De l'armistice à la guerre nucléaire
Trois scénarios possibles pour la suite de la guerre en Ukraine

Est-ce le premier pas vers une trêve ou les événements vont-elles encore empirer? Une déclaration récente du président ukrainien Volodymyr Zelensky fait dresser l'oreille. L'expert militaire Wolfgang Richter nous explique pourquoi il garde espoir.
Publié: 21.11.2024 à 16:04 heures
Attaque à l'obusier dans la région de Donetsk : les Ukrainiens sont en difficulté dans le Donbass.
Photo: keystone-sda.ch
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Guido Felder

Alors que les événements semblent prendre une tournure sombre en Ukraine, le président Volodymyr Zelensky a fait une déclaration surprenante. Pour la première fois, il a laissé imaginer un contrôle russe temporaire sur des territoires ukrainiens. Devant le Parlement, il a lancé: «Peut-être l'Ukraine devra-t-elle survivre à Moscou pour atteindre ses objectifs et rétablir l'ensemble du territoire national.»

Dans les faits, la guerre pourrait être gelée jusqu'à ce que le président russe Vladimir Poutine ne soit plus au pouvoir. Pour l'ancien colonel de la Bundeswehr Wolfgang Richter, du Centre de politique de sécurité de Genève, ce scénario est possible. Il pourrait effectivement être mis en œuvre avec l'aide du président américain Donald Trump, et ce, dès février 2025.

Voici trois scénarios possibles sur la manière dont le conflit pourrait se développer – entre espoir et Troisième Guerre mondiale.

Gel avec cession temporaire de territoire

Situation initiale: Les combats sont suspendus. L'Ukraine accepte que la Russie garde temporairement le contrôle des territoires conquis à l'est et au sud ainsi que de la Crimée, mais continue de les considérer comme son territoire.

Conséquences: Les tueries brutales cessent, l'économie peut être stabilisée. Un espace s'ouvre pour réactiver les canaux diplomatiques. L'espoir réside dans l'arrivée au pouvoir d'un gouvernement plus pacifique à Moscou pendant le répit accordé.

Danger: La Russie peut utiliser ce temps pour s'armer davantage et frapper plus tard avec encore plus de force. L'Ukraine n'a toujours pas accès à ses infrastructures économiques et énergétiques importantes, comme les industries de charbon et de métallurgie dans les territoires occupés.

Sans oublier qu'un conflit gelé peut facilement se rallumer à tout moment. Malgré les deux accords de Minsk sur un cessez-le-feu, près de 15'000 personnes sont mortes dans le Donbass entre l'annexion de la Crimée par la Russie en 2014 et l'invasion de l'Ukraine le 24 février 2022.

Une guerre sans l'aide des Etats-Unis

Situation initiale: Le président américain élu Donald Trump réduit – comme il l'avait laissé entendre – l'aide à l'Ukraine, voire la supprime complètement.

Conséquences: Avec le soutien exclusif de l'Europe, l'Ukraine se dirigerait probablement vers une défaite. Cela pourrait conduire aux scénarios suivants: dans le meilleur des cas, les Russes divisent le pays et imposent au reste de l'Ukraine un gouvernement favorable à la Russie. Il est également possible que Moscou annexe l'ensemble du pays et, fort de son succès, lance des attaques contre d'autres anciennes républiques soviétiques comme les pays baltes.

Danger: Au plus tard lorsque la Russie attaquera des pays de l'OTAN, il y aura une confrontation directe entre les blocs de l'Est et de l'Ouest. Il y aurait un risque d'escalade massive.

Risque d'une Troisième Guerre mondiale

Situation initiale: Contrairement à ses déclarations, Donald Trump continue de soutenir l'Ukraine. Les deux fronts sont de force à peu près égale – à moins que les Etats-Unis n'interviennent eux-mêmes dans la guerre.

Les conséquences: La réaction du Kremlin à l'autorisation d'utiliser des missiles américains contre des cibles sur le sol russe est un signe inquiétant pour l'avenir. Moscou considère de telles attaques comme une agression de l'OTAN et menace d'utiliser des armes nucléaires et de déclencher une Troisième Guerre mondiale.

Danger: La spirale de violence actuelle se poursuivrait. On assisterait à une longue guerre d'usure avec un potentiel d'escalade majeur.

Un expert croit à un cessez-le-feu

L'expert militaire Wolfgang Richter croit à un gel des fronts. «L'Ukraine, qui souffre d'un manque de personnels et qui veut mobiliser environ 160'000 soldats supplémentaires, devra accepter une cession de territoire de facto, mais ne la reconnaîtra pas en droit international. En contrepartie, elle devrait toutefois recevoir des garanties de sécurité robustes.»

Par «garanties de sécurité robustes», Wolfgang Richter n'entend pas l'adhésion à l'OTAN, car la Russie ne l'accepterait pas. Mais l'Ukraine devrait pouvoir renforcer sa capacité de défense nationale et compter sur des garanties bilatérales. En outre, une force de paix acceptée par les deux parties et dotée d'un mandat du Conseil de sécurité de l'ONU devrait garantir le cessez-le-feu.

Si l'aide américaine venait à disparaître, certains Etats européens réduiraient également leur aide, selon Richter. «Nous sommes à la veille d'élections et les partis critiques à l'égard de l'aide à l'Ukraine sont de plus en plus forts».

Un Trump imprévisible

Actuellement, la Russie procède à des attaques massives sur l'Ukraine. En contrepartie, les Ukrainiens ont obtenu le feu vert pour attaquer des cibles en Russie avec des missiles américains. La situation s'envenime donc. Des premiers missiles de croisières britanniques auraient également été lancés contre Moscou ce mercredi.

Wolfgang Richter estime toutefois que cette escalade sera probablement temporaire. «Les deux parties veulent encore s'assurer le plus d'avantages militaires possible jusqu'à l'entrée en fonction de Trump.» Selon l'expert, le président américain pourrait tenter dès février 2025 d'amener les deux belligérants à un compromis.

Qu'en pense Vladimir Poutine? Les informations divergent. Selon l'agence de presse Reuters, il se montre prêt à négocier un cessez-le-feu. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, rejette toutefois cette idée.

Wolfgang Richter garde espoir d'obtenir une trève. Il n'exclut toutefois pas qu'en cas d'échec des négociations, Donald Trump puisse opérer un virage à 180 degrés et soutenir encore plus massivement l'Ukraine. «Dans ce cas, assure Wolgang Richter, nous nous trouverons dans une spirale d'escalade qui pourrait mettre toute l'Europe en danger.»

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