L’époque où l’Allemagne était le moteur économique et l’horloge politique de l’Europe est révolue. Notre voisin du nord est tombé bien bas ces derniers mois. Les problèmes sont nombreux. Voici les plus importants.
Un gouvernement divisé
C’est pratiquement sans succès que le ministre des Finances du FDP, Christian Lindner, se bat contre le gaspillage d’argent de ses collègues du SPD et des Vert-e-s au gouvernement. La sécurité de base pour les enfants, le revenu de citoyenneté et les retraites font partie des grands points de discorde. Les dépenses de l’Etat coulent à flots, alors que l’économie est en chute libre avec un produit intérieur brut de moins 0,3% l’année dernière. Seuls 19% des Allemands sont encore satisfaits du gouvernement.
Le psychologue économique Florian Becker a critiqué dans une tribune publiée dans le magazine d’information «Focus» le fait que des millions de personnes s’installent confortablement dans l’allocation citoyenne et ne travaillent pas alors qu’elles le pourraient. Pour lui, cette aide crée de fausses incitations. Il conclut en affirmant: «Notre Etat social est comme une mère qui fait le lit de son fils adulte.»
Une propension à la violence en hausse
La colère contre «ceux de Berlin» et les décideurs locaux augmente massivement. Certains Allemands se défoulent de manière de plus en plus agressive. Ces dernières semaines, des hommes et des femmes politiques ont été attaqués et blessés à plusieurs reprises. Le 3 mai, Matthias Ecke, tête de liste du SPD en Saxe pour les élections européennes, a été frappé par des jeunes à l’hôpital alors qu’il accrochait des affiches électorales. Certains des auteurs auraient un passé d’extrême droite. Mardi, un homme souffrant de troubles psychiques a attaqué par-derrière la sénatrice SPD Franziska Giffey avec un sac au contenu dur.
Les menaces et les dommages matériels font désormais partie du quotidien. Les ministres de l’Intérieur des Länder réfléchissent à la possibilité de punir plus sévèrement les agressions contre les politiques. Les partis extrêmes comme l’AfD et l’alliance Sahra Wagenknecht enregistrent une forte affluence dans leurs rangs.
Des grèves paralysantes
Qui fait grève aujourd’hui? Chaque jour en Allemagne, il faut s’attendre à rester bloqué sur un quai ou à l’aéroport. Des grèves ont également lieu dans le secteur du bâtiment ainsi qu’à la Banque Postale. Pourquoi une telle accumulation? les conventions collectives de plusieurs branches professionnelles arrivent à échéance.
Une petite comparaison montre à quel point les Allemands sont exubérants lorsqu’ils font grève. Clemens Höpfner, chercheur à l’Université de Cologne sur le droit des conventions collectives et des conflits du travail, explique à tagesschau.de: «Nous pouvons prendre la Suisse ou l’Autriche comme comparaison, où nous avons un ordre juridique similaire en matière de conventions collectives. Et nous voyons alors qu’en Allemagne, nous avons 18 fois plus de jours de grève qu’en Autriche et en Suisse.»
Mauvaises priorités
Mais qu’est-ce qui se passe en Allemagne? Alexander Marguier, rédacteur en chef du magazine politique allemand Cicero, déclare à Blick: «L’ambiance dans la société est mauvaise, car on a l’impression que le gouvernement de l’Ampel ne peut pas faire face aux défis actuels et qu’il fixe en plus de mauvaises priorités.» Par «mauvaises priorités», Alexander Marguier entend par exemple la légalisation du cannabis, alors que l’économie est négligée et qu’une récession de longue durée se profile.
Pour remettre l’Allemagne en forme, il faut un tournant économique, comme le réclame également le FDP, estime l’expert politique. Plus facile à dire qu’à faire. «Les trois partis au gouvernement ont des idées tellement différentes qu’il faut perdre l’espoir d’un tournant, et encore plus l’espoir de quelque chose que le chancelier SPD de l’époque, Gerhard Schröder, avait imposé avec son Agenda 2010.»
Merkel doit-elle sauver l’Allemagne?
Selon Alexander Marguier, un tournant pourrait tout au plus être provoqué par un parti fort, plus favorable à l’économie et plus libéral comme la CDU. Faut-il donc un retour de la chancelière CDU de longue date, Angela Merkel? «Il faut beaucoup de choses», martèle Alexander Marguier, «mais c’est la dernière chose dont on a besoin». Selon lui, Angela Merkel porte une grande part de responsabilité dans le marasme actuel, car elle n’a pas assez modernisé l’Allemagne et a contribué à déclencher le flux migratoire.
Il ne faut toutefois pas perdre de vue que l’Allemagne évolue dans une situation politique mondiale complexe, avec les guerres en Ukraine et au Proche-Orient. Pour Alexander Marguier: «Tout cela conduit à un mélange dangereux qui a plongé l’Allemagne dans une crise sociale, économique et politique.» Avant de conclure: «Le modèle de gouvernement suisse me semble de plus en plus attractif du point de vue allemand.»