C’est un tweet dont le Parti libéral-radical (PLR) se serait bien passé. Mais posons d’abord le contexte. Peu avant sa conférence sous haute tension à Genève ce mercredi soir, le polémiste d’extrême droite Eric Zemmour a rencontré plusieurs élus du pays. Parmi ceux-ci, les conseillers nationaux de l’Union démocratique du centre (UDC) Yves Nidegger et Roger Köppel mais aussi le député PLR genevois Jean Romain. Ce dernier ne s’est a priori pas déplacé pour faire des ronds de jambe: il avait annoncé mercredi matin sur son profil Facebook vouloir poser deux questions très précises au futur probable candidat à l’élection présidentielle française.
Zemmour très reconnaissant
L’élu est visiblement parvenu à ses fins. En témoigne une photo publiée par Eric Zemmour sur Twitter, accompagnée de ces quelques mots: «Rencontre aujourd’hui à Genève avec des élus du PLR et de l’UDC. Merci pour ces échanges!»
Il n’en fallait pas davantage pour enflammer les réseaux sociaux. «On ne s’attendait à rien d’autre de la part de l’UDC, commente un internaute. Le PLR par contre est en dessous de tout, flirtant ainsi avec un populisme dégueulasse! La dégringolade continuera et sera instopable» (sic). Un autre abonde: «Avant de voter PLR (par exemple ce printemps aux élections vaudoises), pensez bien à cette photo. Je sais que moi ça m’a coupé l’envie».
Différentes personnalités ont aussi réagi. C’est le cas du conseiller aux Etats socialiste Carlo Sommaruga. «Que les pires UDC se pavanent avec le repris de justice et propagateur de haine qu’est Eric Zemmour n’est malheureusement pas étonnant, vitupère le Genevois sur Twitter. Mais que des PLR y participent est tout simplement scandaleux! Comment servir de faire valoir à quelqu’un qui piétine nos valeurs!»
Le parti bourgeois pointé du doigt a tenté de limiter le dégât d’image et s’est à son tour exprimé sur la rencontre: «Il s’agit d’une initiative personnelle qui n’engage aucunement le PLR Suisse». La section genevoise a, elle aussi, pris ses distances: «Le PLR-GE n’a ni souhaité, ni organisé, ni accepté une rencontre avec Monsieur Zemmour. C’est à l’initiative strictement personnelle d’un membre du PLR que celui-ci a rencontré Monsieur Zemmour».
Sous une publication critique d’un militant de gauche, Bertrand Reich, président du PLR de la cité de Calvin, a répété cette prise de position. Avant de la compléter: «Eric Zemmour est par ailleurs légalement en Suisse et chacune, chacun a la faculté d’exprimer son désaccord avec ses propos, s’il le souhaite, mais aussi de vouloir le questionner ou encore de l’écouter, voire de partager ses points de vue. Ce n’est pas mon cas, mais c’est aussi cela les libertés de pensée et de parole qui caractérisent un état libéral».
Zemmour, une sorte de «Détritus»?
Un avis que partage Marc-Olivier Buffat, président du PLR vaudois. «Monsieur Zemmour a le droit de venir s’exprimer et chacun est libre de le rencontrer à titre privé et donc sans mettre en avant sa fonction, explique-t-il à Blick. J’aimerais par ailleurs rappeler qu’à gauche, certains ont fait des rencontres pour le moins sulfureuses avec — par exemple — des hauts dignitaires soviétiques et cubains sans que cela n’offusque personne.»
Le député se penche sur le tweet d’Eric Zemmour, dans lequel le Français mentionne sa rencontre avec Jean Romain. Contrairement à ce dernier, qui n’a pas sauté sur l’occasion pour se faire mousser. «Eric Zemmour veut diviser, créer le débat et le buzz», assène l’avocat lausannois. Il éclate de rire: «C’est un procédé qui fait penser au semeur de zizanie Tullius Détritus dans Astérix et Obélix.»
Marc-Olivier Buffat ne fait pas dans la langue de bois. «Je désapprouve la polémique et j’ai personnellement trouvé que le débat Zemmour-Mélenchon était au-dessous de tout. Cependant, si on lui tire dessus à boulets rouges aujourd’hui et qu’il devient un jour président de la République, nous serons bien embêtés car nous serons obligés d’aller lui parler.»