La bataille fait rage à Saint-Aubin, à Fribourg: Micarna, filiale de Migros, veut y ouvrir un abattoir de volailles qui remplacera au plus tard en 2028 l'abattoir vieillissant de Courtepin, situé à proximité.
Les opposants au projet veulent le combattre «jusqu'au bout», comme l'affirme par exemple le Vert Vincent Beuret à Blick. Or, cela pourrait entraîner de gros problèmes au niveau de l'approvisionnement de poulet.
La consommation de poulet en hausse
«Nous risquons de nous retrouver face à une pénurie d'approvisionnement en Suisse», déclare Adrian Waldvogel, président de l'Association suisse des producteurs de volaille (ASPV) et lui-même éleveur de poulets de chair, à la «NZZ am Sonntag».
Le problème: la consommation de poulet ne cesse d'augmenter en Suisse. Le poulet reste abordable contrairement à d'autres viandes et a aussi la réputation d'engendrer moins de problèmes environnementaux que la viande de porc ou de bœuf. C'est justement la volonté de consommer plus durable qui attire les gens.
L'année dernière, les Suisses ont mangé environ 14,7 kilos de poulet par habitant. C'est plutôt peu en comparaison internationale. Mais les chiffres parlent d'eux-mêmes: en 2016, nous ne mangions que 12 kilos de poulet. Et rien que cette année, la production nationale de poulet a encore augmenté de 6% jusqu'en août.
Mais les consommateurs ont des critères: la majorité souhaite surtout acheter du poulet d'origine suisse. La part de viande de volaille produite en Suisse ne cesse ainsi d'augmenter dans les rayons, se situant actuellement à environ 66%. Mais malgré l'augmentation de la productivité dans les exploitations, la branche n'arrive pas à suivre la demande, soutient Adrian Waldvogel. Une augmentation du quota d'importation ne remédierait pas au problème, puisque c'est le poulet suisse qui est souhaité en premier lieu.
Changer de cap alimentaire
Selon le magazine agricole «UFA Revue», cela s'explique par le fait que l'élevage de volailles est plus réglementé en Suisse, ce qui favorise la confiance des consommateurs. En comparaison internationale, les poulets suisses bénéficient de beaucoup plus d'espace, d'une alimentation sans organismes génétiquement modifiés (OGM) et, dans la plupart des cas, d'une zone extérieure.
Mais pour les opposants de l'abattoir de Saint-Aubin, il faut voir plus loin. Leur combat est motivé par un changement de cap alimentaire, qui implique de réduire au maximum la consommation de viande. Le fait que la consommation de bœuf et de porc stagne n'est pas un argument valable. Selon eux, les substituts de viande restent un marché de niche.
Le consommateur devrait changer de mentalité. Mais tant que ce n'est pas le cas et que la consommation de poulet continue d'augmenter, les actions politiques à l'image de celle de Saint-Aubin, qui pourraient avoir un impact sur la production de poulet, ne devraient pas être très populaires.