Jeudi s'ouvrent des audiences qui seront suivies de près à la Haye: Israël devra se défendre contre des accusations de génocide. L'Afrique du Sud a porté plainte contre l'Etat hébreu et ses bombardements sur la bande de Gaza. Le procès est hautement explosif. Voici ce qu'il faut savoir.
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Qu'est-ce que la Cour internationale de justice?
La Cour internationale de justice est la plus haute instance judiciaire des Nations unies. Ce tribunal mondial ne doit pas être confondu avec la Cour pénale internationale, qui se trouve également à La Haye. Cette dernière s'occupe des accusations individuelles, tandis que la Cour de justice des Nations unies est chargée de trancher les conflits entre États. Israël et l'Afrique du Sud peuvent chacun envoyer un juge en plus du collège permanent de 15 juges. Israël a proposé l'ancien juge de la Cour suprême, Aharon Barak, un survivant de l'Holocauste.
Que reproche l'Afrique du Sud à Israël?
Dans la plainte de 84 pages, l'Afrique du Sud accuse Israël de commettre des actes de violences qui s'apparentent à un génocide. Israël tue consciemment des civils palestiniens, «leur inflige de graves dommages mentaux et physiques et crée des conditions de vie qui visent à leur destruction physique».
L'Afrique du Sud cite plusieurs faits: 21'000 Gazaouis ont été tués, la violence des bombardements israéliens, l'exil forcé, les attaques contre les hôpitaux et les maternités ainsi que le blocus du territoire qui a entraîné des pénuries de nourriture et d'eau potable. Le pays cite des experts de l'ONU, des témoins et des organisations humanitaires. Le bilan du nombre de victimes a déjà augmenté depuis la dépose de la plainte: le Hamas a annoncé plus de 23'000 morts.
Des déclarations de ministres israéliens, qui appellent à vider, brûler ou détruire Gaza, sont également citées comme preuve de l'intention de génocide. L'Afrique du Sud parle d'«incitation directe et publique au génocide». Sous l'influence de l'attaque du 7 octobre, au cours duquel des combattants du Hamas ont tué plus de 1200 personnes en Israël, le ministre de la Défense Yoav Gallant avait par exemple parlé d'«animaux humains» et déclaré: «Nous allons tout exterminer.»
Quel est le fondement de la plainte?
L'Afrique du Sud invoque la Convention des Nations unies sur le génocide. Les deux Etats ont signé cette convention et se sont ainsi engagés non seulement à ne pas commettre de génocide, mais aussi à le prévenir et à le punir. La convention définit le génocide comme un acte «commis dans l'intention de détruire, en tout ou en partie, un groupe national, ethnique, racial ou religieux, comme tel».
Quelle est la réaction d'Israël?
Israël rejette fermement les accusations et invoque le droit à l'autodéfense après les attaques du 7 octobre. «La machine à violer du Hamas porte l'entière responsabilité morale de toutes les victimes de cette guerre.» Tout sera mis en œuvre pour protéger les citoyens civils, avait-il été précisé.
Que se passe-t-il à l'audience?
Tout d'abord, l'Afrique du Sud présentera et expliquera le fond de sa plainte jeudi. Vendredi, Israël aura l'occasion de réagir. Lors de cette audience, il sera d'abord question d'une requête urgente de l'Afrique du Sud. Elle a demandé au tribunal d'ordonner la fin immédiate de la violence militaire et de protéger les droits des Palestiniens.
Les juges de l'ONU ne doivent pas encore déterminer si un génocide a effectivement été commis. La possibilité que la convention ait été violée suffirait. C'est un seuil bas pour une décision. Mais même pour cela, il faut qu'il y ait des indices clairs d'une intention d'Israël d'exterminer les Palestiniens.
Dans ce cas, les juges pourraient théoriquement ordonner à Israël de mettre immédiatement fin à la violence afin d'éviter davantage de dégâts. Le jugement sur la requête urgente devrait être rendu dans quelques semaines.
Toute décision de la Cour internationale de justice est contraignante. La Cour n'a toutefois aucun moyen de pouvoir forcer son application. Un éventuel verdict de culpabilité aurait surtout un effet symbolique. La pression internationale sur Israël augmenterait encore et pourrait nuire à la réputation du pays.
La décision de savoir si Israël a commis un génocide ne sera toutefois prise que bien plus tard. De telles procédures peuvent durer des années.
(Avec l'ATS)