Rarement la Confédération n'a suscité autant de colère internationale qu'après l'attaque russe contre l'Ukraine. Les tergiversations sur les sanctions contre Moscou ont provoqué l'indignation à l'interne comme à l'étranger.
D'autres pays non membres de l'UE soutiennent sans hésiter les mesures punitives décidées par Bruxelles contre Moscou, annoncées jeudi par la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen. Le Conseil fédéral, en revanche, s'est montré réticent jusqu'à présent.
Que pensent les Suisses et les Suissesses?
Mais, dans tout ça, qu'en pense la population? Un sondage en ligne représentatif et pondéré réalisé par l'institut de recherche Link auprès de 1009 Suisses et Suissesses pour Blick révèle une position différente de celle de la Berne fédérale.
Une courte majorité de 52% des personnes interrogées se prononce en faveur de la reprise par la Suisse des sanctions de l'UE contre Moscou. Un quart s'y oppose et un autre quart se montre indécis sur cette question.
Il est frappant de constater que l'opposition aux sanctions de l'UE au sein du peuple correspond assez exactement à la part d'électeurs de l'UDC, qui défend cette ligne en se référant à la neutralité.
Le point crucial de la neutralité
Mais c'est clairement une minorité qui suit cette argumentation: une personne sur cinq, soit 22% des sondés, partage l'avis selon lequel les sanctions ne sont pas en accord avec la neutralité suisse.
Le fait que le Conseil fédéral mise de manière générale sur la retenue dans cette crise est néanmoins bien accueilli par les participants au sondage: 45% saluent cette attitude.
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Cela peut être lu comme une adhésion à la politique de neutralité traditionnelle de la Suisse, mais aussi comme l'expression de la peur d'une extension de la guerre. Ainsi, seuls 26% sont d'avis que l'Occident devrait intervenir directement sur le plan militaire. Une majorité de 54% s'y oppose.
Crainte d'une Troisième Guerre mondiale
A cela s'ajoute le fait que 70% des Suisses et Suissesses craignent une nouvelle escalade de la guerre. Seul un tiers des personnes interrogées restent sereines.
Le Conseil fédéral est par ailleurs soutenu dans sa politique de bons offices: deux tiers des sondés, soit 66%, estiment que la Suisse devrait jouer un rôle actif de médiateur.
Session spéciale du Conseil de sécurité de l'ONU
Ces résultats sont intéressants en vue d'un dossier actuellement très discuté: le fait que la Confédération aspire à un siège au Conseil de sécurité de l'ONU. Sous la pression de l'UDC, le Parlement débattra à nouveau de cette candidature lors d'une session spéciale en mars.
Bien que des bombes tombent en Europe de l'Est, 49% des sondés sont toujours favorables à une adhésion à l'organe controversé de l'ONU.
Le verdict est remarquablement clair sur la question des réfugiés: 66 ans après le soulèvement hongrois et 54 ans après le Printemps de Prague, la solidarité avec les peuples d'Europe de l'Est sous la coupe de Moscou est intacte. 72% pensent que la Suisse doit accueillir les personnes en quête de protection en provenance d'Ukraine.
L'avenir dira si le Conseil fédéral mettra fin la semaine prochaine à sa politique étrangère en dents de scie, et s'il parlera clairement des sanctions de l'UE. Il est bien possible que l'opinion publique ait un poids dans la décision.