Quelle culture d'entreprise attire les spécialistes? Comment une entreprise doit-elle se présenter sur LinkedIn? Qu'est-ce qui favorise la santé (notamment mentale) du personnel? Quelles sont les possibilités de flexibilisation du temps de travail?
Autant de questions que se sont posés de grands acteurs économiques au cours de l'année et demie écoulée. Outre Migros, le plus grand employeur du pays, des entreprises industrielles de renom comme ABB, Bühler, Geberit, Georg Fischer et Stadler Rail ont participé au projet. L'Union patronale suisse, qui représente plus de 100'000 petites, moyennes et grandes entreprises, Swissstaffing, l'association des services de l'emploi, ainsi que Swissmem, l'association de l'industrie suisse des technologies, ont également été impliquées dans les discussions.
Les entreprises de production ont un problème d'attractivité
La forte représentation des entreprises de production n'est pas due au hasard. En effet, les employeurs qui proposent principalement des emplois sédentaires ont un problème d'attractivité: comme beaucoup de leurs employés doivent se rendre à l'usine et que le travail à domicile est souvent impossible, ils ont tendance à avoir plus de mal à trouver de bons éléments. «Dans ce contexte, nous nous sommes demandé, après la pandémie de Covid, comment l'environnement de travail pourrait être rendu encore plus attractif, y compris pour les collaborateurs de la production», explique Kareen Vaisbrot, responsable du secteur Politique patronale chez Swissmem.
De cette question sont nées dix «bonnes pratiques» sur le monde du travail d'aujourd'hui. Ce guide complet doit être une «source d'inspiration et d'idées» pour les employeurs qui se veulent modernes.
Parmi les mesures possibles pour augmenter l'attractivité des emplois sédentaires, on cite par exemple l'aménagement de salles de repos à proximité immédiate de la production, de préférence avec des sièges et des distributeurs de bouchons d'oreille. Il est également suggéré de prévoir des possibilités de restauration avec des repas complets, de préférence un restaurant du personnel où les collaborateurs de la production auraient la priorité.
Aux petits soins pour les employés
Afin d'améliorer la gestion du bien-être et de la santé de leurs collaborateurs, les entreprises sont encouragées à mettre en place un service de conseil social. «Le service de conseil social soutient les collaborateurs dans les situations difficiles et les aide à trouver des solutions aux défis professionnels et psychosociaux», est-il indiqué.
Les propositions concernant le Lifelong Learning (apprentissage tout au long de la vie) sont aussi positives pour les travailleurs: «Il est recommandé aux entreprises d'investir dans le développement professionnel de leurs collaborateurs. Des ressources appropriées devraient être mises à disposition à cet effet.»
Plus de flexibilité
L'élément central du guide est en outre une flexibilisation du temps de travail. Pour les collaborateurs de la production, un «système spécial d'équipes supplémentaires» doit notamment permettre de rentrer chez soi à midi pour s'occuper des enfants. En outre, des possibilités existent pour permettre au personnel permanent d'être plus flexible.
La flexibilisation de la semaine de travail fait même l'objet d'un chapitre à part. On peut y lire: «Si jusqu'à présent, il s'agissait souvent de la question de la présence sur place ou du travail à distance, une autre étape pourrait être de rendre la semaine de travail en soi flexible et de s'écarter de l'image traditionnelle de la semaine de cinq jours.» Une semaine de travail pourrait ainsi être répartie sur quatre ou six jours.
Il convient de préciser à cet égard que le temps de travail total par semaine n'est pas remis en question. Mais au lieu d'atteindre les 40 heures prescrites en cinq jours de 8 heures, cela peut aussi se faire en quatre jours de 10 heures. «Le droit des obligations et le droit du travail offrent une certaine flexibilité en ce qui concerne le moment où l'on travaille», explique le guide.
Une semaine de six jours?
Les auteurs considèrent également qu'une semaine de 6 jours avec un temps de travail quotidien de 6 heures et 40 minutes est une voie praticable. Ils font toutefois remarquer que «lorsque le temps de travail est réparti sur plus de cinq jours, une demi-journée de congé doit être accordée».
Les objectifs d'une telle flexibilisation sont, selon le guide, une «culture du travail moderne», des «modèles de temps de travail attractifs» pour recruter du personnel qualifié ainsi que la possibilité pour les collaborateurs plus âgés de continuer à travailler.
Les mesures citées ne sont cependant pas accueillies positivement par tout le monde. La suggestion d'une semaine de six jours, en particulier, devrait déclencher de fortes protestations du côté des syndicats.
Des propositions faites par les employés
Mais la particularité de ces propositions est qu'elles ont aussi été apportées par des employés. Les associations et entreprises mentionnées n'ont pas défini ces dix «bonnes pratiques» du haut vers le bas, mais elles les ont développées en collaboration avec les représentations des travailleurs et les commissions du personnel.
L'association Employés Suisse a également été fortement impliquée. Son directeur, Stefan Studer en est convaincu: «Une plus grande flexibilité horaire est également dans l'intérêt des employés, pour autant qu'un accord bipartite soit conclu.»
Stefan Studer souligne le caractère unique du projet: «Les employés et les employeurs ont élaboré ce guide dans le cadre d'ateliers communs et intensifs. Cela n'a encore jamais été fait en Suisse.»
Modifier durablement le marché du travail
A la question de savoir pourquoi des syndicats comme Unia n'ont pas été mis à contribution, Kareen Vaisbrot répond: «Tous les employeurs n'ont pas non plus été impliqués. Mais nous espérons que sur cette base, un mouvement se produira chez les employeurs comme chez les employés vers des solutions pragmatiques au niveau des entreprises.»
Dans les semaines à venir, les associations présenteront le guide à leurs membres. Des dizaines de milliers d'entreprises et de responsables du personnel devraient recevoir les propositions pour le «travail du futur». La traditionnelle semaine de cinq jours sera-t-elle donc bientôt de l'histoire ancienne? Stefan Studer d'Employés Suisse n'est pas de cet avis: «Les suggestions et les conseils ne sont pas contraignants, mais ils doivent être considérés comme un livre de recettes: chacun choisit ce qui lui convient.»
Au vu de la renommée des auteurs, l'ouvrage a toutefois le potentiel de changer durablement le monde du travail suisse.