Tollé à Lucerne
La Confédération sponsorise un voyage scolaire à hauteur de 60'000 francs!

Une classe d'école lucernoise s'est envolée pour dix jours dans le sud de l'Inde – en grande partie sponsorisée par la Confédération. Reto Knutti, chercheur de l'EPF sur le climat, critique sévèrement cette décision. Le recteur de l'école cantonale se défend.
Publié: 12.04.2024 à 14:33 heures
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Une classe de l'établissement scolaire postobligatoire lucernois Alpenquai s'est envolée pour l'Inde dans le cadre d'un projet d'échange.
Photo: kantonsschulen.lu.ch
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Daniel Ballmer et Sermîn Faki

Le monde court-il à sa perte à cause des avions? Une classe de l'établissement scolaire postobligatoire Alpenquai de Lucerne s'est rendue à Trivandrum, ville côtière du sud de l'Inde, au début de l'année pour un projet d'échange. Le vol a duré douze heures et le séjour dix jours. Le voyage a été précédé par la visite d'une classe indienne à Lucerne.

A l'aller comme au retour, 15'438 kilomètres de vol ont été parcourus, ce qui correspond, selon le calcul effectué par passager en classe économique, à des émissions de CO₂ de 1,23 à 2,92 tonnes. D'un point de vue purement statistique, 2,92 tonnes de CO₂ correspondent à l'émission d'1,3 voiture par an en moyenne.

La Confédération contribue à hauteur d'environ 60'000 francs

Détail plus piquant encore: ce sont les contribuables suisses qui ont financé la majeure partie de ce voyage peu respectueux du climat. Movetia, une agence nationale pour l'échange et la mobilité financée par la Confédération, a soutenu les 22 élèves suisses et indiens ainsi que les deux enseignants à hauteur de 62'720 francs, écrit le média en ligne Zentralplus.

Movetia a payé 1100 francs par élève suisse pour le voyage et le séjour. Les familles des élèves ont, elles, contribué à hauteur de 650 francs par enfant.

«Aucune raison de prendre l'avion»

Reto Knutti de l'EPFZ ne comprend guère ce geste. Selon lui, les vols provoquent au moins 20% des émissions de gaz à effet de serre en Suisse. Et les pouvoirs publics doivent donner l'exemple. La Confédération s'est fixé un objectif de réduction de CO₂ de 50% d'ici à 2030, explique le professeur de physique climatique.

Et de poursuivre: «Fondamentalement, il n'y a pas, selon moi, de raisons claires pour lesquelles l'éducation scolaire nécessite des voyages en avion.» Les compétences essentielles peuvent toutes être transmises depuis la Suisse ou un pays proche. Tout le reste ne serait qu'excuse.»

«Les vols ont été compensés»

Sollicité par Blick, le recteur de l'établissement scolaire postobligatoire Alpenquai Hans Hirschi admet qu'un tel voyage n'est pas nécessaire pour obtenir la maturité. Mais l'école ne s'en cache pas: «Oui, il y a un conflit d'objectifs entre l'échange interculturel, qui a une valeur dans un monde globalisé, et la protection du climat. Il faut peser le pour et le contre.»

Le voyage n'était pas touristique: il s'inscrivait dans un projet scolaire à long terme, explique-t-il. Les jeunes Suisses et Indiens auraient eu des contacts en ligne pendant des mois et auraient travaillé sur des projets communs. Et puis il y a eu un véritable échange: «Si j'écoute les retours de nos élèves, ce voyage a été très précieux. Et il n'a été possible qu'en prenant l'avion.»

Hans Hirschi affirme qu'à l'Alpenquai, le principe est «aucun vol en avion» et que cette règle ne fait l'objet que de très peu d'exceptions. Le voyage en Inde était l'une d'entre elles. Et «les vols ont été compensés.»


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