Sa suppression est envisagée
Les cantons suisses-alémaniques en ont ras-le-bol du français à l'école!

L'apprentissage du français dans les écoles suisse-allemandes est sur la sellette. Les enseignants tirent la sonnette d'alarme au sujet des enfants surchargés et de plus en plus de cantons veulent supprimer son enseignement à l'école primaire.
Publié: 09:00 heures
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Dernière mise à jour: 09:03 heures
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L'apprentissage du français à l'école primaire est sur la sellette dans de nombreux cantons suisse-allemand.
Photo: Keystone
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Nastasja Hofmann

Le Röstigraben va-t-il avoir raison des cours de français dans les écoles primaires suisse-allemandes? C'est en tout cas le cas en Appenzell Rhodes-Extérieures depuis le mois de mars. D'autres cantons pourraient bientôt suivre la même voie.

L'enseignement du français est sur la sellette. Plusieurs interventions en ce sens ont été déposées dans presque tous les cantons alémaniques. La politique de l'éducation est soumise à une forte pression: l'apprentissage du français à l'école est-il donc voué à disparaître?

Patrick Keller fait partie de ceux qui s'expriment ouvertement sur le sujet. Le président de l'association cantonale des enseignants de Saint-Gall estime qu'il faut faire le bilan et vérifier s'il existe de meilleures solutions. «La situation actuelle n'est pas satisfaisante», juge-t-il.

Une surcharge pour les élèves?

En Suisse alémanique, l'apprentissage des langues étrangères commence très tôt. La première d'entre elles intègre l'emploi du temps des élèves dès la 3e année, et une deuxième suit à partir de la 5e année. «Les enfants sont en partie surchargés», explique Patrick Keller.

Par son quotidien professionnel en tant que professeur de français dans un collège, il sait que la deuxième langue étrangère représente pour beaucoup un obstacle supplémentaire de taille. L'anglais étant prioritaire dans de nombreux cantons suisses alémaniques, cela retombe donc souvent sur le français.

Quand les politiques s'en mêlent

De plus en plus de politiciens y voient également des problèmes. Le PLR en particulier s'attaque à l'apprentissage précoce des langues étrangères. De son point de vue, aucune langue étrangère ne devrait être enseignée au niveau primaire. La première langue nationale doit d'abord être enseignée correctement avant d'en ajouter une deuxième ou une troisième. C'est ce qu'on peut lire dans une prise de position datant de 2024.

Depuis, le débat sur l'enseignement des langues semble avoir repris de plus belle. Thurgovie, Schwytz, Berne, Argovie, Lucerne, Saint-Gall: la liste des cantons qui envisagent de réformer l'apprentissage scolaire du français est longue. Mais pourquoi cette forme d'apprentissage des langues a-t-elle été introduite, si tant de gens s'y opposent aujourd'hui?

La Conférence des directeurs cantonaux de l'instruction publique (CDIP) a défini cette stratégie linguistique en 2007 dans le cadre du concordat Harmos. Cet accord constitue la base du programme scolaire 21, dont l'objectif était d'uniformiser la scolarité obligatoire dans tous les cantons. Il a été décidé que deux langues étrangères seraient enseignées dans tout le pays à partir de l'école primaire – une langue nationale et l'anglais.

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Tous les élèves doivent être en contact avec la deuxième langue nationale
Patrick Keller, président de l'association cantonale des enseignants de Saint-Gall
»

Plusieurs solutions possibles

L'association des enseignants de Saint-Gall se dit ouverte à la discussion. Son président Patrick Keller a même plusieurs solutions en réserve: «On pourrait par exemple déplacer l'enseignement du français au niveau supérieur ou simplement proposer le français à l'école primaire comme matière à option pour les élèves plus forts.»

Cependant, Patrick Keller n'envisage pas de suppression complète des cours de français. «Tous les élèves doivent être en contact avec la deuxième langue nationale», affirme-t-il.

Le représentant des enseignants saint-gallois tient également à ce que l'harmonisation entre les cantons soit maintenue. «Pour nous, en tant qu'association, il est important qu'Harmos reste en vigueur», déclare Patrick Keller. Un tohu-bohu général, où chaque canton adopterait sa propre solution, ne ferait qu'engendrer de nouveaux problèmes.

«Une menace pour l'équilibre linguistique»

Certaines voix s'élèvent toutefois avec véhémence contre les évolutions actuelles de la politique de l'éducation. Ainsi, quatre organisations ont publié une prise de position commune à la fin de la semaine dernière: le Forum pour le bilinguisme, le Forum Helveticum, Helvetia Latina et Coscienza Svizzera. Elles demandent aux cantons et aux instances éducatives «le maintien de l'enseignement d'une deuxième langue nationale au niveau primaire dans tous les cantons suisses».

Les organisations insistent surtout sur le français comme langue nationale, et non sur l'apprentissage précoce des langues étrangères en général. Elles argumentent que l'apprentissage du français est décisif pour la cohésion nationale. «La remise en question répétée de l'enseignement du français par différents cantons germanophones constitue une menace pour l'équilibre linguistique et la stabilité de l'Etat fédéral», préviennent-elles.

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