Il astique son évier, fait briller ses fenêtres, dégaine sa bouteille de bicarbonate comme une arme secrète… et charme plus de 559’000 abonnés sur TikTok. Bruno Ginesty, auteur de «Ménage & Vous» aux éditions Marabout, distille des tips de nettoyage costauds sur les réseaux sociaux. Même la Toile compte moins d’araignées, depuis que le créateur de contenu français y a débarqué…
Ses méthodes semblent imparables, racontées et expérimentées avec une bonne humeur contagieuse: une fois que la magie a opéré (spoiler: elle opère toujours), il s’exclame d’un ton enjoué: «Je ne sais pas vous, mais moi, je suis heureux!»
Bien sûr qu’on est heureux, nous aussi! Car l’image d’une plaque de cuisson resplendissante et immaculée a de quoi faire fondre notre cerveau. Le trend est colossal: avec 99,3 milliards d’occurrences, le hashtag #CleanTok a bâti un véritable empire. En effet, certaines personnes assignent aux vidéos de rangement une forme d’«ASMR visuel», soit un effet satisfaisant et apaisant.
La preuve: des milliers d’internautes admirent des débroussaillements de haie durant 55 minutes (cette vidéo de Kustorez compte 2,6 millions de vues!). À moins d’être passionné de sécateurs, on admire forcément ce type de prouesse botanique pour son côté relaxant, non?
Motivant et satisfaisant
De son côté, Bruno Ginesty évoque surtout l’aspect serviciel de ses vidéos: «Les commentaires soulignent davantage le côté ‘accessible, simple et motivant’, nous explique-t-il. Mais sinon, oui, pour beaucoup de personnes, c’est agréable et satisfaisant de voir un avant/après très clair.» On retrouve le même effet dans les adorables vidéos TikTok d’«Antoine et Mamie», dont les conseils de grand-mère et ont dépassé le million d’abonnés.
Passons de l’autre côté de la caméra: que ressentent les pros du ménage après avoir nettoyé de fond en comble leur appartement? «En premier lieu, je dirais la satisfaction immense procurée par le résultat, analyse Bruno Ginesty. Mais j’aime aussi passer quelques minutes au calme dans la cuisine en fin de journée pour nettoyer la vaisselle et l’évier. Durant ce court moment, j’ai les mains au contact de l’eau chaude et de la mousse, sans accès à mon téléphone… C’est très sensoriel et ça fait un bien fou de se concentrer sur quelque chose de réel, sans être dérangé!»
Voilà qui évoque bien l’effet méditatif des vidéos #CleanTok, même si c’est une autre personne qui savonne: ainsi que le confirme Anouchka Ravedoni, psychologue intuitive FSP, ce type de contenu peut s’avérer extrêmement apaisant pour les personnes qui apprécient l’ordre:
«Cela active le côté logique du cerveau en produisant un pic d’endorphines, à l’instar des célèbres vidéos satisfaisantes, où des petites machines intègrent des objets ronds dans des trous en forme de ronds, par exemple. Ces mécanismes simples, réguliers et parfaits donnent l’impression que tout est à sa place, que tout est fluide, et satisfont ce côté gauche du cerveau. Pour cette raison, ils peuvent devenir un peu addictifs.»
La propreté, un idéal social
Par ailleurs, n’oublions pas que la propreté est rattachée à tout un imaginaire commun, agrémenté de souvenirs et d’images culturelles: «Nous venons d’une société qui associe un intérieur rangé à une forme de réussite sociale, poursuit notre experte. On le voit notamment dans les films, dont le code visuel souligne clairement cela: les protagonistes riches, présentés comme étant admirables, évoluent dans des décors impeccables. Rappelons aussi qu’en Suisse, l’ordre est très valorisé.»
Encore une raison pouvant expliquer l’attrait des intérieurs impeccables, si bien que certaines personnes se sentent carrément plus heureuses quand tout est propre.
Hormis un certain idéal social, le nettoyage est malheureusement associé à des stéréotypes sexistes. Nous avons donc interrogé Bruno Ginesty, créateur de contenu spécialisé dans le ménage, quant à son expérience d’expert masculin de la propreté. Est-il confronté à des clichés?
«Quand j’étais jeune adulte et que je vivais en colocation, j’aimais que les personnes invitées se sentent bien accueillies et cela passait par un appartement bien tenu, explique le créateur de contenu. À cette période, une phrase m’a toujours un peu surpris en revanche: ‘On dirait un appartement de filles tellement c’est propre!’. Comme s’il y avait une règle selon laquelle un appartement de garçon était synonyme de chaos total, tandis que celui des filles était défini par le calme et la volupté.»
Aujourd’hui, cependant, l’influenceur français relate une majorité d’échanges positifs avec sa communauté: «La question ‘homme qui fait le ménage’ n’a jamais été un problème pour moi, poursuit-t-il. Et tant mieux! Car que l’on soit une femme ou un homme, quel que soit notre âge ou notre lieu de résidence, une bougie qui tombe sur une nappe reste une bougie qui tombe sur une nappe. Un savon de Marselle reste un savon de Marseille…» Tout est dit.
Hormis un certain idéal social, le nettoyage est malheureusement associé à des stéréotypes sexistes. Nous avons donc interrogé Bruno Ginesty, créateur de contenu spécialisé dans le ménage, quant à son expérience d’expert masculin de la propreté. Est-il confronté à des clichés?
«Quand j’étais jeune adulte et que je vivais en colocation, j’aimais que les personnes invitées se sentent bien accueillies et cela passait par un appartement bien tenu, explique le créateur de contenu. À cette période, une phrase m’a toujours un peu surpris en revanche: ‘On dirait un appartement de filles tellement c’est propre!’. Comme s’il y avait une règle selon laquelle un appartement de garçon était synonyme de chaos total, tandis que celui des filles était défini par le calme et la volupté.»
Aujourd’hui, cependant, l’influenceur français relate une majorité d’échanges positifs avec sa communauté: «La question ‘homme qui fait le ménage’ n’a jamais été un problème pour moi, poursuit-t-il. Et tant mieux! Car que l’on soit une femme ou un homme, quel que soit notre âge ou notre lieu de résidence, une bougie qui tombe sur une nappe reste une bougie qui tombe sur une nappe. Un savon de Marselle reste un savon de Marseille…» Tout est dit.
Le ménage comme outil de bien-être
Pour Bruno Ginesty, le ménage est associé à des souvenirs d’enfance heureux: «Je n’ai pas encore fait de thérapie pour savoir d’où vient cet amour que je porte au ménage, plaisante-t-il. Mais j’ai des souvenirs très anciens de moi, enfant, me précipitant pour ranger, passer l’aspirateur et nettoyer les sols dès que mes parents sortaient chez des amis ou en balade. J’adorais les entendre se réjouir lorsqu’ils rentraient et découvraient que la maison était propre.»
Et qu’est-ce qu’on les comprend! Ranger notre maison ne revient-il pas à ranger un peu notre tête? «Le nettoyage peut représenter un outil de bien-être, car il est important de vivre dans un environnement qui nous correspond, qu’on en ait conscience ou non, confirme Anouchka Ravedoni. J’ai l’impression que, depuis la pandémie, ce besoin s’est encore accru.»
Or, la psychologue rappelle que l’état de notre intérieur peut directement influencer notre état mental: «Lorsqu’elles ont rangé et trié tous leurs placards, certaines personnes ont l’impression agréable que leur vie est tout aussi bien rangée, étiquetée et classée. Cela devient ensuite une habitude, renforcée par des émotions agréables.»
Le chaos peut rendre tout aussi heureux!
Pas d’inquiétude, donc, si les vidéos de nettoyage ne vous font aucun effet! Notre experte explique que cela est fortement lié à la personnalité de chacun: «Certaines personnes sont très ordonnées pour les mêmes raisons que d’autres personnes préfèrent le désordre: parce que c’est ainsi qu’elles se sentent bien! Les personnes qui aiment l’ordre mettent un point d’honneur à ranger leur maison, car elles ont conscience que cela les apaise et que c’est facile pour elles. De même, les personnes plus bordéliques apprécient un intérieur plus chaotique, car cela les rassure, et les met plus à l'aise. On ne parle pas ici de cas extrêmes, bien sûr, mais simplement de manières de fonctionner qui apportent un maximum de bien-être.»
Cela explique le désintérêt total de certains pour #CleanTok («Regarder quelqu’un nettoyer son frigo? Quelle torture!»). Il s’avère toutefois que le même bien-être se vérifie chez les personnes qui détestent nettoyer: «Celles-ci peuvent posséder des personnalités plutôt créatives et s’épanouissent davantage dans un 'joyeux bordel', un intérieur qui vit, qui possède une âme et qui n’est pas trop conforme à ce qu’on voit dans les magazines», conclut Anouchka Ravedoni.