Pas tout le monde n’aime Noël. Peut-être que le tintement incessant des grelots et la foule arrosée de vin chaud vous donnent envie de vous blottir dans votre armoire avec un pot de Nutella. Peut-être que le mois de décembre éveille des émotions désagréables, des souvenirs douloureux, ou vous confronte à une réalité que vous préféreriez oublier.
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Bien que cette frénésie festive décuple les plaisirs nostalgiques, elle enflamme les plaies ouvertes: un deuil, une séparation ou une discorde familiale seront d’autant plus douloureux en décembre. Les sapins peuvent briller tout ce qu’ils veulent, rien n’empêche leurs épines de se planter dans les cœurs brisés. Alors, si le calendrier de l’Avent vous évoque un compte à rebours angoissant, deux spécialistes vous proposent quelques pistes pour naviguer 4 types de situations difficiles, en prenant soin de vous.
Vous redoutez les réunions familiales
L’idée de passer cinq heures à table alors que votre dernier repas familial s’est soldé par une dispute paraît cauchemardesque. Or, la période de l’Avent implique l’injonction à déployer des trésors de patience pour respecter les traditions: «Les fêtes de Noël sont socialement associées aux retrouvailles et au pardon, confirme Brigitte Favre, psychologue et psychothérapeute reconnue au niveau fédéral. Pour certaines personnes, il est important de faire un pas vers sa famille, de fournir des efforts pour se réconcilier, malgré les potentielles discordes. Mais cela n’est pas obligatoire, car l’enchaînement de repas peut représenter un véritable défi.»
Pour notre experte, il est primordial de s’écouter, d’être aligné sur nos propres besoins et d’identifier à l’avance ce qu’on est capable de supporter ou non: «Il peut être utile d’anticiper nos limites, afin de pouvoir prévenir au préalable qu’on devra écourter un repas», propose la psychologue.
Cette résolution risque toutefois de susciter la déception ou l’incompréhension des proches: «Il faut donc être très clair, par avance, sur ce dont on a envie ou besoin, pour affronter ces réactions, précise Catalina Woldarsky, psychologue spécialiste en psychothérapie FSP, experte dans la thérapie centrée sur les émotions. Ce n’est pas toujours facile, surtout quand on a l’habitude de s’adapter aux besoins des autres.»
En effet, le fait de s’écouter peut ébranler l’image de «bonne fille» ou de «bon fils» que certains individus tentent de maintenir, coûte que coûte: «Il convient de trouver un consensus entre ce rôle et nos besoins, poursuit Brigitte Favre. Par contre, dans certains cas, on a juste besoin de se tourner vers des actes rebelles, en quittant le rôle d’enfant parfait. Dans les situations d’irrespect ou si les conflits familiaux vont trop loin, il va de soi qu’il faut se détacher, se protéger et se préserver.»
Contact important: Si vous avez besoin d'aide ou de conseils urgents, lors d'une confrontation difficile avec un membre de votre famille, n'hésitez jamais à contacter la Main Tendue (143) ou la ligne de conseils par téléphone pour les enfants et les jeunes (147).
Vous traversez un deuil
L’absence n’est jamais aussi flagrante qu’à Noël, quand les configurations familières mettent en évidence une chaise vide, un coin de table obscur ou l’absence d’une voix. «Après un deuil, toutes les premières fois sont émotionnellement rudes, affirme Brigitte Favre. On parle souvent des différentes étapes du processus de deuil, mais cette linéarité n’existe pas vraiment: on constate davantage des émotions fluctuantes, qui changent même au cours d’une seule journée.»
Qu’il s’agisse d’un deuil ou même d’une séparation, Catalina Woldarsky souligne qu’il est impensable de s’obliger à être joyeux et enthousiaste durant les Fêtes: «Il est normal d’être triste durant ce genre d’épreuve. Si l’on ressent le besoin de passer un moment seul, pour vivre nos émotions, se reposer et récupérer, c’est totalement faisable. Par contre, si l’on commence à s’isoler plusieurs jours de suite, il convient de demander de l’aide ou d’appeler un proche, car un isolement prolongé peut empirer le chagrin et la solitude.»
Par ailleurs, Brigitte Favre conseille d’en parler autour de soi, d’expliquer qu’il s’agit d’un premier Noël depuis le décès de la personne et de prévoir, avec les autres membres de la famille, comment on souhaite aborder cet événement: «Peut-être qu’on souhaitera allumer une bougie, exposer une photo de la personne ou formuler de petits discours, liste l’experte. Rappelons que chacun vit le deuil différemment: certains voudront parler du défunt, d’autres n’en auront pas la force. En anticipant ces choses, on peut mieux se préparer et prévoir ce qui nous attend durant la soirée.»
Contact important: Si votre tristesse devient insupportable et envahit votre quotidien, n'hésitez jamais à contacter le service d'urgences psychiatriques de votre canton, comme celui du CHUV, ou encore Parler peut sauver. Divers groupes d'entraide comme l'association Vivre son deuil ou Amivie existent également en Suisse romande, pour vous aider à traverser cette épreuve.
Vous ressentez de l’angoisse et de la tristesse
Puisqu’une seule fête cristallise autant de pression, la culpabilisation et l’angoisse s’invitent à table comme un oncle hautain qui insiste pour vous expliquer la vie. «Le principal est d’être à l’écoute de nos propres ressentis, car ceux-ci sont directement liés à des besoins, rappelle Catalina Woldarsky. Ensuite, il faut parvenir à se fier à ces besoins et se sentir libre de choisir ce qui est bon pour nous, plutôt que de se conformer aux attentes des autres.»
En effet, face aux exigences des Fêtes, l’experte rappelle qu’on tend à s’adapter aux autres en acceptant un maximum d’invitations et en déboursant un mois de salaire en cadeaux: «On oublie que c’est l’intention et la présence qui comptent, au risque de finir totalement épuisé. L’idée est de retrouver une forme de lâcher-prise en admettant que ce n’est qu’une fête et en délaissant le côté grandiloquent de Noël pour diminuer le stress. Après tout, il ne s’agit que d’une ou deux soirées dans l’année! Les enjeux, au fond, ne sont pas si énormes.»
Pour les personnes qui craignent les débordements d’émotions en plein réveillon, la spécialiste conseille de prêter une attention particulière à notre sommeil et à notre alimentation: «La fatigue et les habitudes alimentaires inhabituelles contribuent à créer des “crises internes” et des coups de blues», rappelle-t-elle.
Contact important: Si votre anxiété est bouleversante et atteint votre qualité de vie, n'hésitez jamais à contacter la Main tendue ou le service d'urgences psychiatriques de votre canton, comme celui des HUG par exemple, qui sauront vous apporter du soutien.
Les repas de fête vous stressent
Lorsqu’on entretient une relation tumultueuse à l’alimentation, qu’on a souffert de troubles du comportement alimentaires ou d'alcoolodépendance dans le passé, la perspective d’une orgie calorique peut être infiniment stressante. Comment refuser une troisième assiette, sans vexer l’hôte? Comment décliner une coupe de champagne, sans être contraint d’expliquer qu’on a renoncé à l’alcool? Comment manger devant les autres sans se sentir jugé?
«Il faut déjà prendre conscience que les personnes qui vous entourent ne sont pas si attentives à ce que vous mangez ou buvez, rassure Brigitte Favre. On a parfois l’impression que tout le monde nous analyse ou nous juge, surtout dans des contextes angoissants, mais ce n’est pas le cas. Si on décide un peu à l’avance des limites saines qu’on souhaite respecter, afin de se préserver, on peut les tenir plus sereinement.»
L’idée est d’adopter un comportement bénéfique à notre santé physique et mentale, sans se sentir obligé de le justifier constamment: si l’idée de manger ou boire deux fois plus que d’habitude nous angoisse, notre experte recommande d’informer simplement la personne aux fourneaux qu’on se resservira plus tard ou qu’on souhaite commencer le repas avec de l’eau, afin de désamorcer la situation. Si vous vous sentez perdu, il est essentiel de demander de l'aide professionnelle, dans le but d'apaiser ces ressentis.
«Lorsqu'on entretient une relation compliquée à la nourriture, n'importe quel repas peut être difficile à vivre, tempère la psychologue. Mais n’oublions pas que ces repas de fête doivent être confortables pour chacun: on ne les vit pas seulement pour les autres, mais également pour nous-mêmes!»
Contact important: Si le contexte des Fêtes ravive des souffrances passées ou enclenche certains mécanismes dangereux, n’hésitez jamais à contacter les numéros d’urgence, dont celui du Centre vaudois d’anorexie et de boulimie ou celui de l’Association boulimie anorexie, qui sauront vous apporter de l'aide.