Rouée de coups de pieds
Le violent tabassage d'une femme met la police de Schaffhouse dans l'embarras

Fabienne W. a été rouée de coup dans un appartement par trois hommes qui voulaient la faire taire après un viol présumé. De nombreuses critiques s'élèvent aujourd'hui contre les autorités de Schaffhouse, accusées de complaisance envers les agresseurs.
Publié: 23.05.2024 à 21:13 heures
|
Dernière mise à jour: 30.05.2024 à 17:36 heures
1/5
Les faits remontent à décembre 2021: sur un enregistrement, Fabienne W. tente de se débattre en criant face à trois hommes violents.
Photo: Screenshot/SRF Rundschau
RMS_Portrait_AUTOR_332.JPG
Janine Enderli

Un homme projette Fabienne W.* contre un fauteuil et la frappe à coups de poing. La victime sans défense tente de se débattre en criant. Sans succès. Plusieurs hommes la saisissent, puis l'un d'eux la soulève avant de la faire tomber la tête la première au sol.

Les faits remontent à décembre 2021. Les images explicites et troublantes de deux caméras de surveillance ont, elles, été publiées pour la première fois sur la SRF.

La victime porte de graves accusations contre les autorités

Selon Fabienne W., un avocat de Schaffhouse l'a invitée à dîner chez lui. Celui-ci souhaitait la dissuader de porter plainte contre l'un de ses collègues, qui l'aurait violée une semaine avant la rencontre. Mais la Suissesse n'a pas voulu renoncer à porter plainte.

C'est alors que, quelques heures plus tard, elle a été violemment battue, et ce, dans un objectif d'intimidation, pense-t-elle. Ce que l'avocat incriminé et ses trois collègues contestent. Selon eux, Fabienne W. se serait déchaînée et les hommes auraient simplement tenté de la calmer. Contacté à plusieurs reprises, l'avocat n'a pas pris position sur l'affaire.

Depuis l'incident, Fabienne W. souffre d'un trouble de stress post-traumatique. Au choc se mêle aujourd'hui la colère, car elle en veut aux autorités de poursuite pénale de Schaffhouse: en effet, bien que ses tortionnaires soient connus des enquêteurs, rien n'aurait été fait contre eux.

Pour l'avocat de la défense, le travail d'enquête a été négligé

La police de Schaffhouse a ouvert une enquête. Cette dernière s'est surtout concentrée sur les enregistrements de deux caméras de surveillance. Après la nuit du crime, les images de ces caméras devaient être saisies afin de reconstituer les événements.

Mais l'avocat a indiqué à la police que l'ordinateur sur lequel sont stockées les images était tombé en panne. Les policiers ont par la suite filmé les enregistrements avec le téléphone portable de l'accusé, sans le son. Puis lors d'une deuxième perquisition, les policiers ont sauvegardé les enregistrements sur une clé USB, avec l'aide de l'avocat.

Au printemps 2023, la police a effectué une troisième perquisition chez l'avocat pour saisir et analyser «les téléphones portables pouvant être trouvés». Les agents ont ensuite emporté un téléphone que l'avocat leur a remis volontairement.

L'avocat de la défense, Konrad Jeker, s'est exprimé sur cette affaire, indiquant que la procédure de la police de Schaffhouse était «spéciale» et que d'un point de vue criminologique, tout allait à l'encontre des normes habituelles. 

Ainsi, la police aurait reçu des objectifs clairement définis par le Ministère public, mais «ceux-ci n'ont pas été mis en œuvre. C'est un refus d'obéir aux ordres.»

Les autorités rejettent les accusations

Les autorités de Schaffhouse rejettent, elles, les critiques qui leur sont adressées. La police, le Ministère public et le département de la justice ont refusé de prendre position, invoquant la procédure en cours.

Dans une prise de position commune, les autorités ont écrit qu'elles rejettent toutes les accusations, jugées fausses et infondées: «On ne peut pas parler d'un refus de la police de Schaffhouse d'obéir aux ordres.» Et en raison du secret de fonction, la possibilité pour le Ministère public de rectifier les contre-vérités est fortement limitée.

La procédure pour viol a entre-temps été classée. Fabienne W. a fait appel de cette décision. Et en ce qui concerne les mauvais traitements, aucune charge n'a encore été retenue contre les principaux accusés. Tous les accusés bénéficient de la présomption d'innocence.

* Nom connu

Vous avez trouvé une erreur? Signalez-la