Le retour du chaos administratif?
Les cantons pourraient payer pour les tests anti-Covid et grincent déjà des dents

La Confédération en a assez de payer pour les tests Covid. Ce seront bientôt les cantons qui seront responsables de leur financement. Ceux-ci craignent des coûts élevés, mais aussi un grand chaos administratif entre eux.
Publié: 28.04.2022 à 12:00 heures
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Dernière mise à jour: 28.04.2022 à 17:00 heures
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La Confédération ne veut plus supporter elle-même les coûts des tests Covid. A partir de 2023, les cantons devront prendre le relais.
Photo: Keystone
Daniel Ballmer

Les cantons sont-ils à nouveau sur le point de faire bloc face à la Confédération au sujet de la gestion de la pandémie de Covid-19? La pomme de la discorde: le prix des tests, que le Conseil fédéral veut allouer aux cantons, qui craignent le retour d'un grand chaos administratif.

La plupart des dispositions de la loi Covid-19 expirent à la fin de l'année. Le Conseil fédéral veut faire prolonger certains points jusqu'à la mi-2024, notamment en prévision d'une possible prochaine vague de Covid, qui pourrait arriver dès l'automne.

Afin de conserver une vue d'ensemble de l'évolution de la pandémie, l'État continue à payer pour les tests Covid. Mais le Conseil fédéral propose qu'à partir de 2023, les cantons prennent en charge ces coûts et veillent à ce que l'offre soit suffisante.

Pour la Confédération, les tests sont essentiels pour la protection des personnes vulnérables et participent au bon fonctionnement des services de santé. Toutefois, les cantons devront pouvoir déterminer eux-mêmes quels tests ils financent. La Confédération ne veut plus faire que des recommandations.

Les cantons craignent un patchwork de solutions

Certains cantons craignent désormais que cette mesure ne conduise à un patchwork de solutions. «Je partage la crainte que cette décision mette en péril la stratégie de dépistage qui a été couronnée de succès jusqu'à présent», déclare le président de la Conférence suisse des directeurs cantonaux de la santé (CDS) Lukas Engelberger.

Chaque canton pourra à l'avenir décider lui-même quels tests seront remboursés et à quelles conditions. «Il devrait y avoir de grandes différences», prédit Lukas Engelberger. Il ne faut pas vraiment s'attendre à une stratégie uniforme des 26 cantons, la compétence étant souvent du ressort des parlements cantonaux.

Une facture à un milliard

Lukas Engelberger se montre cependant critique. «Si la Confédération se retire de la sorte, je vois de plus gros problèmes pointer à l'horizon, a déclaré le président de la CDS. Il sera plus difficile d'avoir une vue d'ensemble sur l'évolution de la pandémie. La Suisse se privera d'un instrument important dans la lutte contre le virus.»

Les coûts des tests semblent être la raison pour laquelle le Conseil fédéral a pris sa décision. C'est en tout cas ce que pensent plusieurs représentants cantonaux. «Les coûts sont estimés à environ un milliard de francs», révèle Lukas Engelberger. La charge devrait être de même importance pour les cantons.

Alain Berset contre Ueli Maurer

Même le ministre de la Santé Alain Berset se serait opposé cette modification, selon des sources proches du Conseil fédéral. Il aurait voulu conserver la souveraineté de la Confédération afin de garantir une gestion aussi efficace que possible de la pandémie. Toutefois, des membres du gouvernement soucieux des coûts, comme le ministre des Finances Ueli Maurer, se seraient imposés dans les discussions.

Les cantons, les commissions parlementaires et les partenaires sociaux ont désormais jusqu'au 9 mai pour se prononcer sur la proposition. Le Conseil fédéral prendra ensuite une décision définitive avant la session d'été, en juin.

«Je m'attends à ce que les cantons se prononcent majoritairement contre cette proposition», déclare Lukas Engelberger. Le rejet pourrait bien avoir lieu en bloc, tous les représentants cantonaux étant convaincus qu'il faudrait trouver une meilleure solution.

(Adaptation par Alexandre Cudré)

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