Michaël Buffat, candidat de l'Union démocratique du centre (UDC) vaudoise au Conseil des États, est visé par des accusations de violence domestique, assure ce samedi 7 octobre le site Heidi.news. Le pureplayer du bout du Léman se base sur les témoignages de quatre sources anonymes, affirmant que l'épouse du conseiller national aurait récemment séjourné dans un centre pour victimes de violences conjugales du canton de Vaud. L'élu nie en bloc. Contactée par Blick, sa femme, dont il est aujourd'hui séparé, ne souhaite pas s'exprimer. Son entourage non plus.
Impossible, à l'heure actuelle, de confirmer ou d'infirmer que ces assertions sont fondées. La présomption d'innocence s'applique. Quoi qu'il en soit, et indépendamment de ce cas, il est toujours difficile pour une victime de prendre la parole, d'autant plus si l'affaire concerne une personnalité publique. Et donc, abondamment commentée par les médias et le public.
Alors, comment réussir à rompre le silence? Ne souhaitant pas s'exprimer sur l'affaire de l'UDC vaudois qui défraie actuellement la chronique, Sonia Grimm prend de la hauteur et livre à Blick son expertise. La célèbre Genevoise, auteure-compositrice-interprète, a fondé l'association Parle-Moi, qui soutient les victimes de violences et de harcèlement, notamment au travers de conférences et de spectacles. Il y a quelques années, la chanteuse pour enfants avait fendu l’armure dans les pages de «L'Illustré». Elle y racontait son calvaire auprès d'un homme violent. Interview.
Sonia Grimm, dénoncer des violences conjugales, est-ce plus difficile lorsqu'on est scrutée par la presse et le public?
Cela peut susciter de la peur chez la victime. Ce qu'un manipulateur aime le moins, c'est que son petit jeu soit mis à jour. C'est une honte publique pour lui, qui peut susciter de l'agressivité et une envie de vengeance de sa part. On s'attaque déjà à quelqu'un qui nous fait peur. Il y a une vraie mise en danger. Moi-même, en tant que victime à l’époque, je ne voulais pas en parler publiquement parce que j’avais peur pour ma vie.
Les victimes qui dévoilent ce qui leur arrive risquent des représailles?
Oui, mais inversement, une fois que c'est connu, s'il se passe quelque chose, on sait que c'est lui. Il n'a pas intérêt à trop bouger. En revanche, la victime doit tout prouver, sinon on peut être visée par des plaintes pour calomnie ou diffamation. La grande majorité des victimes est ainsi vouée au silence. Dans mon cas, j'ai pu en parler, car il avait avoué et avait été condamné. C'était donc d'autant plus important de le faire, au nom de toutes celles qui ne peuvent pas.
Pour vous, est-il plus important de dénoncer des actes de violence domestique, ou d'éviter aux victimes l'épreuve supplémentaire de devoir raconter leur histoire au monde?
Pour moi, c'est indispensable d’en parler. Le nombre de femmes qui m’ont contactée après l'article de «L'Illustré», et le livre que j'ai publié, vous n'imaginez même pas. Aujourd'hui, il n'y a aucune volonté politique de régler les problèmes de violence envers les femmes et de harcèlement scolaire. On ne touche jamais au fond du problème, qui est un problème de société.
Comment faire pour faire juste?
Il faut ouvrir les consciences des gens sur notre mode de vie qui n'encourage pas du tout à se connaître soi-même et à connaître ses émotions. On devient souvent violent parce qu'on a été brisé ou maltraité, enfant, puis on pète un plomb et on devient bourreau. C'est très dangereux de se sentir victime, lésée par la société, la vie. Une recherche sur les hommes violents a montré que la grande majorité d'entre eux se justifiait en disant: «J'ai été poussé à bout».
Faut-il donc inciter les victimes à s'exprimer pour briser ce cercle vicieux?
Forcer une victime à parler, ça n'est pas souhaitable. Il faut être là pour l'écouter quand elle en a besoin, la recevoir dans sa souffrance. C'est indispensable de se sentir validée par quelqu'un qui dise: «Ce que tu as subi n'est pas possible, c'est de la violence». Le fait d'être entendu est généralement une étape dans la reconnaissance de ce qu'on a vécu. Quand on a été sous l'emprise mentale d'une personne, on ne sait plus ce qui était acceptable ou non, si ce n'est pas un peu notre faute, si c'était grave ou normal.
On perd contact avec la réalité?
On est complètement biaisée. On s'habitue à tout, vous savez. Tout arrive petit à petit, tout devient toujours un peu plus tolérable, c'est comme ça qu'on glisse vers quelque chose de violent. Si on jette une grenouille dans une marmite d'eau bouillante, elle saute pour sa vie. Si on la met dans l'eau froide qui devient doucement plus chaude, elle peut mourir.
À quoi peuvent s'attendre les personnes qui choisissent, comme vous, de briser le silence?
Il peut y avoir un sentiment de honte. C'est la personne violente qui devrait ressentir ça, mais beaucoup de victimes ont honte, surtout si elles sont pudiques. Voir son intimité dévoilée dans les médias, savoir que toutes les personnes qui connaissent le couple reconnaissent tout de suite l'époux ou l'épouse incriminée, cela peut être dur. On s'expose à des remarques du type: «Mais pourquoi tu n'es pas partie?» Sous-entendu: «Mais t'es bête, ou quoi?». On a honte de s'être soumise.
Avez-vous reçu de telles remarques?
Je n'ai eu que des messages de soutien et de remerciement, d'hommes comme de femmes. Les gens étaient super reconnaissants. Il y a un vrai problème de silence sur ces sujets. L'emprise mentale, la manipulation, la violence… En sortir est un soulagement. Après, on veut juste avoir la paix, ne pas remettre de l'huile sur le feu et risquer des plaintes ou des représailles du bourreau. Si une victime parle à la presse, il est essentiel que ses propos soient respectés méticuleusement, et qu'elle se retrouve complètement dans son témoignage.