«Tôt ou tard, il y aura un séisme d’une magnitude d’environ 7,5 dans cette région», écrivait Frank Hoogerbeets, membre d’un institut de recherche néerlandais le 3 février dernier. Son tweet est accompagné d’une carte, qui montre un épicentre à cheval entre la Syrie et la Turquie.
Trois jours plus tard, la terre tremble. A quelques centaines de kilomètres de ce qui avait été «prédit», à une magnitude de 7,8. La catastrophe est meurtrière: plus de 5000 personnes y ont perdu la vie dans le drame, selon les premiers bilans qui risquent encore d’augmenter.
Prédictions à prendre avec des pincettes
Le message sur Twitter devient viral. L’homme aurait-il vraiment pu prévoir ces terribles séismes? Rien n’est moins sûr, explique le Huffington Post. Le portail français explique que plusieurs indices «appellent à la plus grande prudence». En effet, rien n’affirme que l’institut de recherche dont ferait partie le chercheur, le «Solar System Geometry Survey» (SSGEOS), applique des méthodes scientifiques. Sur son site internet, celui-ci n’est rattaché à aucun organisme de recherche agréé et mentionne qu’il étudie «la géométrie entre les corps célestes liés à l’activité sismique.» Autrement dit, les liens entre la position des planètes et les séismes.
On sait que la position de la Lune influence les marées. Et il existe bien, selon les scientifiques, un faible lien entre les positions de ces «corps célestes» et les séismes, rapporte le Huffington Post. Mais de telles catastrophes restent extrêmement peu probables, explique le site de l’institut géologique des Etats-Unis (USGS). Ainsi, même si on augmente cette probabilité un tout petit peu – il s’agit de fractions de pourcentage –, ce chiffre reste très bas. Il ne serait donc pas possible de prendre des mesures préventives, car le risque d’erreur serait beaucoup trop important.
De multiples «prédictions»
Alors comment ce pseudoscientifique a-t-il bien pu parvenir à un résultat proche de la vérité? Un article de fact-checking de «Libération» détient peut-être la réponse. Le quotidien français lui avait consacré un papier en 2019. Le Néerlandais avait mis en garde face à un séisme cette année-là. Or, «Libération» notait que les alertes présentes sur ses comptes de réseaux sociaux étaient innombrables: «En faisant autant de prédictions floues, il est assuré de tomber juste de temps en temps», assénait-il.
La plupart des posts paraissent en effet à portée extrêmement large. Il s’agit principalement des «prédictions» du compte du SSGEOS retweetées par Frank Hoogerbeets.
A noter que, pour pallier toute critique, l’institut prenait soin de mentionner à la fin de certaines conclusions qu’il ne s’agit «que d’une estimation» et que le SSGEOS peut «avoir tort». Ce qui est toujours le cas dans ses récentes publications.
«Grande résistance de la communauté scientifique»
Frank Hoogerbeets a donc fait face à de nombreuses attaques. Et comme le Néerlandais semble à nouveau faire le buzz, ce n'est certainement pas terminé.
Comment répond-il à ses détracteurs? Il admet lui-même qu’il y a «une grande résistance de la communauté scientifique concernant l’influence des planètes et de la Lune». Pour justifier sa méthode, il avance plutôt dans un tweet qu’aucune recherche approfondie ne la «réfute». Et cite à l’appui un article la revue scientifique généraliste «Nature» datant de 1959.
En attendant d’avoir plus d’informations et face à l’engouement de la twittosphère, le réseau à l’oiseau bleu a jugé utile d’ajouter une petite note explicative sur un message de Frank Hoogerbeets. Celle-ci précise qu’il n’existe «pas de base scientifique à ces prédictions» et qu’il «y a toujours un risque de tremblement de terre dans les zones de failles actives».