C’est presque un rituel: quand les relations avec l’UE sont particulièrement tendues, le ministre suisse des Affaires étrangères se rend dans les capitales des pays voisins pour calmer le jeu. C’était déjà ce qui s’était passé après le oui à l’initiative sur l’immigration de masse en 2014, lorsque Didier Burkhalter avait fait un pèlerinage à Berlin et à Paris pour expliquer le référendum à ses voisins consternés. Et c’est donc aussi ce qu’a fait le ministre des Affaires étrangères Ignazio Cassis ces dernières semaines pour tenter d’expliquer à ses homologues de Paris, Vienne et Berlin la décision du Conseil fédéral de rompre les négociations sur l’accord-cadre.
Pas de plan B en vue
Mais si le Conseil fédéral sait ce qu’il ne veut pas, il ne sait pas pour autant ce qu’il pourrait proposer concrètement à l’UE pour remplacer l’accord-cadre. Cette absence de plan B n’a pas empêché le ministre des Affaires étrangères de se rendre à Bruxelles mardi dans le cadre de son mini-tour d’Europe. Il s’agit de sa première visite officielle depuis son entrée en fonction il y a quatre ans.
Ceux qui s’attendaient à une réunion très médiatisée ont de quoi être déçus. Ce n’est pas un secret: l’UE n’annoncera pas avant l’automne la manière dont elle entend régler ses relations avec la Suisse à l’avenir. Personne ne sait encore qui sera responsable de ce dossier du côté de l’Union Européenne.
Au vu de cette situation, Ignazio Cassis a rencontré le commissaire européen Johannes Hahn, personne de contact de longue date de la Suisse quand il s’agit de l’UE. Une réunion avec Josep Borrell, représentant de l’UE pour les affaires étrangères, était également à l’ordre du jour. Mais les relations bilatérales entre la Suisse et l’Union européenne n’ont pas été clairement mises sur la table: seules des questions internationales telles que la situation en Libye ont été traitées.
Les ennuis sont loin d’être terminés
Un point positif toutefois, du moins en apparence: Lukas Mandl, le parlementaire européen qui rédigera le rapport sur les relations avec la Suisse dans les prochaines semaines, a eu quelques mots agréables sur les liens entre notre pays et l’UE. Dans le passé, nous avons accordé trop d’attention à ce qui nous séparait et trop peu à ce que nous avions en commun, a-t-il écrit après la réunion. «Pourtant, nous avons bien plus en commun», a-t-il conclu.
Mais ces caresses verbales ne sont guère représentatives de l’attitude des représentants de l’UE à l’égard de Berne. Les retombées de la colère suscitée par la rupture soudaine des négociations sont loin d’être terminées.
Le «small talk» ne suffit pas
Andreas Schwab, chef de la délégation suisse au Parlement européen, s’exprime ainsi: «La position de la Suisse n’est pas claire pour moi. Voilà pourquoi je ne comprends pas bien ce que ce voyage de bienveillance est censé apporter.»
Il est toujours bon de discuter. Mais le véritable rôle de la Suisse est d’être l’un des principaux partenaires économiques, et c’est ce qui aurait dû primer. «Ces discussions de courtoisie n’ont pas vraiment leur place», s’agace Andreas Schwab. «Une petite conversation légère ne va pas suffire à recoller les morceaux entre l’UE et la Suisse.» Il faudra donc du concret.
Des propositions de solutions doivent être mises sur la table
Mais l’entourage de Cassis voit les choses différemment. Chaque conversation avec les membres de la Commission européenne serait utile pour expliquer pourquoi le Conseil fédéral a mis fin aux négociations sur l’accord-cadre, et pour évoquer l’idée d’un dialogue politique avec l’UE.
En outre, le but du voyage d’Ignazio Cassis à Bruxelles était de visiter l’ambassade de Suisse et sa nouvelle direction. Ensemble, ils ont essayé de trouver comment un dialogue politique avec l’UE pourrait être façonné.
Au final, beaucoup de discussions, mais peu de substance: ces dépenses ont-elles été réellement bénéfiques? Une chose est claire: pour réparer les relations avec l’UE, quelques belles paroles du ministre suisse des Affaires étrangères ne suffiront pas lors des prochaines réunions – des propositions concrètes de solutions devront être avancées.