Première édition d'un festival ambitieux
A Fribourg, la gauche ne digère pas la fondue géante

La première édition du Festival de la fondue a lieu de jeudi à dimanche au centre-ville de Fribourg. L'ambitieuse manifestation, au budget qui atteint le million de francs, fait l'objet de critiques de la gauche.
Publié: 17.11.2022 à 20:45 heures
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Dernière mise à jour: 18.11.2022 à 17:11 heures
Un dôme de 16 mètres de haut, chauffé au mazout, est installé sur la place Georges-Python de Fribourg. Les organisateurs espèrent y attirer des milliers de personnes d'ici à dimanche.
Photo: keystone-sda.ch
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Adrien SchnarrenbergerJournaliste Blick

Ah, les premiers frimas de fin novembre, les odeurs de marrons chauds et de cannelle du thé de Noël… Rien de tout cela à Fribourg, ce jeudi. Malgré les efforts sonores d'une ventilation, c’est un effluve âcre de fromage qui attaque le nez des passants au centre-ville, à proximité de la «Bûche».

«La Bûche»? Oui. Le Qatar a ses stades climatisés, Fribourg a sa «Bûche». Depuis plusieurs jours, ce dôme s’est fait une place de choix aussi bien sur la place Georges-Python que dans les courriers des lecteurs de «la Liberté», où certains s’étonnent de l’apparition de cette bulle de 16 mètres de hauteur, louée 200’000 francs pour quatre jours et chauffée au mazout, pour accueillir le premier Festival de la fondue. «J’espère qu’ils vont penser à couvrir les caquelons», ironise un lecteur.

Avec ses allures de serre géante, le dôme à fondue est aussi un défi architectural.
Photo: Keystone

«Nous en parlons depuis 2019. À ce moment, il n’y avait pas de crise énergétique», s’est défendue tant bien que mal l’entreprise propriétaire de l'objet qui ne laisse personne indifférent, à Fribourg. Deux pleines pages dans le quotidien fribourgeois avant même que le premier morceau de pain n'ait été trempé dans le fromage: jamais la «moitié-moitié» n’avait aussi bien porté son nom, tant elle divise dans son format «festival».

D’un côté, il y a les enthousiastes, à commencer par un certain Dominique de Buman. Après avoir présidé le Conseil national (2018, sous la bannière du Centre), l’ancien politicien a pris les commandes de ce projet, cogité depuis quatre ans. Les organisateurs ont vu grand: le budget atteint le million de francs, assumé en partie par des partenaires (Ville de Fribourg et les puissantes Interprofessions du Gruyère et du Vacherin).

«Tu (sic) penses être rentable?», a bruyamment demandé à travers un bus des TPF un homme ayant reconnu l'ancien élu parmi les passagers. «Avec 800 personnes midi et soir, ça ne devrait pas poser de problèmes», a rétorqué Dominique de Buman, un peu agacé d’être ainsi pris à partie. Pendant ce temps, les publicités pour l'événement se succédaient sur les écrans.

Dominique de Buman est le grand architecte de la manifestation.
Photo: Keystone

Si cette conversation — si l'on peut l’appeler ainsi — a été surprise par hasard par l’auteur de ces lignes, la controverse se fait avant tout sur la sphère publique. La gauche est particulièrement remontée: interrogé par «La Liberté», le conseiller général socialiste Marc Vonlanthen s’est dit «scandalisé» par le fait de chauffer un tel site alors que l’époque est à l'économie d'énergie.

Les Verts, outre leur ire d'avoir vu le marché hebdomadaire temporairement éjecté de sa traditionnelle place Georges-Python, s'étonnent du manque de consultation des pouvoirs publics face à une manifestation visiblement acceptée (et soutenue) en catimini. L'un des élus écologistes au Conseil général, Jean-Marie Pellaux, a interpellé le Conseil communal en ce sens. Si le dossier est brûlant — contrairement à la fondue Vacherin, qui se déguste tiède — c’est que l’organisateur officiel n’est autre que la Fédération patronale et économique.

À l'arrière-goût politique, la manifestation? Un détour à la «Bûche», ce jeudi d’ouverture, ne semble l'indiquer: on y trouvait l’influent propriétaire d’une chaîne de garages et surtout président de Gottéron, Hubert Waeber, mais aussi la conseillère aux États PLR Johanna Gapany, entre autres personnalités de la droite locale. L’espace de trois jours, Georges-Python est the place to be, fourchette à la main, pour le gratin économique fribourgeois.

La fondue se déguste sur place ou à l'emporter.
Photo: Keystone

Sur le plan médiatique, l’opération est aussi rondement menée. Dominique de Buman a fait la promotion de son festival jusque dans les puissants journaux dominicaux alémaniques (en tolérant même la présence d’ananas, à condition qu'il soit flambé), tandis que la RTS était en direct ce jeudi, sur ses réseaux sociaux, pour apprendre ce qui faisait une bonne fondue.

Les hôteliers de la région se disent, pour leur part, satisfaits de cet afflux de visiteurs dans une période creuse entre les vacances d’automne et Saint-Nicolas. Quid des gourmands? Les premiers amateurs de fromage croisés ce jeudi étaient enthousiastes, mais étonnés des tarifs proposés: 29 francs pour un adulte contre la promesse de pouvoir déguster «la meilleure fondue du monde». Ce qui n’empêche pas les places de s’arracher comme des petits pains (ou des pommes de terre, si vous préférez).

Le festival vise surtout des retombées positives «pour l’ensemble des acteurs économiques», ce qui justifie le soutien de différents acteurs de l’économie, du tourisme fribourgeois et de la Nouvelle Politique Régionale, un programme soutenu à moitié par la Confédération — l’Etat de Fribourg a, lui, débloqué 230'000 francs.

Le «Bouébot» (du patois bouèbo, garçon de chalet) est un robot qui est censé préparer la fondue parfaite.
Photo: Keystone

Espérons que la dégustation de «la recette qui met tout le monde d’accord» donne des ailes à l’économie fribourgeoise: après des années de remontée en flèche au classement de la péréquation financière, le canton se retrouve à une peu enviée antépénultième place, ne devançant que le Valais et le Jura, selon le classement diffusé la veille de l’ouverture de ce nouveau festival.

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Une fondue «jeune et urbaine»

Le festival, qui a connu une gestation de quatre ans, veut établir Fribourg en tant que capitale de la fondue. L'événement se tient sur l'emblématique place Georges-Python, dans une structure inédite de 16 mètres de haut appelée la Bûche et construite pour l'occasion. La fondue «moitié-moitié» est à déguster sur place ou à l’emporter.

La manifestation, qui se déroule en zone piétonnière, affiche un double objectif: sensibiliser les visiteurs à l’importance de la fondue «moitié-moitié» comme produit phare du canton de Fribourg ainsi qu'asseoir la notoriété de la fondue à base de Gruyère AOP et de Vacherin Fribourgeois AOP au-delà des frontières.

«C'est un lien populaire et historique», a indiqué à Keystone-ATS Dominique de Buman, président du comité d'organisation. Par rapport aux critiques émises quant à l'ampleur de l'infrastructure, l'ancien président du Conseil national et syndic de Fribourg a déploré de la jalousie et l'absence de proposition d'une alternative.

Le SFF s’est approché de plusieurs organisations reconnues en ville de Fribourg pour proposer un programme d’animations varié et tout public. Les organisateurs veulent démontrer que la fondue peut s’inscrire dans un univers «jeune et urbain» et ont mis sur pied un programme d’animations autour de la tradition et de la modernité.

Un robot à fondue

En complément, le robot à fondue Bouébot est présenté en Suisse pour la première fois, après avoir ravi les visiteurs du Salon de l’agriculture de Paris en fin d'hiver. Au rez-de-chaussée de la Bûche, le public peut accéder à une zone de dégustation avec 13 stands qui ne proposent pas moins d’une trentaine de fondues.

Le restaurant du premier étage offre plus de 150 places, avec en exclusivité de la fondue «moitié-moitié». Afin d’accueillir tous les visiteurs, un partenariat avec GastroFribourg et une quinzaine de restaurants des environs a été mis en place. L’Association «Suisse Fondue Festival» a par ailleurs été créée pour l’occasion.

L'entité doit permettre de pérenniser un événement qui se tiendra tous les deux ans. En amont du festival, mercredi, les Interprofessions du Vacherin fribourgeois et du Gruyère ont annoncé le lancement d'une marque figurative destinée à protéger désormais la dénomination fondue «moitié-moitié».

Le label veut promouvoir l'utilisation de la recette originale, soit 50% de Vacherin fribourgeois et 50% de Gruyère, tout en assurant une meilleure traçabilité. La décision a été prise en raison du recours toujours plus fréquent de la dénomination fondue «moitié-moitié» pour des produits qui n'utilisent pas les deux fromages AOP.

keystone-sda.ch

Le festival, qui a connu une gestation de quatre ans, veut établir Fribourg en tant que capitale de la fondue. L'événement se tient sur l'emblématique place Georges-Python, dans une structure inédite de 16 mètres de haut appelée la Bûche et construite pour l'occasion. La fondue «moitié-moitié» est à déguster sur place ou à l’emporter.

La manifestation, qui se déroule en zone piétonnière, affiche un double objectif: sensibiliser les visiteurs à l’importance de la fondue «moitié-moitié» comme produit phare du canton de Fribourg ainsi qu'asseoir la notoriété de la fondue à base de Gruyère AOP et de Vacherin Fribourgeois AOP au-delà des frontières.

«C'est un lien populaire et historique», a indiqué à Keystone-ATS Dominique de Buman, président du comité d'organisation. Par rapport aux critiques émises quant à l'ampleur de l'infrastructure, l'ancien président du Conseil national et syndic de Fribourg a déploré de la jalousie et l'absence de proposition d'une alternative.

Le SFF s’est approché de plusieurs organisations reconnues en ville de Fribourg pour proposer un programme d’animations varié et tout public. Les organisateurs veulent démontrer que la fondue peut s’inscrire dans un univers «jeune et urbain» et ont mis sur pied un programme d’animations autour de la tradition et de la modernité.

Un robot à fondue

En complément, le robot à fondue Bouébot est présenté en Suisse pour la première fois, après avoir ravi les visiteurs du Salon de l’agriculture de Paris en fin d'hiver. Au rez-de-chaussée de la Bûche, le public peut accéder à une zone de dégustation avec 13 stands qui ne proposent pas moins d’une trentaine de fondues.

Le restaurant du premier étage offre plus de 150 places, avec en exclusivité de la fondue «moitié-moitié». Afin d’accueillir tous les visiteurs, un partenariat avec GastroFribourg et une quinzaine de restaurants des environs a été mis en place. L’Association «Suisse Fondue Festival» a par ailleurs été créée pour l’occasion.

L'entité doit permettre de pérenniser un événement qui se tiendra tous les deux ans. En amont du festival, mercredi, les Interprofessions du Vacherin fribourgeois et du Gruyère ont annoncé le lancement d'une marque figurative destinée à protéger désormais la dénomination fondue «moitié-moitié».

Le label veut promouvoir l'utilisation de la recette originale, soit 50% de Vacherin fribourgeois et 50% de Gruyère, tout en assurant une meilleure traçabilité. La décision a été prise en raison du recours toujours plus fréquent de la dénomination fondue «moitié-moitié» pour des produits qui n'utilisent pas les deux fromages AOP.

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