Réconciliés le dimanche du vote
Il s'est battu contre le mariage pour tous, même si son père est homosexuel

Le politicien évangélique Marc Jost a fait campagne contre le mariage pour tous. Son père, Samuel, est homosexuel. Il l'a caché à sa famille pendant de longues années et vit désormais avec un homme. Dimanche, le père et le fils se sont réconciliés.
Publié: 27.09.2021 à 16:43 heures
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La relation père-fils entre Marc et Samuel Jost est particulière.
Photo: STEFAN BOHRER
Ladina Triaca (texte), Alexandre Cudré (adaptation)

En ce dimanche de votations, Samuel Jost se tient au bord du lac de Thoune, barbe blanche, son fils cadet à ses côtés. C'est un jour spécial. La Suisse vote sur le mariage pour tous et Marc... se bat en première ligne contre ce projet.

Politicien au Parti évangélique suisse (PEV), Marc a ignoré durant de longues années que son père était gay.

Alors qu'il est enfant, son père tente de se suicider. Même si Samuel Jost cache cette tentative et sa souffrance, les tensions entre lui et sa femme sont parfaitement visibles. «J'avais l'impression de devoir protéger ma mère. Mon père et moi étions en conflit permanent», révèle le fils.

Un fort désir d'enfants

Cela fait longtemps que Samuel Jost a pris conscience de son homosexualité. Alors qu'il est jeune adulte, il participe à un séminaire de formation des enseignants, lors duquel il remarque déjà qu'il est attiré par les hommes. Néanmoins, il a une petite amie.

«Il était impossible d'être ouvertement gay en tant qu'enseignant à l'époque, explique-t-il. Et je voulais des enfants.»

Lors de sa rencontre avec sa femme, il ressent un lien spirituel fort avec elle. Elle donne naissance à leurs trois enfants et leur transmet sa foi. «Ma femme et moi étions sur un pied d'égalité, raconte-t-il. Je n'avais pas conscience que ce serait si difficile pour moi.»

Le père de famille finit par faire son coming out

Mais Samuel Jost souffre et ne veut plus le cacher. Il décide de faire son coming out alors que son fils Marc a la vingtaine. Il le révèle en même temps à sa femme et à ses enfants. «À ce moment-là, j'étais tombé profondément amoureux d'un homme et j'ai réalisé que je devais l'assumer.»

Deux décennies après cette révélation, père et fils suivent la journée de votation sur le mariage pour tous dans un restaurant de camping, au bord du lac de Thoune. Les premières projections indiquent une approbation à 64%. Un chiffre qui restera stable jusqu'au bout de la journée.

«C'est incroyable de devoir voter là-dessus en 2021, quand même!», s'exclame une serveuse à la voix rauque. Assis avec son père, Marc Jost garde le silence.

Sous le feu des projecteurs

Les dernières semaines ont été intenses pour le politicien, sous le feu des projecteurs en Suisse alémanique. Dans les émissions politiques «Arena» et «Le Club», il était l'une des voix fortes de l'opposition au don de sperme pour les couples lesbiens et de l'adoption pour les homosexuels. «Il est inacceptable de faire grandir des enfants sans père, sans que ceux-ci aient quoi que ce soit à dire», a-t-il défendu sur les plateaux de télévision.

«Je suis fier de mon fils»

Mais Samuel Jost ne le prend pas mal: il est très impressionné par ses apparitions télévisées. «Je suis fier de mon fils. Il présente bien, est intelligent et argumente bien.» Le raisonnement de son fils lui paraît logique. Lui-même avait l'habitude de tenir des positions similaires.

«Marc est fortement orienté vers une position idéaliste, poursuit-il calmement, et c'est quelque chose que je peux comprendre. Ma réalité est simplement devenue différente entre-temps.»

«Nous fêtons Noël ensemble»

Samuel Jost vit aujourd'hui avec son compagnon, un violoncelliste, à Fribourg-en-Brisgau, en Allemagne. Il se rend régulièrement à Brienz (BE) pour voir ses enfants et petits-enfants. Il a gardé la foi, mais pas le contact avec l'Église. Et il dit pouvoir très bien imaginer convertir son partenariat enregistré en mariage.

Son fils Marc ne pense pas qu'un homosexuel y ait droit. Néanmoins, il accepte la relation de son père. Il parle d'un processus d'apprentissage: «Au début, j'étais réservé et sceptique. Aujourd'hui, je connais bien le partenaire de mon père. Nous assistons à ses concerts et fêtons Noël ensemble».

Une relation solide

La relation entre le père et le fils est meilleure aujourd'hui qu'elle ne l'était auparavant. «Mon engagement contre le mariage pour tous n'a été possible que parce que nous avons une relation solide, déclare Marc. Sinon, je ne l'aurais pas fait.»

Néanmoins, tous deux sont soulagés que le vote, un moment intense pour tous les deux, soit maintenant terminé. Ils vont laisser la question en suspens pour l'instant.

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