Entrée dans une ère de bouleversements politiques
L'élite russe imagine déjà l'avenir du pays sans Poutine

L'avenir proche de la Russie se fera-t-il sans Vladimir Poutine? Pour beaucoup, cette éventualité est remplie d'incertitudes. Plusieurs candidats seraient pourtant d'ores et déjà prêts à prendre la relève.
Publié: 06.11.2022 à 21:58 heures
Pour l'élite politique russe, l'annexion de quatres oblasts ukrainiens et le déclenchement de la guerre ont été de trop. Elle souhaiterait désormais lui trouver un remplaçant.
Photo: imago images/SNA
Chiara Schlenz

Voilà déjà 23 ans que Vladimir Poutine est à la tête de la Russie. S’il est difficile pour beaucoup d’imaginer le pays sans son actuel président aux manettes, d’autres préparent déjà «l’après-Poutine».

Ulrich Schmid, professeur de culture et société russes à l’Université de Saint-Gall, avait expliqué à Blick en septembre que certains cherchaient un «scénario de sortie en douceur» pour l’actuel chef du Kremlin. Avant d’ajouter qu’il se pourrait que «Poutine ne se présente plus du tout aux élections de 2024».

Situation inédite en 23 ans de pouvoir

L’hebdomadaire allemand «Focus» semble désormais confirmer cette hypothèse. De plus en plus d’hommes russes de pouvoir et fortunés auraient perdu confiance en leur président de longue date à cause de cette prise de conscience: Poutine aurait échoué dans ses fonctions. D’un point de vue politique, la Russie est entrée dans la période la plus turbulente depuis l’effondrement de l’Union soviétique.

«En 23 ans de règne, Poutine ne s’est jamais retrouvé dans une telle situation», estime le politologue russe Kirill Rogov, en faisant référence à la guerre qu’il a déclenchée en Ukraine. Le chef du Kremlin, qui avait toujours été un «leader fort», serait désormais sur la sellette aux yeux de l’élite politique russe. Et ce, depuis l’annexion des quatre oblasts ukrainiens de Lougansk, Donetsk, Zaporijia et Kherson.

Interrogée par «Focus», la conseillère politique Tatiana Stanovaya décrit ainsi la situation: «Jusqu’en septembre, les élites russes avaient opté pour le soutien à Poutine pour des raisons pragmatiques. Mais maintenant, les événements sont si avancés qu’il ne leur reste probablement plus qu’à choisir entre différents scénarios de perte.» Si la Russie perd la guerre, cela pourrait même entraîner un effondrement du régime.

Le Premier ministre russe Mikhaïl Michoustine est considéré comme politicien modéré, et un bon candidat pour remplacer Vladimir Poutine.
Photo: IMAGO/SNA

Navalny douche les espoirs de changement

Selon l’expert politique Abbas Galjamov, qui a lui-même passé quelque temps en Russie, les premières tentatives pour déloger Vladimir Poutine de son trône devraient arriver dès les prochains mois. La recherche de successeurs potentiels au sein du système s’intensifie, peut-on encore lire sur le site internet du média allemand.

Sur la liste des candidats pressentis par Abbas Galjamov, on trouve par exemple le fils du secrétaire à la sécurité Nikolai Patrushev, Dmitri Patrushev. Ou encore le chef adjoint du Kremlin Sergei Kirijenko, le maire de Moscou Sergei Sobjanin ou le Premier ministre Mikhaïl Michoustine.

L’élite russe espère notamment, si ce dernier accède au pouvoir, qu’il pourra agir comme un négociateur modéré à l’Ouest, souligne encore Abbas Galiamnov. Des espoirs douchés par l’activiste et opposant au régime russe Alexeï Navalny dans un article du «Washington Post». L’espoir que «la succession de Poutine par un autre membre de son élite changera fondamentalement cette attitude vis-à-vis de la guerre, et notamment de la guerre pour l’héritage de l’Union soviétique, est au mieux naïf», a-t-il rétorqué dans le média étasunien.

Pour Alexeï Navalny, la décentralisation du pouvoir et la transformation de la Russie en une république parlementaire sont les seules solutions pour sortir du «cercle éternel d’un nationalisme impérial». Il précise encore: «Ce système leur donne la possibilité de continuer à exercer une influence et à se battre pour le pouvoir tout en s’assurant que leur position ne soit pas menacée par un groupement plus agressif.»

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