«Un problème politique»
Pourquoi la Suisse ne dispose pas du système d'alerte européen qui signale les médecins radiés?

L'UE possède un système de signalement des médecins radiés et autres éducateurs pédophiles, nommé IMI. En Suisse, on ne dispose pas de ce dispositif. Est-ce une erreur? Médecins et politiques s'expriment.
Publié: 19:20 heures
En 2021, la rupture des négociations avec l'UE sur l'accord insitutionel a freiné la réflexion autour de l'IMI.
Photo: keystone-sda.ch

L’Union européenne (UE) dispose d’un système d’alerte concernant les médecins interdits de pratiquer ou les éducateurs condamnés pour pédophilie. Malgré les mises en garde, notre pays reste à l’écart, puisqu'elle ne fait pas partie du Système d’information du marché intérieur de l’Union européenne (IMI), écrit «Le Matin Dimanche». Cet outil en ligne sécurisé, lancé en 2008, facilite l’échange d’informations entre les autorités de l’UE. Il compte notamment, depuis 2016, un mécanisme d’alerte qui permet aux autorités compétentes d’être informées en temps réel de cas d’interdiction de pratiquer pour les professionnels de la santé et de l’éducation des mineurs. Il regroupe tous les pays de l’Union européenne, auxquels s’ajoutent le Liechtenstein, l’Islande et la Norvège.

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Il s'agit d'une faille dangereuse dans le dispositif d'information européen dont la Suisse est exclue
Pierre Maudet, conseiller d'Etat genevois chargé de la Santé, au sujet des 40,4 % de médecins d'origine étrangère sur le total des médecins en exercice en Suisse
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Un rapport du Département fédéral de justice et police sorti en 2022 déplorait que la Suisse n'y ait pas accès. «L'IMI donne lieu à plusieurs milliers d'alertes par années. Actuellement, la Suisse est le seul pays à ne pas recevoir ces alertes en temps réel». En 2014, une interpellation avait déjà été déposée au gouvernement par la conseillère nationale Barbara Schmid-Federer (Le Centre/ZH), mais la réflexion s'est enlisée dans les méandres des négociations avec l'UE en 2021. De plus, l'acceptation de l'initiative «Contre l'immigration de masse», en 2014, qui avait freiné le processus, dit encore le journal dominical. 

«Il s'agit d'une faille dangereuse dans le dispositif d'information européen dont la Suisse est exclue» estime Pierre Maudet, conseiller d'Etat genevois chargé de la Santé, au sujet des 40,4 % de médecins d'origine étrangère sur le total de médecins en exercice en Suisse. «D'un point de vue technique, ce serait un avantage, mais sur le fond, c'est un problème politique», explique pour sa part Alessandro Cassini, médecin cantonal genevois. Selon le spécialiste, être à l'extérieur du système engrange beaucoup de bureaucratie.

Un système de protection partiel

Si la Suisse ne dispose pas du système, il n'y a pas non plus de quoi trop s'alarmer selon certains, à l'instar de Baptiste Hurni, car le système ne représente pas une garantie de protection absolue. «Pour qu'il soit efficace, le système doit être bien alimenté, ce que je ne mesure pas. De plus, on n'y trouve que les personnes dont les sanctions sont exécutoires. Celles sous le coup de procédures en cours n'y figurent pas», Explique le responsable romand de la Fédération suisse des patients (PS/NE). 

Actuellement, la responsabilité de délivrer les autorisations de pratiquer revient aux cantons, précise encore «Le Matin Dimanche».

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