Sandra H.* n'en croit pas ses yeux lorsqu'elle regarde son téléphone portable en ce samedi soir. Plus de 20 messages Instagram apparaissent sur son écran. Des photos d'un profil étrangement familier lui sont envoyées. Étonnés, ses amis lui demandent: «C'est toi?» La jeune femme découvre alors que quelqu'un a créé un faux compte avec ses photos. Et elle est loin d'être la seule ciblée par cette pratique visant à escroquer l'entourage des victimes en usurpant leur identité.
Blick a rencontré Sandra H. et deux de ses amies dans un restaurant de Baden en Argovie. Toutes trois ont subi le même sort la semaine dernière. Tabea S.* décrit l'audace avec laquelle les inconnus ont procédé: «En copiant mon vrai identifiant sur Instagram, ils ont alors simplement doublé une des lettres et c'est passé inaperçu. Sur la photo de profil, c'est ma tête. Mes amis n'y ont d'abord vu que du feu.»
Des photos et vidéos intimes sont promises
La description du profil en anglais - qui était identique pour deux des amies - et le lien en dessous laissent deviner les intentions de l'escroc: «Uniquement pour partager mes contenus exclusifs», pouvait-on lire. Le lien mène à un autre faux profil sur la plateforme payante Fansly, dont le fonctionnement est à peu de choses près le même que le célèbre site OnlyFans. Il s'agit d'une page sur laquelle on peut voir des films pornographiques.
Les comptes des autres victimes attiraient également les utilisateurs en promettant des «photos et vidéos intimes». «Tout à coup, mon visage s'est retrouvé sur un site porno. C'était un énorme choc», raconte Lea Z.*
Les amies ont immédiatement signalé les fausses pages à Instagram. Mais rien n'a été fait. Ce n'est qu'au bout de plusieurs jours que la persévérance de Tabea S porte ses fruits. «Mon faux profil sur Instagram a été supprimé», se réjouit-elle, non sans avoir dû batailler avec la plateforme. «Ils ont dit qu'ils avaient regardé le compte, mais que celui-ci ne violait pas leurs règlements.» Les autres faux profils n'ont pas encore été supprimés, ni sur Instagram, ni sur Fansly.
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Instagram et la police ne font rien
Une autre des jeunes femmes qui a également signalé son faux profil a reçu la réponse suivante d'Instagram: «Nous n'avons pas pu supprimer le compte. Ceci en raison du nombre élevé de profils signalés.» Elle a également essayé de contacter la police: «Ils m'ont renvoyée au Centre national de cybersécurité. Là, on m'a répondu de prendre contact avec Instagram. Après une nouvelle demande, on m'a renvoyée à la police.» Un cercle vicieux.
Une plainte dans une telle situation a peu de chances d'aboutir, explique la police cantonale argovienne dans une prise de position envoyée à Blick. Pourquoi? «Parce que la simple création de faux profils, c'est-à-dire l'utilisation et la publication d'images, de pseudos, de noms, n'est pas punissable en soi. Les faux profils ou la création, l'utilisation et la publication de photos de personnes sont pénalement répréhensibles lorsqu'ils conduisent à une infraction (comme par exemple la contrainte, le chantage, l'escroquerie, etc.).»
Les trois amies ne sont donc pas au bout de leurs peines pour regagner le pouvoir sur leur propre image. Une fois le choc passé, la colère de voir la plateforme et la police se refiler la patate chaude gronde chez les jeunes femmes, qui font partie d'une catégorie sociale particulièrement ciblée par les usurpations d'identité sur les réseaux sociaux.
Instagram n'a pas encore répondu aux questions de Blick concernant sa procédure en cas de faux profils.
* Noms modifiés