Un expert propose 3 façons de se reconnecter à la nature
J'ai pris l'apéro avec un arbre et c'était très thérapeutique

Une fois par mois, à Lausanne, les férus de botanique se retrouvent pour boire un verre autour d'un arbre différent. Nous avons testé cette activité, qui rappelle tous les bienfaits avérés de la proximité avec la nature.
Publié: 10.04.2024 à 17:58 heures
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Dernière mise à jour: 16.04.2024 à 09:53 heures
Chaque dernier samedi du mois, la fondation Home et Nature organise des «Arbr'apéros», des événements mêlant cours de botanique et verrée conviviale. Fin mars 2024, le magnolia du parc olympique de Lausanne était à l'honneur.
Photo: DR
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Ellen De MeesterJournaliste Blick

Pour tout vous dire, j'étais un peu nerveuse avant de rencontrer cet arbre. Pas autant qu'au moment de tester l'application Timeleft, bien sûr, mais tout de même suffisamment pour danser d'un pied à l'autre dans le gazon. C'est qu'on nous l'avait bien vendue, la star de la journée: le «plus beau Magnolia de Lausanne», trônant dans le parc qui encadre le Musée olympique, chaque branche chargée de fleurs. En le voyant au loin, comme un faisceau de lumière rose, j'ai eu l'impression qu'il bombait le torse, fier d'exhiber sa robe printanière devant une quinzaine d'yeux ébahis. 

Sans doute était-il juste gonflé d'orgueil d'avoir été sélectionné par la Fondation Homme et Nature, qui honore un arbre différent lors de tous ses «Arbr'Apéros», des événements organisés le dernier samedi de chaque mois, combinant cours de botanique et verrée conviviale. N'importe quel arbuste rougirait de voir un groupe de personnes siroter du vin blanc ou une tisane dans l'ombre de son feuillage. J'imagine sans mal que le chêne élu pour l'apéro du mois d'avril en frémira tout autant!

Le langage des fleurs

Personne n'est venu seul, sauf moi, mais la légère tension qui caractérise les rassemblements d'inconnus flotte quand même dans l'air, disséminée comme du pollen dans le vent. Heureusement, nous avons tous un point commun: l'envie de faire connaissance avec l'arbre-star. «Ces rendez-vous provoquent de l'émerveillement et une sensibilisation à la nature, au travers d'un partage d'informations au sujet des arbres», commente Nathalie Guiffault, sylvothérapeute, guide de bains de forêt et animatrice des Arbr'Apéros. Je confirme: en cercle autour du magnolia, les participants gardent le nez levé vers ses pétales éblouissants, tandis que les premières abeilles de la saison zigzaguent autour du groupe avec curiosité. 

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Avant de passer à l'apéro, qui patiente sur une table de pique-nique dressée sous le tronc, Daniel Groux, arboriste grimpeur, délivre un flot d'informations au sujet des différentes parties de la fleur (le centre comporte d'ailleurs les «ovaires de l'arbre»), de leur fonction reproductrice, des bases de la photosynthèse et de l'organisation parfaite des graines dans le bulbe, selon la suite de Fibonacci. On apprend notamment que le magnolia, un arbre ancestral présent sur terre depuis des millions d'années, est resté très fidèle à lui-même dans son évolution: au fil des siècles, sa constitution n'a quasiment pas changé, signifiant que nos aïeuls admiraient les mêmes fleurs roses. Cette idée m'émeut beaucoup plus que je n'ose l'admettre. 

Des selfies avec le magnolia

Nathalie Guiffault constate que de plus en plus de personnes cherchent à développer ne plus grande connexion à leur environnement. Les «bains de forêt», des immersions parmi les arbres réalisées dans un but thérapeutique et bienfaisant, rencontrent d'ailleurs un succès grandissant: «Lorsque j’ai commencé mon activité, il restait toujours des places vacantes pour les bains de forêt, se souvient-elle. Mais maintenant, ils se remplissent bien! Les participantes et participantes sont principalement des personnes d'une grande sensibilité.» Pour elle, ce type d'activité implique une grande liberté, puisqu'elle permet à chacun de quitter son rôle, sa fonction ou sa posture habituelle pour se retrouver dans un moment d’introspection pur, en exploration de ses émotions et de ses sensations. 

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La fin du cours théorique marque l'heure de la séance photo et de l'apéritif. Le magnolia se prend pour Juliette Binoche à Cannes et, s'il le pouvait, afficherait certainement la même bouche en cœur. Pour faciliter les contacts, alors que les premières tisanes sont versées, plusieurs personnes proposent, à tour de rôle, de prendre en photo leurs voisins. Depuis mon séjour chez les druides, durant lequel un érable avait cherché à me parler en me propulsant une branche sur la tête, j'essaie de me montrer plus courtoise quand je m'approche des arbres. Heureusement, le magnolia ne semble pas réticent à ce que je le prenne en photo: il s'est limité à laisser choir délicatement quelques pétales, qui s'écrasent contre les épaules du groupe. 

Des bienfaits physiques et psychiques

Si les cèdres peuvent se sentir gênés par notre présence, il s'avère que l'impact des arbres sur les êtres humains est incroyablement positif, sur le plan psychique comme physique: «Des activités telles que les balades en forêt sont susceptibles d’apaiser l’activité du système nerveux sympathique, responsable de l’hyperactivation et du stress, résume Grégory Dessart, Dr. en philosophie, psychologue FSP et gérant de la consultation romande Walk2Talk. De même, elles peuvent renforcer l’activité du système nerveux parasympathique, qui permet la relaxation.»

Au niveau endocrinien, l'expert constate également une baisse des hormones du stress, dont le cortisol, l’adrénaline et la noradrénaline, avec une amélioration notable de l’humeur. «Même le système immunitaire se trouve boosté par des activités en plein air», ajoute-t-il. En effet, une étude réalisée en 2021 par l'Université du Derby démontrait que la proximité avec la nature pouvait diminuer l'anxiété des participants de 29%, tout en réduisant la fréquence cardiaque chez 57% des participants. 

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En quittant l'Arbr'Apéro, je constate en effet que mon humeur est plutôt bonne. Ma bague connectée m'indique que mon corps s'est trouvé dans une phase de «détente» tout au long du cours théorique. Et bien qu'il s'agissait d'un «apéro», je n'ai pas bu la moindre goutte d'alcool! L'effet vient donc uniquement de l'aura réparatrice du magnolia. «Les activités douces telles que les 'bains de forêt' encouragent la remobilisation du corps dans un contexte déstressant, ainsi qu’un relâchement au niveau des capacités attentionnelles, acquiesce Grégory Dessart. Il arrive par exemple qu’on laisse notre attention divaguer durant une balade en nature, un peu comme un rêve éveillé, en lâchant l’injonction à la productivité. Cela peut être une habitude très bénéfique à la fin d’une journée stressante.»

Au moment de quitter le parc, je me retourne vers le magnolia, qui semble encore plus gigantesque de loin. Dès que je passerai dans le coin, je lèverai les yeux pour tenter d'apercevoir sa couronne. Après tout, grâce à ce blind date botanique, on s'est un peu apprivoisés. 

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