«Les débats sont terminés. L'audience reprendra mardi à 17h00» avec l'annonce du verdict, a dit le président de la cour Laurent Raviot. Composée de cinq magistrats professionnels, la cour s'est retirée dans un lieu tenu secret en région parisienne.
Elle doit répondre à 81 questions sur la culpabilité des accusés et les éventuelles circonstances aggravantes qui peuvent leur être reprochées.
«Je suis pas un terroriste»
«Je suis coupable d'avoir vendu une arme, sans y réfléchir. Et depuis, ça fait plus de six ans que j'arrête pas d'y réfléchir. J'espère que vous l'avez entendu», a déclaré l'un des trois accusés poursuivis pour association de malfaiteurs terroriste (AMT), Ramzi Arefa.
Chokri Chafroud, Tunisien de 43 ans, poursuivi pour le même crime, n'a pas souhaité s'exprimer. «Je suis pas un terroriste, j'ai rien à voir avec ce qui s'est passé», a une nouvelle fois clamé Mohamed Ghraieb, Franco-Tunisien de 47 ans, ajoutant avoir «confiance dans la justice».
Le Parquet national antiterroriste (Pnat) a requis quinze ans d'emprisonnement contre les trois hommes, tout en demandant l'abandon de la qualification «terroriste» contre Ramzi Arefa. Selon lui, il «ne pouvait connaître la radicalisation» du futur tueur de la promenade des Anglais compte tenu de leurs contacts réduits.
Le Niçois de 27 ans a reconnu avoir fourni un pistolet à l'assaillant qui s'en était servi pour menacer des gens qui avaient tenté de l'arrêter et tirer sur des policiers.
Vingt ans de prison encourus
Abattu par la police au terme de sa course meurtrière, le Tunisien Mohamed Lahouaiej Bouhlel, auteur de l'attentat au camion-bélier qui a fait 86 morts et plus de 450 blessés le soir du 14 juillet 2016 sur la Promenade des Anglais, a été le grand absent du procès même si son nom a été prononcé à chaque audience depuis le 5 septembre.
Selon le Pnat, Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud, 43 ans, ont certes «commis des faits moins incriminants», mais «ils savaient, à la différence de Ramzi Arefa, que Lahouaiej Bouhlel était en mesure de commettre un attentat».
Les trois hommes encourent vingt ans de prison. Aucune des huit personnes jugées ne l'est pour complicité avec le tueur.
«Il y aura des frustrations, c'est inévitable»
Les cinq autres accusés sont jugés pour des délits de droit commun relatifs à la législation sur les armes. Les quatre présents, trois hommes et une femme de nationalité albanaise, ont tous eu des mots de compassion pour les victimes et dit espérer de «la justice française (...) la condamnation qu'(ils) mérite(nt)».
«Un seul s'est excusé, les autres ont redit la même chose», a toutefois regretté Magatte Seck, qui était présente sur la Promenade des Anglais avec ses deux filles et a témoigné au procès fin septembre.
Le Pnat a réclamé à leur encontre des peines comprises entre deux et dix ans de prison. Ils encourent tous dix ans d'emprisonnement. «Il y aura des frustrations, c'est inévitable», a mis en garde le parquet à l'adresse des quelque 2500 parties civiles constituées.
L'avocate générale Alexa Dubourg a souligné que le procès ne compenserait pas la douleur «immense, insondable» des endeuillés et des rescapés qui, durant cinq semaines, ont raconté à la cour, de façon souvent déchirante, «l'horreur» du 14 juillet 2016.
Mise en garde contre «le risque d'une erreur judiciaire»
Pour autant, «juger toutes les responsabilités ne veut pas dire faire porter le poids de l'absent aux accusés. Ce qui sera juste, c'est que les peines soient adaptées à la responsabilité de chacun», a souhaité la magistrate du Pnat.
Certains avocats de parties civiles ne l'entendent pas de cette oreille et ont demandé que les accusés prennent «le maximum». D'autres sont plus nuancés. «Certains avocats de parties civiles sont convaincus de la culpabilité des accusés, d'autres moins, d'autres pas du tout», a ainsi fait valoir Claire Josserand-Schmidt.
«On doit être condamné pour ce qu'on a fait, pas pour autre chose: aucun homme ne peut être condamné pour absorber la douleur», a plaidé sa consœur Aurélie Cerceau.
Du côté de la défense, les avocats ont mis en garde contre «le risque d'une erreur judiciaire». Les avocats de Mohamed Ghraieb et de Chokri Chafroud ont plaidé leur acquittement, fustigeant des preuves d'une «pauvreté manifeste».
(ATS)