La Cour des comptes a publié lundi un rapport sans concessions sur l'acquisition de prestations de services et l'attribution de mandats au sein de l'Etat de Genève. Le «gendarme» de l'administration a constaté «de nombreuses irrégularités». La Cour des comptes a ainsi découvert que des subventions étaient octroyées par le biais de contrats de mandat. Une pratique qui constitue «une violation des dispositions» de la loi sur les indemnités et les aides financières (LIAF). Une quinzaine de cas de ce type ont été recensés.
Aucune trace de corruption n'a toutefois été mise à jour, a souligné le co-auteur du rapport François Paychère, devant les médias. Le magistrat n'a pas exclu qu'il y ait eu parfois une volonté de s'affranchir des règles ou que certains ont agit par méconnaissance de celles-ci. Le mandat est une forme juridique moins rigide que les subventions, a expliqué, de son côté, sa collègue Isabelle Terrier. Les subventions sont plus encadrées et figurent, par exemple, au budget.
Besoins mal identifiés
Un autre constat des magistrats enquêteurs est qu'il «n'est pas toujours possible de comprendre a posteriori les raisons qui poussent l'Etat à faire recours à un tiers et en quoi la dépense sert à atteindre des objectifs de politiques publiques». L'Etat a effectué, par exemple, un appel d'offres public pour trouver un mandataire capable de réaliser un futur appel d'offres pour le compte d'un office. Il rémunère aussi un indépendant pour présider une délégation et représenter ses intérêts dans un conseil d'administration.
La Cour des comptes a également constaté que l'Etat a accordé des mandats de gré à gré alors qu'ils auraient dû être soumis à la législation sur les marchés publics. Un office a ainsi attribué trois mandats aux objectifs proches à deux sociétés dirigées par la même personne. Pour la Cour des comptes, les trois mandats auraient dû être considérés comme un même marché. Le morcellement a permis d'éviter de devoir passer par une procédure ouverte à tous les fournisseurs.
Blocage au Conseil d'Etat
La Cour des comptes préconise des mesures «simples» qui permettraient d'améliorer le processus et combler les lacunes qui ont été identifiées, mais elle se plaint de n'avoir pas eu l'attention désirée du Conseil d'Etat. Sur les 10 recommandations, 7 ont été refusées sans explication, a déploré M. Paychère. Le magistrat ne s'explique pas cette attitude, ce «désintérêt» de l'exécutif. «Nous proposons des choses basiques, qui n'ont rien de révolutionnaire», a souligné M. Paychère. La Cour des comptes recommande, par exemple, à l'Etat de clarifier la notion de marché et sa délimitation.
Dans un communiqué publié lundi, le Conseil d'Etat genevois a critiqué «l'approche délibérément orientée» du rapport. L'enquête a porté sur un échantillon de 84 commandes et 26 fournisseurs, sur un total de 36'000 commandes annuelles. L'exécutif a aussi relevé «qu'aucune fraude, ni dommage financier n'a été constaté».
La Cour des comptes s'est penchée sur le sujet des mandats à l'Etat de Genève à la demande de la Commission des finances du Grand Conseil qui enquêtait sur l'affaire Fabienne Fischer. L'ex-conseillère d'Etat était soupçonnée d'avoir octroyé des mandats à des associations proches de son compagnon.