La Session d’hiver des chambres fédérales ne sera pas la première sans plexiglas depuis un an et demi. Les parlementaires n’ont eu qu’une semaine de répit dans leurs Conseils en configuration «traditionnelle» — dès lundi, ils retrouveront leurs «cages» de polyméthacrylate de méthyle.
Une nouvelle normalité, puisque c’est déjà la cinquième Session avec ces mesures de protection. «Les deux salles de débats ne permettant pas d’assurer la distance de 1,50 m», expliquait-on à Berne en septembre 2020 lors de l’installation des parois. Coût de l’opération: 200’000 francs, assurait Heidi News.
A l’époque, la mesure n’avait pas fait de vague, tant elle semblait logique pour endiguer la deuxième… vague au Parlement. Or, si le Covid continue de nous pourrir la vie automnale, la science a appris des choses en un an. Parmi elles, l’utilité toute relative des séparations en plexiglas. Plusieurs études ont montré qu’elles pourraient même être contre-productives, bloquant la circulation des fameux aérosols.
«Non seulement cela ne protège pas, mais les parois en plexiglas empêchent la ventilation», expliquait à Franceinfo Bruno Andreotti, physicien et professeur à l’École normale supérieure de Paris et spécialiste de ces nuages invisibles de particules que nous émettons lorsque nous parlons ou respirons. Qu’en pensent les scientifiques suisses? Didier Trono, de l’EPFL, botte en touche. «Je ne pense pas avoir la compétence d’en dire davantage que ces spécialistes», note le membre de la task force Covid.
L’aération reste primordiale
Sur un plan purement scientifique, la décision de la délégation administrative du Parlement est donc incompréhensible. Comment les principaux concernés la justifient-ils? Irène Kälin, nouvelle présidente du Conseil national, l’explique par l’expérience réalisée jusqu’ici sous la Coupole. «Même lorsque nous avons eu l’un ou l’autre collègue positif, ses voisins n’ont pas été infectés», avance la Verte argovienne. Pas sûr que l'échantillon soit suffisant pour en tirer des conclusions...
La première citoyenne du pays accepte la critique mais note que ces parois viennent s’ajouter aux autres mesures de protection en vigueur au Palais fédéral, notamment le certificat Covid. «Il est plus agréable pour les parlementaires de pouvoir enlever leur masque lorsqu’ils travaillent à leur place ainsi protégée par le plexiglas. Et nos salles sont très bien aérées», souligne Irène Kälin. Sur ce point, la science rejoint l’écologiste: l’aération est le facteur décisif.
Reste que cet épisode montre à quel point la politique passe avant la science: selon certaines indiscrétions, il s’agirait avant tout d’une mesure psychologique, certains parlementaires n’étant pas prêts à remettre un masque…