Bilatérales III
La Suisse a arraché à Bruxelles des dérogations: utilisons-les!

Le paquet d'accords bilatéraux avec l'Union européenne approuvé vendredi par le Conseil fédéral contient plusieurs dérogations. Plutôt que de refuser cet accès au marché européen, la Suisse doit l'utiliser au mieux, estime notre journaliste Richard Werly.
Publié: 08:14 heures
|
Dernière mise à jour: 08:54 heures
1/5
La présidente de la Confédération Viola Amherd (G) serre la main de la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen après une déclaration à Berne le 20 décembre 2024. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, s'est rendue dans la capitale suisse pour sceller une nouvelle série d'accords visant à stabiliser les liens entre la Suisse et l'Union européenne.
Photo: AFP
Blick_Richard_Werly.png
Richard WerlyJournaliste Blick

Vous connaissez la fameuse phrase: les Etats n’ont pas d’amis, ils n’ont que des intérêts. Or quel est l’intérêt objectif de la Suisse, cernée par un grand voisin européen qui est aussi, de très loin, son premier partenaire commercial? Entretenir au moins avec lui les relations les plus fructueuses possibles, dès lors que l’hypothèse d’une adhésion à l’Union européenne (UE) est hors de question.

C’est cet objectif qui doit maintenant être dans le viseur du Conseil fédéral, après la fin des négociations sur le futur paquet d’accords avec l’UE, déjà surnommé «Bilatérales III». Oui, l’actualisation des anciens accords existants, la création d’un Tribunal arbitral, et la conclusion de cinq nouveaux accords (Electricité, santé, transports terrestres et aériens, libre circulation des personnes, reconnaissance mutuelle des évaluations de conformité) comporte des contraintes pour la Confédération. Et oui, la surveillance de ces futures «Bilatérales III» donnera de facto à l’Union européenne un droit de regard sur la mise en œuvre helvétique de ces textes. Mais comme toujours, le diable se niche dans les détails. Et ces détails, pour le coup, peuvent être habilement exploités par la Suisse.

Démocratie directe

Située au cœur de l’Union européenne, arc-boutée à juste titre sur sa démocratie directe, la Confédération peut en effet transformer ces accords en levier, et en instruments efficaces d’une souveraineté réaffirmée. La pugnacité des négociateurs helvétiques, la légitimité que confère l’approbation référendaire – ou la menace d’un rejet par le peuple – et la volonté évidente de l’UE de ne pas se fâcher avec un partenaire fiable, confirmée par la visite express à Berne d’Ursula von der Leyen, constituent un arsenal en faveur de la Suisse.

Faire front commun

La bonne réponse à ces accords négociés de haute lutte est en réalité de faire front commun. Le Conseil fédéral, avec des mesures d’accompagnement appropriées, doit calmer la colère sociale. Il doit aussi, face à tous ceux qui redoutent l’influence des juges étrangers, remettre la compétence du futur tribunal arbitral dans son contexte. En rappelant par ailleurs à tous ceux qu’un afflux de travailleurs étrangers inquiète que l’entrée du pays dans l’espace Schengen a été, le 5 juin 2005, approuvé par 54,6% des électeurs.


Sans doute plus coûteux que leurs prédécesseurs de 1999 et 2004, ces futurs accords bilatéraux négociés avec une Europe de 27 pays membres, comportent un certain nombre de dérogations uniques pour un pays tiers de l’UE. Elles ne sont sans doute pas aussi nombreuses qu’on pouvait l’espérer. Mais chacune est une brèche dans laquelle il est possible de s’engouffrer pour se tenir à l’écart d’une machine bruxelloise souvent déréglée et problématique.

Telles que présentées ce 20 décembre à Berne, les Bilatérales III peuvent être l’instrument d’une défense intransigeante de la prospérité et de la spécificité de la Suisse. Alors, pourquoi avoir peur?

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la