Après avoir semé de nombreuses graines, il est temps pour Benjamin Netanyahu de procéder à la récolte. Et celle-ci n'est pas bonne du tout pour le Premier ministre israélien. Certes, la santé du politicien radical s'est améliorée depuis son opération pour une hernie le week-end dernier. Mais tout le reste lui explose à la figure.
Cinq problématiques laissent en effet croire que les jours de Benjamin Netanyahu au pouvoir en Israël sont comptés.
Le drame de World Central Kitchen
Lundi, les forces israéliennes ont tué sept collaborateurs internationaux de l'organisation humanitaire World Central Kitchen à Gaza dans une attaque à la roquette. Parmi les victimes figuraient notamment des ressortissants australiens, américains, britanniques et polonais.
L'attaque contre le convoi de véhicules, clairement identifié comme convoi d'aide, a suscité de vives critiques sur la conduite des troupes israéliennes dans le territoire côtier palestinien. Le commentaire de Netanyahu selon lequel «cela peut arriver en temps de guerre» n'a en aucun cas amélioré les choses.
Mais pas de quoi freiner sa volonté de poursuivre la guerre, qui a entre-temps fait près de 33'000 morts (dont plus de 14'000 enfants, selon le Hamas). Et s'il alimentait ce conflit pour des raisons purement égoïstes et pour détourner l'attention de ses propres problèmes juridiques? Dans tous les cas, les protestations croissantes dans son propre pays deviennent un problème pour lui.
La menace iranienne
Onze personnes, dont trois généraux iraniens de haut rang, ont été tuées dans un attentat contre le consulat iranien à Damas, capitale de la Syrie. Comme d'habitude, Israël n'a pas revendiqué l'attaque. Des sources américaines confirment toutefois que le gouvernement de Benjamin Netanyahu est bel et bien derrière l'attaque. Les Etats-Unis ont officiellement contacté l'Iran et ont fait savoir qu'ils n'étaient «pas au courant des plans» du gouvernement israélien.
De son côté, l'Iran jure de se venger. «Que les sionistes sachent que ce crime ne restera pas impuni», a ainsi déclaré le président Ebrahim Raisi. Les rebelles du Hezbollah, soutenus par l'Iran, ont, eux aussi, annoncé des représailles. Un nouveau front de guerre pour Israël devient donc de plus en plus réaliste.
Le dilemme ultra-orthodoxe
Netanyahu ne peut pas gouverner sans le soutien des deux partis ultra-orthodoxes «Shas» et «Judaïsme unifié de la Torah». Les deux organisations dissidentes occupent 18 sièges des 120 sièges de la Knesset, le Parlement israëlien. S'ils se détournent de Netanyahu, celui-ci perdra sa majorité de 72 sièges et devra convoquer de nouvelles élections.
C'est précisément ce qui le menace aujourd'hui, car il n'a pas réussi à maintenir une exception qui s'appliquait jusque-là aux juifs ultra-orthodoxes. Ces derniers étaient jusque-là dispensés de service militaire obligatoire, mais ce régime spécial a pris fin lundi. Les juif-orthodoxes sont donc à nouveau tenus de faire l'armée – pendant au moins 32 mois pour les hommes et 24 mois pour les femmes.
63'000 jeunes hommes sont directement concernés par cette nouvelle réglementation. Et leur colère, comme celle des juifs ultra-orthodoxes dans leur ensemble, grandit de jour en jour. Et le risque de nouvelles élections aussi.
Le problème des otages
180 jours après le début de la guerre, une centaine d'otages israéliens sont toujours aux mains du Hamas. Depuis dimanche, les proches des personnes enlevées expriment leur frustration lors d'immenses rassemblements devant le Parlement à Jérusalem. Ils reprochent à Netanyahu de ne pas en faire assez pour faire aboutir les négociations avec les preneurs d'otages, ce par pur calcul politique.
Le porte-parole des détracteurs de Netanyahu est le politicien d'opposition et ex-Premier ministre Yaïr Lapid. «Netanyahu ne s'intéresse plus qu'à son poste et à son titre. Pour cela, il laisse le pays entier brûler», a-t-il déclaré lundi.
Si le premier ministre israélien ne parvient pas à trouver rapidement une issue dans les négociations, le mécontentement croissant des familles des otages pourrait lui porter un grave préjudice politique.
5) Les voisins récalcitrants
Le gouvernement de Netanyahu vient d'adopter une loi qui permet de bloquer des médias étrangers pendant 45 jours s'ils représentent un «risque pour la sécurité nationale». Cette loi a pour seul but de couper l'herbe sous le pied du géant médiatique Al-Jazeera, financé par le Qatar.
Le gouvernement en place considère la chaîne et ses plates-formes en ligne comme des «porte-voix du Hamas» et ne supporte manifestement plus les critiques qui lui sont adressées au sujet de la guerre. Cette possibilité d'interdiction n'a pas seulement fait grincer les voisins arabes des dents, elle a également suscité des critiques au sein même de la Maison-Blanche. Le style de plus en plus autoritaire de Netanyahu et de son équipe n'est pas apprécié à Washington.