Crises, guerres et économie
L'Europe entre en 2025 plus fragile que jamais

Tout n'a pas été mauvais l'année dernière même si beaucoup d'événements ont marqué par leur violence. Notre continent est en difficulté, l'Amérique est à la croisée des chemins et l'Ukraine au bord du gouffre.
Publié: 02.01.2025 à 20:00 heures
Les locomotives que sont la France et l'Allemagne sont toutes les deux en proie à une forte instabilité politique.
Photo: Getty Images
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Samuel Schumacher

Des taxis sans chauffeur sillonnent San Francisco, des chiens robots chassent les soldats russes sur le front ukrainien et sur la station lucernoise de «Radio Lozärn», une intelligence artificielle présente les hit-parades 24 heures sur 24. Il semble presque que le monde de 2024 ait filée entre les doigts de notre espèce.

Force est de constater que cette année encore, les événements qui ont frappé le globe devraient rentrer dans les livres d'histoire et façonneront 2025 avec force. 

Aucun homme n'a autant dominé la une des journaux que Donald Trump ces 365 derniers jours. Ni le verdict de culpabilité dans l'affaire Stormy Daniels le 30 mai, ni l'attentat perpétré contre lui en Pennsylvanie le 13 juillet n'ont pu arrêter le républicain sur le chemin du retour à la Maison-Blanche. Sa victoire aux élections présidentielles américaines du 5 novembre a été éclatante!

Mais le processus démocratique aux Etats-Unis ne s'est pas déroulé sans accroc. L'intervention de la méga-icône pop Taylor Swift, qui a appelé le 10 septembre ses 283 millions d'abonnés Instagram à voter pour la démocrate Kamala Harris, a fait parler d'elle. Elon Musk a également fait parler de lui: l'homme le plus riche du monde a fait don de plus de 250 millions de dollars à l'équipe de campagne de Trump.

Une action secrète perfide et des guerres oubliées

Ailleurs, la démocratie a subi une énorme pression, même sans l'intervention de multimilliardaires et de stars de la pop. La France a essayé cette année avec quatre Premiers ministres différents. En Allemagne, la coalition des feux tricolores a éclaté le 10 novembre. En Roumanie, la Cour suprême a annulé les élections présidentielles en raison des tentatives d'influence de la Russie. Et l'Ukraine a reporté sine die ses élections présidentielles prévues pour mars en raison de la guerre qui fait toujours rage.

En Israël, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a dû comparaître le 10 décembre dans le cadre de son procès pour corruption. La menace d'une peine de prison n'empêche toutefois pas l'homme fort du Proche-Orient de continuer à agiter vigoureusement sa hache de guerre. Jusqu'à présent, la sanglante offensive d'Israël contre le Hamas a fait au moins 46'000 victimes à Gaza.

Le 24 septembre, Israël a éliminé l'ensemble des dirigeants de la milice libanaise du Hezbollah lors d'une attaque retentissante contre le Hezbollah. L'explosion de milliers de pagers a semé le chaos au Liban, provoquant une onde de choc internationale.

Tous les drames du monde ne se sont pas déroulés sous les feux de la rampe, loin s'en faut. Au Soudan, 24 millions de personnes sont menacées de famine, dans la guerre civile en République démocratique du Congo, des centaines de milliers de femmes et de filles ont été violées, au Venezuela, le dirigeant Nicolas Maduro a fait enfermer des dizaines de milliers de manifestants après son élection volée le 28 juillet. En Birmanie, la junte militaire continue de s'en prendre quotidiennement à la population. Cruel bruit de fond, inaperçu, lointain, et pourtant toujours là.

Printemps syrien et baisse du taux d'homicides

L'année qui s'achève a cependant donné des raisons d'espérer. Le 9 décembre, des rebelles syriens dirigés par le groupe Haiat Tahrir al-Cham ont renversé le régime de Bachar al-Assad, qui avait dirigé la Syrie de manière tyrannique pendant 24 ans. De nouvelles élections sont prévues en mars. Le 19 mai, le président radical iranien Ebrahim Raïssi est décédé dans un accident d'hélicoptère. Il a été remplacé par Massoud Peseshkian, plus modéré.

L'Argentine, sous la houlette de son président Javier Milei qui manie la tronçonneuse, a réussi à maîtriser l'inflation après des années catastrophiques. Et le Salvador est depuis peu l'un des pays les plus sûrs d'Amérique latine grâce à l'intervention musclée de son président Nayib Bukele contre les gangs de rue meurtriers.

A bien des égards, 2024 a été avant tout une année de «mise en place», une grande préparation: les ingrédients sont prêts, les couteaux sont aiguisés, l'équipe de cuisine est en place. Place aux chefs! 2025 montrera à quel point la situation mondiale est réellement salée.

L'amitié entre Donald Trump et Elon Musk pourrait avoir une grande influence sur le cours des événements de l'année à venir.
Photo: AFP

En Amérique, Donald Trump met en place les personnages de son cabinet. Ses idées de droits de douane punitifs frappants les produits fabriqués à l'étranger et de retrait des troupes américaines d'une grande partie du monde pourraient fortement perturber le commerce international et les structures de sécurité globales.

L'ambiance d'euphorie qui régnait en Syrie après la chute d'Assad peut basculer à tout moment. Des voisins puissants comme la Turquie et Israël ont des idées très différentes sur la manière dont le pays doit se développer. Il semble peu probable que la paix actuelle puisse durer.

Enfin, au Proche-Orient, deux questions se posent: le cessez-le-feu entre Israël et le Hamas aura-t-il lieu? Netanyahu finira-t-il vraiment en prison pour ses délits de corruption présumés? 2025 devrait apporter des réponses.

Une «bromance» puissante et un espoir artificiel

La situation reste incertaine en France et en Allemagne, les deux puissances européennes. A Paris, le président Emmanuel Macron est très affaibli. Et à Berlin, un nouveau chancelier prendra les rênes cet hiver encore. A moins qu'Olaf Scholz ne fasse sensation et ne soit réélu malgré les mauvais résultats de son SPD dans les sondages.

2025 sera une véritable année charnière pour l'Ukraine affaiblie. Trump veut un accord de paix rapide et menace d'interrompre l'aide militaire indispensable à la survie de l'Ukraine. Le projet de Volodymyr Zelensky de placer au moins les territoires ukrainiens non occupés par la Russie sous le bouclier de l'OTAN reste un vœu pieux. On peut douter que Vladimir Poutine accepte un quelconque accord tant qu'il continuera à remporter des victoires sur le champ de bataille, avec le soutien récent des troupes d'assaut nord-coréennes. L'attitude de Trump face à la guerre en Europe aura des répercussions massives.

Enfin, la puissante «bromance» entre les milliardaires Musk et Trump devrait fournir outre-Atlantique la matière d'un véritable thriller politique. Mais l'amitié entre les hommes s'effrite déjà. Même la grande Amérique ne peut pas supporter plus d'un coq dans sa basse-cour. Une fois que les deux égomaniaques se seront mis d'accord, des étincelles devraient jaillir et possiblement embraser le monde.

Et qui sait, peut-être que l'intelligence artificielle se montrera sous son meilleur jour au cours de la nouvelle année. Outre les taxis qui se conduisent tout seuls, les chiens qui se battent et les présentations radio en Suisse centrale, il y aurait encore d'autres problèmes à résoudre. Vaincre le cancer, par exemple. Les premières percées ont déjà eu lieu.

En 2025 aussi, beaucoup de choses restent en mouvement. «Nous ne sommes pas sur la plage, nous sommes la vague elle-même», a écrit un jour l'historien bâlois Jacob Burckhardt. Une proposition qui tient la route même en 2025, année fatidique.

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