Retour aux usines à charbon?
La débâcle du nucléaire français met la Suisse en difficulté

Les centrales nucléaires françaises étant en panne, la Suisse doit se procurer de l'électricité de remplacement. Celle-ci est chère - et provient probablement de centrales à charbon. Un retour en arrière en terme d'écologie.
Publié: 26.12.2022 à 06:04 heures
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Dernière mise à jour: 26.12.2022 à 06:57 heures
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La centrale nucléaire française de Cattenom fournit de l'électricité à la Suisse. Elle est toutefois endommagée et ne produit plus que la moitié de sa capacité.
Photo: AFP via Getty Images
Danny Schlumpf

Vendredi, la conseillère fédérale Simonetta Sommaruga a remis les clés du Département de l'Energie au futur ministre Albert Rösti. Les partisans du nucléaire en Suisse s'en réjouissent. Ils espèrent que l'élu UDC lèvera l'interdiction de construire de nouvelles centrales nucléaires. Car ils en sont convaincus: sans électricité nucléaire, pas de sécurité d'approvisionnement.

En France, pays du nucléaire par excellence, on n'en est plus si sûr. La moitié du parc de centrales est à plat. Le gouvernement d'Emmanuel Macron a réactivé deux centrales à charbon pour compenser les défaillances. Mais cela ne suffit pas. Pour la première fois de son histoire, la France, avec ses 56 réacteurs nucléaires, devient un importateur net d'électricité en provenance d'Allemagne - qui doit également sortir des centrales à charbon de sa réserve.

Production au plus bas

La débâcle des centrales nucléaires françaises touche également la Suisse, qui achète 5500 gigawattheures d'électricité par an à son voisin. Cela correspond à la production de la centrale de Beznau.

La majeure partie de l'électricité française - 3500 gigawattheures - provient des réacteurs de Bugey et de Cattenom. Mais leur production est au plus bas. Les réacteurs endommagés ne fournissent plus que la moitié de la quantité habituelle d'électricité.

Le groupe énergétique Axpo doit désormais se procurer ailleurs le jus manquant. Mais sur le marché, les prix sont élevés. Il est fort probable que le courant de remplacement provienne de centrales à charbon. Les pannes du nucléaire en France ne signifient donc pas seulement des coûts, mais aussi davantage d'émissions de CO2, alors que 2022 a déjà battu des records en termes de pollution.

Pas de commentaire

Axpo évite de répondre aux questions concrètes à ce sujet. L'entreprise fait savoir qu'elle se procure de «l'électricité sur le marché aux conditions en vigueur». Le groupe ne sait pourtant pas de quelles centrales électriques provient le courant.

Fabian Lüscher dirige le domaine de l'énergie nucléaire à la Fondation suisse de l'énergie. Et il ne mâche pas ses mots: «Les pannes de centrales nucléaires sont un problème au cœur de la misère actuelle en matière d'électricité. Il est d'autant plus inquiétant que le cumul des risques des centrales nucléaires soit propagé par le nouveau ministre de l'Energie, lui qui est garant de la sécurité d'approvisionnement.»

Du retard, du retard et encore du retard

Emmanuel Macron ne se laisse pas pour autant décourager par la débâcle des centrales françaises. Il en a déjà planifié la construction de six nouvelles. Mais avant tout, le réacteur de Flamanville sera (enfin) raccordé au réseau - douze ans plus tard et après 20 milliards d'euros de dépense... soit six fois plus cher que le budget annoncé.

Mais la France n'est pas la seule dans cette situation, de tels problèmes existent aussi ailleurs. Les coûts du réacteur britannique Hinkley Point 3 par exemple, ont été multipliés par dix. Le réacteur finlandais Olkiluoto-3 est quant à lui trois fois plus cher que budgétisé et sera raccordé au réseau 14 ans plus tard que prévu.

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