Même si la ministre de la Défense Viola Amherd et son armée se réjouissent du nouveau F-35, le ministère américain de la Défense reste sceptique quant à ses nouveaux jets du constructeur Lockheed Martin. Il a régulièrement été confronté à des problèmes: en temps d’orage, l’armée évite même de les faire voler à cause du risque d’explosion en cas de foudre.
Un rapport de 2020 a recensé 873 défauts de logiciel. A cela s’ajoutent des problèmes de précision du canon de bord. Les autorités américaines ont décidé de ne pas interrompre le programme, tout simplement parce que beaucoup trop d’argent y avait déjà été injecté. L’armée suisse a également émis des doutes.
Dernier problème en date: le Pentagone peine à avoir une vue d’ensemble sur des dizaines de milliers de pièces de rechange d’une valeur de plusieurs millions de dollars. C’est ce que critique la Cour des comptes américaine, qui dépend directement du Congrès, dans un rapport publié récemment.
La Cour des comptes dénonce
L’armée américaine n’est pas la seule à utiliser le F-35, de nombreuses autres nations le font également – la Suisse s’ajoutera à cette liste à partir de 2027. Le Pentagone entretient tout un stock de pièces de rechange réparties dans le monde entier, à disposition des alliés si nécessaire.
Seulement voilà, le Pentagone ne dispose pas d’un système permettant d’avoir une vue d’ensemble des stocks, peut-on lire dans le rapport de 35 pages. Ainsi, il est impossible de savoir combien de pièces de rechange se trouvent dans le stock, combien ont été perdues ou quel prix a été payé.
L’armée américaine n’a jamais anticipé le fait qu’elle allait entreposer un jour des pièces de rechange pour d’autres nations. Comme aucun système d’inventaire n’a jamais été développé, ce sont les fabricants Lockheed Martin et Pratt&Whitney qui en sont aujourd’hui encore responsables.
Le processus est particulièrement opaque, car le stockage de ces pièces de rechange a été externalisé par les deux fabricants: celles-ci se trouvent donc sur des dizaines de sites qui n’appartiennent ni au gouvernement américain ni à l’une des deux entreprises.
«Sans pièces de rechange, un avion de combat devient inutile»
Anja Gada, du Groupe Suisse sans Armée (GSsA), n’est guère étonnée: «Si les États-Unis ne savent déjà pas à qui appartiennent quelles pièces de rechange, où elles doivent être livrées, où elles se trouvent et lesquelles manquent, comment la 'sécurité d’approvisionnement' de ce jet pourra-t-elle être garantie à l’avenir pour des dizaines d’États?»
«Nous avons toujours mis en garde contre les embûches entourant l’acquisition du F-35», explique la secrétaire du GSsA. C’est pourquoi l’organisation avait récolté plus de 100’000 signatures contre ce projet, avant que la ministre de la Défense Viola Amherd empêche une votation sur le sujet, poursuit-elle. «Sans livraisons de pièces de rechange, un avion de combat devient inutile. Il ne peut même plus remplir des tâches de police aérienne.»
Le département de la Défense de la conseillère fédérale du Centre Viola Amherd semble également ne pas savoir comment réagir face à cette nouvelle inconnue. Même après plus de deux jours d’attente, Blick n’a toujours pas reçu de réponse de l’Office fédéral de l’armement (Armasuisse).
L’arme la plus chère de l’histoire américaine
La Cour des comptes américaine a fait quatre recommandations au Pentagone pour reprendre le contrôle des stocks. Ce dernier les a toutes approuvées, mais a constaté qu’une des entreprises d’armement – non nommée – ne se montrait pas coopérative.
Lockheed Martin a produit jusqu’à présent plus de 900 F-35 et les a livrés à l’armée américaine ainsi qu’à des alliés comme l’Italie, l’Australie, le Danemark, les Pays-Bas, la Norvège, la Corée du Sud ou la Grande-Bretagne. Le Pentagone estime qu’il devra débourser 1700 milliards de dollars pour l’entretien des F-35 pendant leur durée de vie. Il s’agit de l’arme la plus chère de l’histoire de l’armée américaine.