Les automobilistes ont dû prendre leur mal en patience ce mercredi matin. Sur l'A1, dans le canton de Soleure en direction de Berne, une gargantuesque colonne de voiture s'étend à l'heure de pointe. Le bouchon s'étend sur plus de 20 kilomètres. Et pourtant, le but de ce projet unique au monde était bien...d'éviter les embouteilles.
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L'Office fédéral des routes (OFROU) a amené, à grand frais, un pont autoroutier mobile. Long d'une centaine de mètres, ce monstre d'acier devait permettre aux voitures de rouler à plusieurs mètres au-dessus de la chaussée, tandis que les travaux de maintenance se poursuivent en bas. Le dispositif est censé se déplacer de manière autonome vers la prochaine section de chantier. Dans l'objectif de garantir la circulation sur deux voies et de permettre au trafic de rester fluide.
Les chauffeurs de camion sont sceptiques
Mais qu'est-ce qui a bien pu mal tourner? Dans les faits, la circulation était fortement ralentie. A cause, entre autres, des chauffeurs de camion: ils sont obligés de ralentir avant de s'engager sur la rampe. Certains ont dû rouler à moins de 20 km/h, d'autres ont même carrément immobilisé leur véhicule avant d'emprunter la rampe d'accès. Blick s'est entretenu avec certains d'entre eux sur l'aire d'autoroute qui suivait le pont. Georges B.* est le conducteur d'un semi-remorque transportant une cargaison de denrées alimentaires: «Si j'avais emprunté la rampe à la vitesse autorisée – à savoir, 60 km/h – mon chargement se serait détaché. Je n'ai aucun doute là-dessus. Même si ma marchandise était bien fixée, j'ai dû planter les freins avant de monter sur le pont. Je ne comprends pas à quoi ce machin peut servir».
Le routier Vassili Z.*, qui conduit un camion en provenance d'Allemagne, n'a jamais vu un tel pont en 15 ans de métier. Il est impressionné et bien moins critique que son collègue. «Bien sûr, il faut monter lentement sur la rampe, reconnaît-il. Mais si le sol est sec, on peut le franchir sans problème. J'aime bien ce pont: l'idée est ingénieuse.» Un troisième camionneur nous confie avoir quitté l'autoroute pour contrôler son chargement sur l'aire de repos. Il a bien fait: une caisse avait basculé de sa palette. Il faut dire qu'elle n'était pas correctement arrimée. Il jure en russe.
Astra explique l'embouteillage sur le pont
Il est maintenant dix heures. Entre-temps, la circulation s'est fluidifiée. Google annonce toujours un ralentissement de deux minutes, mais ce n'est rien en comparaison de l'engorgement d'il y a quelques heures. Sous le pont, les machines de réfection du revêtement s'activent. Un embouteillage bloquera-t-il à nouveau le trafic à la prochaine heure de pointe? L'OFROU nous assure que non. Ce fort ralentissement peut s'expliquer: la mise en place de la rampe a été retardé d'une heure. «Cela ne se reproduira pas la prochaine fois», promet son porte-parole.
Selon lui, l'autre problème a été que ce type de pont mobile est inédit. Il explique: «Cela a pu inciter les chauffeurs à adopter une conduite très prudente lors de la traversée. Après un certain temps d'adaptation, la fluidité du trafic s'améliorera». Cette crainte de certains chauffeurs serait infondée. «Nous avons testé le pont de manière approfondie, affirme l'OFROU. La géométrie et l'angle d'accès correspondent à une autre rampe de type 'fly-over' qui a fait ses preuves depuis 2010. Elle peut être empruntée en toute sécurité à la vitesse autorisée de 60 km/h».
*Les noms ont été modifiés
(Adaptation par Jocelyn Daloz)