Un procès «historique» s'ouvre mardi
Un ex-membre d'une unité spéciale biélorusse jugé à St-Gall

Un Biélorusse est jugé depuis mardi à St-Gall pour avoir participé en 1999 à l'exécution d'opposants au régime du président biélorusse Alexandre Loukachenko. Il risque la prison. Un article particulier du Code pénal rend cette procédure possible.
Publié: 19.09.2023 à 22:19 heures
Jugé à Saint-Gall, un Biélorusse risque la prison pour avoir participé en 1999 à l'exécution d'opposants au régime du président biélorusse Alexandre Loukachenko.
Photo: GIAN EHRENZELLER

Le prévenu âgé de 45 ans s'est fait l'auteur du chef d'accusation de disparition forcée en tant que membre d'une unité spéciale du ministère biélorusse de l'intérieur, a déclaré le procureur mardi après-midi lors de son réquisitoire. Il aurait participé ainsi à l'assassinat d'au moins trois opposants au régime: l'ancien ministre de l'intérieur Yury Zakharenka, l'ancien vice-premier ministre Viktar Hanchar et l'homme d'affaires Anatoly Krasouski.

L'accusé a fait des aveux en 2019 lorsqu'il a déposé sa demande d'asile en Suisse. Il a été admis provisoirement et vit actuellement dans le canton de St-Gall.

C'est la première fois que l'article sur les disparitions forcées à la demande d'un Etat, inscrit dans le Code pénal depuis 2017, est utilisé en Suisse. Selon cet article, qui se base sur une convention de l'ONU, une personne peut être inculpée en Suisse même si l'acte a été commis à l'étranger.

Une peine de trois ans de prison dont un an ferme

Interrogé par le Tribunal de district de Rorschach (SG), l'accusé a expliqué qu'il avait fait partie de cette unité spéciale dans les années 1990 au sein de l'armée biélorusse. Il aurait été entraîné pour l'arrestation de «criminels». Devant les juges, l'homme a décrit comment les ordres d'enlever et d'abattre des personnes avaient été exécutés.

Le procureur considère ses aveux comme crédibles. Il exige une peine de trois ans de prison dont un an ferme pour disparition forcée ou, dans le cas contraire, une peine de 9 mois avec sursis pour avoir induit la justice en erreur. Il concède à la Cour que le prévenu s'est contredit par rapport aux déclarations antérieures, mais ces déclarations ne concernent pas le coeur de l'affaire. L'accusé a justifié, lui, ces contradictions, par des erreurs de traduction.

L'avocat de deux proches des victimes, constitués partie civile, demande le même verdict. Il exige 200'000 francs de réparation pour tort moral. «Le régime du président Alexandre Loukachenko a arraché son père à ma cliente», a-t-il dit. La fille de l'ancien ministre de l'intérieur assassiné est présente lors du procès. L'ONG Trial, basée à Genève, fait aussi partie des plaignants.

«La justice en matière de crimes internationaux sera rendue»

Le procès devant le tribunal de district de Rorschach (SG) a lieu dans la salle du tribunal cantonal à St-Gall. Il doit se poursuivre mercredi avec la plaidoirie de la défense. Le jugement pourrait être prononcé le même jour.

«Avec ce premier procès d'un membre présumé de l'escadron de Loukachenko, nous envoyons un signal fort. La justice en matière de crimes internationaux peut être et sera rendue, indépendamment des frontières des Etats ou du temps écoulé depuis que les crimes ont été commis», a déclaré l'avocat du centre pour les droits humains Viasna, cité dans un communiqué.

«Cette affaire marque une étape décisive dans la lutte contre l'impunité des crimes commis en Biélorussie», selon Severin Walz, avocat des familles des victimes, cité dans le communiqué. «Ce procès sera historique. Il ouvre la voie à la compétence universelle en tant que réalité concrète», selon Vony Rambolamanana, conseillère juridique de TRIAL. «La poursuite de tels crimes en Suisse servira d'exemple dans le monde entier».

(ATS)

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