Les études se contredisent
Quelle est l'étendue réelle de la violence domestique?

Près d'une femme sur deux a déjà été victime de violence au sein de son couple, affirmait une étude Sotomo en novembre. De nouvelles recherches arrivent à des résultats bien inférieurs.
Publié: 12.01.2022 à 06:20 heures
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Dernière mise à jour: 12.01.2022 à 08:33 heures
Insultes, coups, terreur psychologique: ce sont majoritairement les femmes qui sont victimes de violence dans les relations de couple.
Photo: Keystone
Guido Schätti

Les chiffres ont de quoi choquer: près d'une femme sur deux a déjà été victime de violence dans les relations de couple. C'est ce qu'a révélé une étude de l'organisation faîtière des maisons d'accueil pour femmes (DAO Frauenhäuser) en novembre.

L'enquête, menée par l'institut zurichois Sotomo, a fait les gros titres des journaux et des portails d'information (y compris de Blick). Les articles relevaient la nécessité urgente de débloquer davantage de fonds publics pour lutter contre la violence envers les femmes.

Une nouvelle étude suggère à présent que ces chiffres sont gonflés. Selon la Haute école zurichoise des sciences appliquées (ZHAW), à peine 3% des femmes ont fait l'expérience de la violence physique dans les relations de couple en 2021. Si l'on y ajoute la violence psychique, ce chiffre atteint 13,4%. Le quotidien zurichois «Tages-Anzeiger» a été le premier à rendre compte de cette étude.

Trois facteurs ont gonflé les chiffres de Sotomo

Derrière les résultats contradictoires se cachent des méthodes différentes. Dirk Baier, chercheur à la ZHAW, a choisi pour son étude un échantillon représentatif de 18'686 personnes et a envoyé des invitations à participer.

L'enquête Sotomo, en revanche, était ouverte à tous, les personnes étant recherchées via des portails en ligne. «Cela incite principalement des personnes qui ont des expériences à raconter à participer, ce qui fait grimper les taux», critique Dirk Baier.

A cela s'ajoute le fait que l'étude Sotomo ne précise pas ce qu'est la violence. Des insultes au viol, tout a été mis dans le même panier.

Le troisième facteur qui explique la différence de chiffres est l'absence de limite temporelle. Sotomo compte aussi les expériences de violence qui remontent à 30 ans. Pour Dirk Baier, «cela augmente les taux, mais donne un éclairage partiellement erroné sur la situation actuelle».

Modeste, Dirk Baier admet que sa propre étude est loin d'être parfaite. «En raison de la méthodologie, je suppose toutefois que les résultats de notre étude reflètent actuellement un peu mieux la réalité que l'étude Sotomo.»

Ikea paie la campagne d'affichage

Sarah Bütikofer, auteure de l'étude Sotomo, conteste que le choix de la méthode ait été guidé par des considérations politiques: «nous n'avions aucune attente quant aux résultats». La secrétaire générale de la DAO Frauenhäuser, Lena John, affirme également que «cette étude n'avait aucune intention politique».

L'étude Sotomo a été financée par le Bureau fédéral de l'égalité à hauteur de 120'000 francs. Les coûts de la campagne d'affichage ont été pris en charge par le distributeur de meubles Ikea. L'étude de novembre n'était qu'un début: une deuxième enquête est prévue pour le printemps.

(Adaptation par Jocelyn Daloz)

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