Une «pluie d'étoiles dans le ciel Suisse», a promis Tanguy Léon-Pflieger, le directeur de Michelin Suisse, en préambule de la cérémonie annuelle de remise des étoiles, ce lundi 21 octobre à l'École hôtelière de Lausanne. Résultat des courses: j'ai beau compter, recompter, j'arrive à…huit. Allez, onze, si on compte les étoiles vertes.
Tout sur les étoiles Michelin:
Huit étoiles, c'est un peu maigre, en tout cas, là d'où je viens, ça ne fait pas vraiment une pluie. Il faut dire qu'il pleut beaucoup, mais passons.
Le Guide rouge n'a décerné que deux nouvelles étoiles en Suisse romande: Arakel et F.P. Journe, deux adresses qui le méritent, toutes deux situées à Genève. La ville sauve la baraque après la perte, l'an dernier, de l'étoile de Philippe Chevrier et le désintérêt manifeste de Bibendum pour cette région (exception faite de L'Atelier Robuchon, qui avait brillé).
Du côté des autres cantons romands: rien, même pour Vaud, qui avait, il est vrai, cartonné l'an passé (les deux étoiles du Valrose et de La Table du Lausanne Palace, notamment).
Huit, c'est peu donc. L'an passé, il y en avait eu 24: 19 nouveaux une-étoile, et 5 deux-étoiles. Et l'année précédente avait été marquée par 36 macarons, plus le sacre d'un nouveau trois-étoiles. Autant dire que cette année, les restaurants suisses n'ont pas vraiment impressionné les redoutables inspecteurs.
Même chose pour les femmes: une seule a été appelée sur scène, la Lausannoise Sarah Benahmed, de la Table du Lausanne Palace. Non seulement c'est peu, mais c'était pour un Service Award, si bien qu'aucune femme-cheffe ne figure au palmarès Michelin cette année.
La Suisse ne peut pas cartonner chaque année
Il y avait pourtant des choses à dire, peut-être. On a ainsi aperçu Marie Robert, la cheffe du Café Suisse à Bex (VD), qui a répondu présent à l'invitation, tout ça pour rentrer bredouille. Comme d'autres chefs d'ailleurs, qui ont été invités. Habituellement, une invitation signifie une distinction. Mais pas cette année. Il faut croire que Michelin a eu peur de montrer trop de sièges vides. «J'ai reçu mon invitation hier», lâche, goguenard, un chef étoilé après la cérémonie…
Bien entendu, il serait illusoire d'espérer des moissons d'étoiles chaque année. Et que la totalité des étoilés romands gardent leur place, c'est déjà une récompense tant on sait qu'il est difficile de se maintenir à un tel niveau d'exigence. Mais tout de même, c'est à se demander si Michelin s'est intéressé à la Suisse cette année, à la Suisse romande en particulier.
Autre preuve de ce désamour croissant: Gwendal Poullenec, le directeur du Guide, était présent en 2022. En 2023, il se contente d'un message vidéo. En 2024, il n'était pas là, pas un mot, rien. Sans doute est-il davantage intéressé par Tokyo ou Pékin, où il venait de dévoiler les nouvelles sélections. Des marchés autrement plus juteux que la Suisse, peut-être.
Il n'empêche. Quand on entend les représentants de la marque vanter le terroir, les producteurs, la scène gastronomique suisse, pour finalement alléger le nombre d'étoilés (138 contre 136 en 2023), on s'attend à autre chose que huit malheureux macarons pour un pays aussi dynamique sur le plan gastronomique. Avec cette fausse pluie d'étoiles, ce millésime Michelin 2024 était ennuyeux comme la pluie.