Chocs électriques, privation de sommeil, waterboarding...
Un ancien policier chinois dénonce les tortures infligées aux Ouïghours

Un ancien officier de police chinois raconte à la chaîne d'information américaine CNN comment il a arrêté des centaines d'Ouïghours dans la province du Xinjiang, pour beaucoup innocents. Puis comment ceux-ci, devenus prisonniers, étaient systématiquement maltraités.
Publié: 06.10.2021 à 06:23 heures
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Dernière mise à jour: 06.10.2021 à 12:00 heures
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Son pseudonyme est Jiang. L'homme veut rester anonyme pour protéger sa famille restée en Chine.
Photo: Screenshot CNN
Georg Nopper (texte), Alexandre Cudré (adaptation)

Des centaines de policiers armés passent de maison en maison dans les communautés ouïghoures de l'ouest de la Chine, faisant sortir les gens de chez eux, les menottant et menaçant de les abattre s'ils résistent.

Ceci pourrait être la scène d'un film. C'est malheureusement un témoignage crédible, celui qu'un Chinois en exil qui décrit la répression exercée par le gouvernement contre des citoyens innocents. L'homme, qui souhaite rester anonyme pour protéger les membres de sa famille restés en Chine, affirme avoir été envoyé dans la région du Xinjiang en tant que policier.

«Ce sont juste des gens normaux»

Dans une interview accordée à la chaîne d'information américaine CNN, l'homme, qui utilise le pseudonyme «Jiang», fait état de torture systématique à l'encontre de l'ethnie ouïghoure et au sein des camps de prisonniers de la région. La Chine réfute depuis des années d'interner des personnes sur la seule base de leur appartenance ethnique. Officiellement, Pékin dit «combattre le séparatisme et le terrorisme islamiste» au Xinjiang.

Jiang rapporte qu'il a été impliqué dans l'arrestation de centaines de personnes. «Nous les avons tous emmenés de force pendant la nuit», raconte-t-il. Les suspects ont été accusés d'infractions terroristes et inculpés. Selon lui, aucun d'entre eux n'a commis de crime avéré. «Ce sont juste des gens normaux.»

Des méthodes de tortures atroces

Les personnes arrêtées ont ensuite été conduites dans des centres de détention. Là, elles ont été torturées jusqu'à donner des aveux. Les méthodes sont violentes. Les prisonniers ont été enchaînés sur des chaises, suspendus au plafond, subi des chocs électriques aux parties génitales, des violences sexuelles ou du waterboarding.

Les prisonniers étaient souvent obligés de rester éveillés durant des jours. Ils ont également été privés de nourriture et d'eau, selon Jiang. «Chacun utilise des méthodes différentes. Certains ont même utilisé un pied de biche ou des chaînes en fer avec des cadenas», explique Jiang. «Les policiers se mettaient debout sur le visage des suspects et leur demandaient d'avouer.»

Des hommes, des femmes et des enfants

Pendant son séjour dans le Xinjiang, Jiang affirme que chaque nouveau détenu a été battu durant son interrogatoire. Cela comprend des hommes, des femmes et des enfants, dont le plus jeune était âgé de 14 ans.

CNN n'a toutefois pas été en mesure d'obtenir une confirmation indépendante de ses affirmations, bien que les récits sont conformes aux autres témoignages rapportés par des Ouïghours en exil. Plus de 50 anciens prisonniers du Xinjiang ont également témoigné auprès d'Amnesty International dans un rapport de 160 pages.

Environ deux millions de détenus

Pour souligner la véracité de son témoignage, Jiang a montré à CNN son ancien uniforme de police. Il a également présenté des photos et des documents officiels de son séjour en Chine. Selon Jiang, il était de notoriété publique parmi les policiers que 900'000 Ouïgours et autres minorités ethniques étaient détenus dans la région.

Le département d'État américain estime que pas moins de deux millions de Ouïghours et d'autres minorités ethniques sont détenus dans des camps de détention au Xinjiang depuis 2017.

Comme une zone de guerre

Jiang rapporte qu'il avait été «désillusionné» du Parti communiste chinois avant même son séjour au Xinjiang, en raison de la corruption croissante. La province du Xinjiang est considérée comme une zone de guerre, explique-t-il. «J'ai été surpris la première fois que j'y suis allé. Il y avait des contrôles de sécurité partout. Beaucoup de restaurants et d'endroits sont fermés.»

S'il avait défié les ordres, il aurait été arrêté lui-même, révèle Jiang. Le Chinois exilé est certain de ne jamais pouvoir retourner dans son pays d'origine. «Ils me battraient à mort.» Le fait qu'il témoigne au sujet des Ouïghours signifie qu'il pourrait être accusé de participation à une organisation terroriste. «Je pourrais être accusé sur n'importe quelle base et terminer comme ces gens en prison.»

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