Les riverains alertés
Une décharge valaisanne déverse de l'amiante sur un talus, son patron se défend

A Ried-Brig, en Valais, une décharge a entassé des plaques contenant de l'amiante dans un talus, sans la moindre protection, mettant les riverains en état d'alerte. Le chef de l'entreprise reconnait une erreur… mais rejette la faute sur un collaborateur.
Publié: 11:01 heures
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Dernière mise à jour: 11:06 heures
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L'année dernière, des plaques de toit non emballées contenant de l'amiante se sont soudainement retrouvées sur la décharge de Moos à Ried-Brigue.
Photo: zVg
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Martin Meul

Personne ne veut d'une décharge devant sa porte. Surtout pas lorsque des substances toxiques et dangereuses comme l'amiante y sont répandues. Les fibres d'amiante sont dangereuses pour la santé et peuvent, dans le pire des cas, déclencher un cancer. Jusqu'à 150 personnes meurent chaque année des suites d'un contact avec l'amiante.

C'est pourquoi le stockage de l'amiante est soumis à des règles strictes: le matériau doit être emballé afin que les fibres dangereuses ne se propagent pas. Mais des recherches de Blick le montrent: à la décharge de Moos à Ried-Brig, en Valais, on ne fait pas trop attention à cela.

Des déchets pleins d'amiante à l'air libre

Durant l'automne 2024, des riverains remarquent quelque-chose d'anormal dans la décharge gérée par l'entreprise Theler AG. Des plaques d'Eternit, qui contiennent souvent de l'amiante, entassées dans un talus à l'air libre. Une situation qui semblent confirmée par les images que Blick a pu consulter.

Pour le Forum Amiante Suisse, le constat est sans appel. «La mise en décharge ouverte, sans emballage, de déchets contenant de l'amiante ne correspond pas aux directives de la protection de l'environnement», explique l'expert en amiante Martin Gschwind. Le fait d'entreposer des produits plein d'amiante dans un talus, comme cela est le cas dans la décharge valaisanne, est tout autant interdit.

Les échantillons prélevés à différents endroits de la décharge par des riverains confirment bel et bien la présence de ce poison. Sur les huit échantillons étudiés, sept sont contaminés, cinq le sont même massivement.

«Ils gagnent de l'argent en empoisonnant notre paysage!»

Début décembre 2024, une plainte atterrit sur le bureau de Christine Genolet-Leubin, la responsable de l'environnement du canton du Valais. Plusieurs riverains demandent que des mesures soient prises immédiatement. Il est question de menace considérable pour la sécurité publique». «Ils gagnent de l'argent en empoisonnant notre paysage!», déclare Andreas B.*, l'un des riverains, à Blick.

A la mi-janvier, Christine Genolet-Leubin répond à la plainte. «Les faits décrits nous sont connus et nous sommes déjà en contact avec le propriétaire de la décharge concernant les mesures à prendre», écrit la responsable, qui n'en dit alors pas plus. «Les mesures nécessaires de lutte contre la poussière seront mises en œuvre sur le site mentionné. Les évolutions de ces dernières années ont été positives, et en ce qui concerne la situation constatée en 2024, nous sommes déjà en contact avec le propriétaire de la décharge», écrit-elle à Blick.

«C'était faux»

Et que pense l'entreprise Theler de cette affaire? Renzo Theler, directeur de la firme, admet que des erreurs ont été commises. «En novembre 2024, plusieurs sacs de déchets minéraux contenant de l'amiante lié ont été livrés, explique-t-il. Certains d'entre eux ont été poussés en bas de la pente par un collaborateur suite à un malentendu. Ce n'était pas bien.» 

Il l'assure: sitôt l'erreur constatée, les collaborateurs de la décharge ont veillé à ce que les matériaux soient maintenus humides afin d'éviter la propagation de fibres d'amiante. «Le matériau a ensuite été recouvert dans les règles de l'art.» A ce propos, Christine Genolet-Leubin déclare: «La situation concernant la manipulation des déchets contenant de l'amiante fait l'objet de la procédure en cours.

La société Theler AG veut éviter à l'avenir de répéter erreurs commises l'année dernière. «A la fin de l'année 2024, nous avons donc décidé d'introduire un nouveau processus pour la réception des matériaux contenant de l'amiante, explique Renzo Theler. Par exemple, la réception des déchets d'amiante ne se fera plus que sur rendez-vous.»

Plus aucun risque pour les riverains

Le canton et la société Theler AG soulignent qu'il n'y a plus aucun risque pour la santé des riverains et des employés de la décharge. Un point de vue partagé par Martin Gschwind du Forum Amiante. «Malgré une éventuelle libération d'amiante, le risque pour la santé des personnes est très faible, car la décharge se trouve à l'air libre», explique-t-il.

Cela ne rassure pas du tout le riverain Andreas B.: «Nous exigeons que toute la lumière soit faite sur tout ce qui ne va pas à la décharge de Moos!» Il faut dire que ce n'est pas la première fois que la société Theler AG fait la une des journaux pour des délits environnementaux présumés.

L'année dernière, Blick rapportait que l'eau sale de ses bétonnières avait peut-être contaminé les sols. En 2021, le «Walliser Bote» révélait également que l'entreprise de construction avait jeté des déchets de béton directement dans le Rhône.

* Nom modifié

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