Vers un retour du surtourisme?
Les professionnels du tourisme veulent faire revenir les touristes chinois en Suisse

Après la pandémie, les Chinois voyagent à nouveau: le marché croît comme aucun autre et le secteur du tourisme s'arrache les clients d'Extrême-Orient. Mais en Suisse, pour éviter les attroupements et la surpopulation de certains lieux, il faut mieux les répartir.
Publié: 21.05.2024 à 08:07 heures
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Lucerne souhaite reconquérir les visiteurs chinois – non plus en grands groupes, mais à l'avenir en petits groupes et mieux répartis sur l'année.
Photo: Keystone
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Andreas Schmid

Le monde du tourisme suisse est divisé: d'un côté, les petites communes, comme celle de Lauterbrunnen (BE) réfléchissent à des taxes journalières pour les visiteurs afin de ne pas être submergées par les flux de touristes. De l'autre, des destinations phares comme Lucerne, le Jungfraujoch ou le Titlis doivent attirer chaque jour des milliers de visiteurs pour faire tourner leur industrie touristique.

Pour les hotspots touristiques comme Lucerne, la pandémie et l'interdiction de voyager qu'a longtemps imposé la Chine en ont eu un effet fatal: Ces groupes de touristes représentent une part non négligeable de la clientèle. Sur les rives du lac des Quatre-Cantons, on respire à nouveau mieux: «L'intérêt des clients potentiels pour les voyages en Europe et en Suisse est à nouveau présent», constate Sibylle Gerardi de Lucerne Tourisme. Le fait que le retour des Chinois ait pris autant de temps s'explique par le fait que les restrictions de voyage n'ont été levées que tardivement, que les bureaux de délivrance des visas n'ont ouvert qu'avec un certain retard et que les capacités aériennes ont longtemps fait défaut. Une fois les goulets d'étranglement levés par la Chine, «les hôtels étaient déjà très bien réservés pour l'été», explique Sibylle Gerardi.

Mieux répartir les touristes

Lucerne poursuit ses «activités habituelles» dans l'optique d'accueil des touristes et se dit confiante dans le fait que davantage de petits groupes ou de voyageurs individuels viendront de Chine à l'avenir. Pour canaliser l'afflux souhaité, les professionnels du tourisme visent une répartition plus régulière des visiteurs sur l'année. Ainsi, en Chine, la saison d'hiver fait l'objet d'une promotion plus importante, explique Liên Burkard, porte-parole de Suisse Tourisme.

80% des chiffres d'avant pandémie

Par rapport à 2019, les visiteurs chinois ont été 44% moins nombreux à visiter la Suisse l'année dernière. La pandémie de Covid a complètement fait chuter le marché, mais il est désormais à nouveau en pleine expansion. «Nous nous attendons à retrouver dès 2024 plus de 80% du niveau d'avant la pandémie et à ce que les chiffres continuent de croître par la suite», révèle Liên Burkard. Selon elle, la Chine est actuellement l'un des marchés à la plus forte croissance au monde. Les activités de marketing visent donc, selon Liên Burkard, à «poursuivre la forte croissance jusqu'à la récupération complète des pertes de la pandémie».

Les «nouveaux» clients chinois – les petits groupes et personnes voyageant seules – sont moins regardants sur les prix et prêts à dépenser de l'argent, explique Liên Burkard. La collaboration avec des voyagistes spécialisés gagne donc en importance. En principe, la stratégie de marketing pour la Chine ne change pas.

«Nous continuons à prospecter activement le marché chinois»

Comme les masses de touristes transforment presque les curiosités et les lieux d'excursion en zones de guerre aux heures de pointe, les professionnels du tourisme se trouvent pris entre deux feux: ils veulent attirer les clients, mais éviter la situation qui prévalait à Lucerne avant le Covid. C'est pourquoi ils visent désormais en Chine les voyageurs individuels et les petits groupes et font surtout de la publicité pour la saison d'hiver.

Les clients chinois sont également importants pour les chemins de fer de la Jungfrau dans l'Oberland bernois. La porte-parole Kathrin Naegeli souligne toutefois que les plus d'un million de visiteurs de l'année dernière venaient du monde entier.

Les chemins de fer de la Jungfrau sont néanmoins très actifs en Chine et étaient par exemple présents aux Jeux olympiques d'hiver de 2022 à Pékin. L'année suivante, le nombre de visiteurs chinois n'a pourtant atteint qu'un quart du niveau de 2019, et cette année, il devrait être de 50 à 60%, selon Kathrin Naegeli. Pour que la demande antérieure soit à nouveau atteinte, l'entreprise poursuit ses activités en cours depuis 1996: «Nous continuons à prospecter activement le marché chinois, en ligne, avec des voyages d'affaires et des représentants dans le pays», explique Kathrin Naegeli. «Autour du Nouvel An chinois, nous avons entretenu de nombreux contacts, comme les années précédentes.»

Les Chinois ne sont pas si importants pour le Valais

La société des remontées mécaniques du Titlis à Engelberg (OW) ne fait actuellement aucun effort de prospection particulier en Chine, comme l'indique son porte-parole Urs Egli. La raison: l'entreprise vise un mélange équilibré de clients. A cela s'ajoute, selon Urs Egli, «le fait que le Chinois voyage actuellement plutôt dans leur propre pays ou dans des régions voisines». Les remontées mécaniques du Titlis maintiennent toutefois les activités qu'elles mènent depuis des années dans l'Empire du Milieu, souligne Urs Egli.

A Saint-Moritz, on se concentre, en plus des clients suisses, sur ses marchés les plus forts que sont les Etats-Unis, la Grande-Bretagne ainsi que les régions à la croissance «prometteuse» que sont le Brésil et l'Asie du Sud-Est, comme l'explique la porte-parole Katja Grauwiler.

Du côté du Matterhorn Gotthard Bahn, en Valais, le ton est tout aussi serein. Le porte-parole Christoph Andereggen affirme que les clients chinois n'ont pas une importance centrale pour l'entreprise. «Nous nous concentrons sur la Suisse et l'Europe centrale, l'espace anglo-saxon, la Corée du Sud et l'Asie du Sud-Est.»

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