuis deux jours, après la mort du jeune Nahel tué mardi matin à Nanterre par un policier. J’ai traversé la ville d’ouest en est cette nuit, sans croiser le moindre émeutier. La place de la Concorde, à l’heure d’écrire ces lignes, se prépare toujours à accueillir le défilé militaire du 14 juillet. En revanche, la banlieue parisienne ressemble à un chaudron en cours d'explosion.
Or c’est là, surtout au nord de Paris, que doivent se concentrer dans un an les événements sportifs. Bonne chance! Grand messe du sport business, avec leur étalage de sponsors et leur déluge d’opérations commerciales parallèles, les JO d’été auront, en théorie, tout pour attiser les braises de la colère que je viens de voir à l’œuvre. Quoi de plus excitant, pour ces jeunes qui rêvent de «venger Nahel», de défier les flics et les autorités en pleine fièvre olympique?
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Des JO 2024 irréalistes
Avouons-le: les JO de l’été 2024 semblent tout simplement irréalistes. Les Parisiens sont assommés par les travaux et le délabrement de leur ville, qu’ils considèrent toujours comme la plus belle du monde. Les «banlieusards» n’en peuvent plus des embouteillages engendrés par les chantiers du «Grand Paris», ce colossal projet de réaménagement urbain destiné… à intégrer la banlieue dans la métropole. Et voilà que la guerre entre la police et la jeunesse explose à un an de cette fameuse cérémonie d’ouverture des JO sur la Seine!
Que ceux qui ne redoutent pas une catastrophe sortent du rang et m’accusent publiquement de «French Bashing». J’espère de tout cœur qu’ils auront raison et que mes doutes se dissiperont dans les douze prochains mois. D’ici là, permettez-moi juste, chers amis parisiens, de vous dire que nous sommes nombreux à penser la même chose.
Vos J.O de 2024 seront peut-être votre fierté. Aujourd’hui, ils ont de quoi nourrir nos pires cauchemars.