Le peuple suisse l'a décidé en mars dernier: les retraités auront droit à un 13e rente AVS. Si son approbation a été facile, sa mise en application fait encore défaut – notamment son financement. Car de grosses sommes sont en jeu: la conseillère fédérale Elisabeth Baume-Schneider devra se débrouiller pour mettre la main sur 4 à 5 milliards de francs chaque année. La magistrate socialiste penche pour un financement par des pourcentages salariaux supplémentaires, éventuellement combinés à une augmentation de la TVA. Les partis ont encore jusqu'au 5 juillet pour se prononcer sur les différentes possibilités.
Mais tout le monde n'est pas d'accord. Sans surprise, un clivage gauche-droite se dessine déjà. L'Union démocratique du centre (UDC) ne veut pas entendre parler de pourcentages salariaux supplémentaires, souligne le président du parti Thomas Aeschi à Blick. L'élu n'entend pas clarifier le financement de la 13e rente avant la prochaine réforme de l'AVS prévue pour 2026.
Le Parti libéral-radical (PLR) n'est pas non plus pressé: il s'oppose catégoriquement à des pourcentages supplémentaires sur les salaires pour ne pas peser sur le porte-monnaie de la population active, argumente-t-on. «La classe moyenne qui travaille serait la plus touchée, en particulier les jeunes familles, dont le pouvoir d'achat en pâtirait, dénonce le PLR. Au lieu de décider sans cesse de nouveaux impôts et taxes, il faut une réforme structurelle de l'AVS.» Pour les libéraux-radicaux, un relèvement de l'âge de la retraite est nécessaire.
Pour des pourcentages salariaux plus élevés
À gauche, le ton est tout autre: «Attendre la prochaine réforme de l'AVS pour le financement reviendrait à ignorer la volonté du peuple», écrit le Parti socialiste (PS) dans sa réponse à la consultation. Le PS a un plan pour faire rentrer l'argent: des cotisations salariales supplémentaires de 0,8%.
Entre 2018 et 2022, les cotisations moyennes à l'assurance-accidents et à la prévoyance professionnelle ont baissé de 0,78 point de pourcentage. Le parti à la rose estime ainsi que cette alternative est la plus sociale et la plus supportable pour l'économie suisse. La cotisation de solidarité pour l'assurance chômage serait également supprimée et la charge fiscale des entreprises baisserait. «Une augmentation des cotisations salariales de 0,8% ne serait qu'un retour à la normale», estime le PS.
La gauche veut un supplément de retraite pour les femmes
Le PS met ici le doigt sur un point sensible: à partir de 2025, l'âge de la retraite des femmes sera progressivement relevé. En contrepartie, un supplément de rente AVS de 160 francs par mois au maximum sera versé à une génération de transition à titre de compensation.
Alors que tous les retraités pourront se réjouir de la 13e rente AVS dès 2026, les femmes âgées, elles, seront sur la touche: il n'y aura pas de 13e salaire sur le supplément compensatoire – supplément qui ne fait pas partie de la rente de vieillesse, mais qui est «versé en dehors du système de l'AVS», justifie la Confédération.
«Les femmes concernées se voient déjà refuser la compensation du renchérissement sur le supplément AVS et on leur refuse maintenant aussi ce coup de pouce, critique la conseillère aux États socialiste Flavia Wasserfallen. L'injustice se répète.» Si le supplément de rente était versé 13 fois, cela compenserait au moins un peu la perte de pouvoir d'achat due au renchérissement, dénonce la Bernoise. «Nous soulèverons à nouveau cette problématique au Parlement.»
«Injuste et illogique»
Même son de cloche du côté de l'organisation faîtière des syndicats Travail.Suisse: «Le fait que la compensation du renchérissement et à présent aussi le supplément de rente soient détachés du système de l'AVS n'est pas seulement injuste, mais aussi illogique», déclare le président de l'organisation Adrian Wüthrich.
Selon ce dernier, la Confédération fait ici une distinction artificielle qui ne fait que créer de l'incertitude chez les femmes concernées. «La très modeste compensation pour le relèvement de l'âge de la retraite des femmes perd successivement de sa valeur en raison du renchérissement, poursuit l'intéressé. Le projet actuel est l'occasion de remédier à cette erreur de base ou du moins de l'atténuer.»