Si vous vous êtes juré de faire plus de sport en 2024, vous avez sans doute chaussé les baskets en janvier pour courir, danser, faire du vélo ou tout simplement pour aller marcher ou nager (sans les baskets j'espère). Bref, vous avez «fait du cardio», parfois plus précisément appelé «LISS cardio», acronyme anglais de Low Intensity Steady State («cardio à rythme régulier et continu de faible intensité»). Derrière ce terme générique se cache toute activité physique de faible intensité maintenue pendant une période prolongée, d'au moins cinq ou dix minutes, généralement d'une demi-heure.
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En limitant les risques de maladies cardiovasculaires tout en brûlant de nombreuses calories, ce genre d'activité est depuis longtemps considéré comme la voie royale pour vivre plus longtemps et en meilleure santé. Mais depuis quelques années, un autre type d'entraînement est devenu tout aussi important en termes de santé publique, si ce n'est davantage: la musculation, même si ce terme quelque peu connoté bodybuilding est délaissé au profit de «renforcement musculaire», moins effrayant.
Car il n'y a ni besoin de gros biscotos, ni de soulever de la fonte, ni de souscrire à un abonnement dans un club de gym pour stimuler ses muscles: on peut très bien le faire chez soi, sans aucun matériel. Et il suffit de regarder Youtube, qui regorge de vidéos d'entraînement et de conseils en tout genre, ou encore les salles de fitness pour constater que la foule se masse du côté des haltères, tandis que tapis de course et vélos elliptiques sont boudés.
Les muscles ne servent pas qu'à bouger
De quoi s'agit-il exactement? Appelé strength training, parfois resistance training en anglais, le renforcement musculaire regroupe un large éventail de pratiques ayant pour point commun de stimuler les muscles. Soulever des poids, tendre un élastique, faire des squats ou des pompes, du HIIT, de l'aquagym ou du yoga… tant que les muscles travaillent contre une résistance, ils gagnent en force et en masse. Et ce que les recherches récentes ont démontré, c'est que les muscles ont des effets inattendus sur la santé.
«Il ne fait plus aucun doute aujourd'hui que le renforcement musculaire régulier, en complément des activités de type cardio et endurance, est bon pour la santé», éclaire Mathieu Saubade, médecin du sport au Centre hospitalier universitaire vaudois et au Centre universitaire de médecine générale et santé publique (Unisanté) à Lausanne. «Les recherches montrent depuis une vingtaine d'années que le muscle n'est pas qu'un simple élément de mouvement, mais un organe à part entière qui participe à réguler diverses fonctions de l'organisme, par exemple en contrôlant le sucre ou en influençant le métabolisme des os. De fait, gagner en masse musculaire est important, d'autant que l'on a tendance à perdre du muscle avec l'âge».
Les effets du renforcement musculaire sur la santé
Les effets de la musculature sont multiples. Le plus évident est qu'ils permettent de contrôler sa proportion de masse graisseuse. En perdant de la masse musculaire avec l'âge, le corps voit augmenter son indice de masse corporel (IMC), un ratio qui suggère davantage de risques de maladies telles que l'obésité ou le diabète. Gagner de la masse musculaire permet de contrer cet effet et de diminuer les risques.
Mais ce n'est pas tout. En stimulant les muscles, le renforcement fortifie les os et augmente leur densité, réduisant ainsi le risque d'ostéoporose, en particulier chez les femmes. Ils réduisent aussi les arthroses (douleurs articulaires), les lombalgies (douleurs du dos) et de manière générale, les douleurs musculo-squelettiques. Autant d'avantages pour les personnes âgées qui peuvent ainsi rester indépendantes plus longtemps.
Une masse musculaire plus importante augmente également le métabolisme: les muscles consommant plus d'énergie que le gras, le corps dépense plus de calories tout au long de la journée, et ce même durant le sommeil. Enfin, des recherches récentes suggèrent même que la musculation favorise la santé mentale, par exemple en aidant les personnes souffrant de stress post-traumatique, en favorisant le sommeil, ou en réduisant l'anxiété. Une autre étude signale enfin des effets modestes sur les capacités cognitives de personnes âgées.
Mais le plus spectaculaire concerne sans doute la mortalité. Dans une étude parue en 2022 dans «The British Journal of Sports Medicine», les scientifiques ont observé que la pratique de renforcement musculaire est associée à un moindre risque de décès. Mieux, la pratique régulière des deux types d'activités (cardio et musculation) abaisse encore plus ce risque.
Pas besoin d'une salle de gym pour le renforcement musculaire
Face à tant de bénéfices, pourquoi ne se bouge-t-on pas plus les fesses? Encore aujourd'hui, la marche ou la course à pied sont considérées comme les mètres-étalon de l'activité physique. Pourtant, «le renforcement musculaire est recommandé par les instances de santé publiques depuis longtemps. Mais il est mentionné après les activités de type endurance et de manière assez vague, si bien que le public et la médecine générale n'y ont prêté que peu d'attention», avance Mathieu Saubade.
Exemple, l'Organisation mondiale de la santé tout comme l'Office fédéral du sport, encouragent à pratiquer «150 à 300 minutes d’activité physique d’intensité modérée par semaine (ou 75 à 150 minutes d’activité d’intensité soutenue) pour les adultes, en moyenne sur la semaine». Assez précis donc, en tout cas suffisamment pour chausser les baskets. Le paragraphe suivant l'est beaucoup moins: «Il est en outre recommandé de pratiquer des activités physiques diversifiées qui renforcent les muscles et les os et, en fonction de l’âge, améliorent l’équilibre, l’adresse et la souplesse.» Pas de durée, d'exemple d'activité, bref, rien d'encourageant. Surtout quand on doit déjà se cogner 300 minutes de cardio dans la semaine…
Heureusement, titiller ses muscles n'a rien de très sorcier, rassure Mathieu Saubade. Le médecin du sport propose de s'échauffer avant une séance de running en faisant dix minutes de renforcement: squats, pompes, etc. «Si on n'a pas de poids libres, ou si on ne veut pas s'en servir, on peut utiliser des élastiques de fitness, plus faciles et plus sûrs à manier. Et faire des exercices sans matériel, avec le poids de son corps, est également valable. Il suffit d'un tapis et on peut faire ça à la maison». Pas d'excuse donc.
Dernier conseil, selon le docteur: «ne pas vouloir en faire trop, trop vite. L'idéal est de commencer avec une personne expérimentée, plutôt que de vouloir suivre des programmes donnés sur Youtube ou dans les applis de coaching d'exercice, pas forcément adaptées à son niveau. Celles-ci seront potentiellement utiles pour poursuivre l'activité sur le long terme.»