En Suisse, une commission d'enquête parlementaire (CEP) n'est instituée que si quelque chose de grave s'est produit. Jusqu'à présent, seules quatre CEP avaient été mises en place. Mais la chute de Credit Suisse le 19 mars 2023 et son rachat in extremis par l'UBS ont changé la donne.
Le 8 juin 2023, soit près de 3 mois après cette débâcle, une commission d'enquête – la cinquième de l'histoire – a donc logiquement été chargée de faire la lumière sur cet événement qui a plongé la place financière suisse, mais aussi le pays tout entier, dans un état de choc.
C'est peu dire que les attentes à l'égard de la CEP sont élevées. Ce vendredi, celle-ci doit présenter les conclusions de son rapport. Mais qui sont les «enquêteurs» chargés d'analyse le fiasco de Credit Suisse? Qui doit trembler? Où sont les responsables de la banque déchue dans tout ça? Blick répond aux principales questions
Qui sont les «enquêteurs» de la CEP?
Les parlementaires viennent de passer plus d'un an à enquêter sur les événements qui ont abouti à la triste journée du 19 mars 2023. C'est la conseillère aux Etats Fribourgeoise Isabelle Chassot (Le Centre) qui a présidé la commission. La vice-présidencee est, elle, revenue la conseillère nationale saint-galloise Franziska Ryser (Les Vert-e-s).
Parmi les enquêteurs, on compte six conseillers aux Etats: Andrea Caroni (PLR/AR), Maya Graf (Les Vert-e-s/BL), Daniel Jositsch (PS/ZH), Matthias Michel (PLR/ZG), Werner Salzmann (UDC/BE) et Heidi Z'graggen (Le Centre/UR). Six conseillers nationaux complètent l'équipe: Beat Flach (PVL/AG), Alfred Heer (UDC/ZH), Thomas Matter (UDC/ZH), Leo Müller (Le Centre/LU), Daniela Schneeberger (PLR/BL) et, enfin Roger Nordmann (PS/VD), le seul Romand de l'équipe, hormis la présidente.
Tous sont des poids lourds de la politique avec une longue expérience sous la coupole fédérale. Leur nomination au sein de cette commission n'a donc rien d'anodin.
Qui doit trembler?
Un panel bien garni compose le «banc des accusés». Parmi eux, on trouve le Conseil fédéral, la Banque nationale suisse (BNS), ou encore l'Autorité de surveillance des marchés financiers (Finma), dont l'incapacité à agir face aux dérives de Credit suisse a suscité de nombreuses accusations.
L'attention des enquêteurs s'est portée d'une part sur défaillance institutionnelle de ces autorités, mais aussi sur la question de savoir si leurs plus hauts responsables ont tout fait pour éviter la chute du géant bancaire suisse. A ce titre, on suppose que la CEP s'est intéressée tout particulièrement à l'ancien ministre des Finances Ueli Maurer, à sa successeure Karin Keller-Sutter, à l'ex-président de la BNS Thomas Jordan, et à la présidente de la Finma Marlene Amstad .
Parmi les autres «accusés», pour rester dans la métaphore, on trouve également la régulation Too big to fail (Trop gros pour faire faillite). Développé spécialement pour faire face aux difficultés d'une grande banque, cet outil a laissé la Suisse dans la fausse certitude qu'une grande banque pouvait être liquidée sans qu'il n'y ait de tremblement de terre sur les marchés financiers ni d'entraves graves à l'économie suisse, par exemple dans le trafic des paiements.
La CEP est donc sommée d'expliquer les raisons pour lesquelles la régulation Too big to fail n'a pas été appliqué dans le cas de cette débâcle et d'identifier les points d'amélioration possibles.
Et les ex-dirigeants de Credit Suisse dans tout ça?
S'il y en a qui n'ont rien à craindre, ce sont bien les anciens dirigeants de Credit Suisse. La CEP est un organe politique qui n'a pas la possibilité d'intervenir dans l'économie privée. Les deux anciens présidents de la banque, Urs Rohner et Axel Lehman, ont apparemment été priées de se présenter devant la commission, tout comme les anciens CEO Thomas Gottstein et Ulrich Körner. Mais ça s'arrête là. On ne sait d'ailleurs pas si d'autres responsables de la banque ont été mis en cause.