La colère gronde dans les coulisses du Grand Théâtre de Genève (GTG). Après la découverte d'une caméra dissimulée dans une douche du vestiaire réservé aux techniciennes et aux placeuses le 8 mars dernier, des membres du personnel veulent briser le silence. Dans une lettre signée début du mois et révélée par une enquête de Mediapart le 16 avril dernier, elles dénoncent une institution sexiste et demandent des actions concrètes.
Rapidement après les premières révélations de «La Tribune de Genève», deux mails ont attisé l'indignation des employées. Un premier, reçu des ressources humaines, révèle une affaire similaire datant de 2014. Puis un second, 20 jours plus tard, dans lequel la direction générale tente d'étouffer l’affaire, en rappelant «le devoir de réserve» et de «loyauté». Il est demandé aux salariées concernées de ne pas ébruiter l'incident sous peine de poursuites judiciaires.
Une autre affaire de caméra cachée
C'en est trop: le climat de peur et d'omerta doit cesser. 51 employées et ex-employées ont signé une missive le 2 avril dernier, dénonçant non seulement le silence, mais aussi la culture sexiste profondément ancrée au sein du prestigieux établissement. Elles demandent des mesures de sécurité, comme de nouveaux vestiaires et un système de badge ou de caméra de surveillance, précise «Le Courrier» ce jeudi 24 avril.
Le mouvement de soutien a vite pris de l'ampleur à l'interne: près de 60 «signataires soutenant-e-s» ont rejoint la liste. Car cet épisode n'est pas un cas isolé. Il survient dix ans après la découverte d'une autre caméra dans un vestiaire du GTG. Pour les signataires de la lettre, ces deux événements pourraient être liés. Elles exigent une totale transparence sur cette ancienne affaire.
A l'époque, ce cas n'avait donné lieu à aucune suite judiciaire, laissant un sentiment d'impunité. Contacté par «Le Courrier», Sami Kanaan, magistrat chargé de la culture en Ville de Genève, affirme vouloir faire toute la lumière sur ce dossier étouffé. Il demande des explications à la police ainsi qu'aux responsables de l'époque.
Dans un communiqué, la direction du Grand Théâtre affirme condamner fermement ces actes et assure avoir renforcé la sécurité. Toutefois, comme le soulignent «Le Courrier» et Mediapart, elle reste évasive sur la nature précise de ces mesures, alimentant la défiance d'une partie du personnel.